Surprise : Je t'aime ! [Terminée]

Chapitre 14

- Vous ne savez pas ce que c'est, vous, que d'être en concurrence avec une sœur à qui tout réussi, commence Elizabeth entre deux sanglots.

Ian et moi acquiesçons sans trop savoir quoi répondre. Notre amie étant très discrète, c'est la première fois que je la vois se confier ainsi. Cela fait une semaine qu'elle semble avoir disparue de la circulation, et lorsque je l'ai vue arriver j'ai tout de suite compris qu'elle était encore bouleversée.

- Maria est grande, bronzée, blonde et elle sait plaire aux garçons... Comment je peux concurrencer avec ça ? Je n'ai qu'à sortir avec elle pour me rendre compte de ses atouts : chaque fois je suis invisible et elle a une assemblée autour d'elle...

Je dévisage mon amie, attendrie par son discours. Elle ne ressemble certainement pas à sa sœur de par déjà ses cheveux roux et son teint blafard mais elle dégage un énorme charme, qu'elle ignore encore.

- Ce rôle c'était ma seule réussite, vous comprenez ? Pour la première fois, ma mère me regardait autrement que comme le vilain petit canard..., elle a même organisé une réception en mon honneur !

Je me sens soudainement coupable. Si je n'étais pas apparue ici quelques semaines plus tôt elle aurait certainement eu le rôle principal...

Je ne trouve pas les mots pour la consoler. Je ne peux tout de même pas lui balancer qu'elle reste encore ma doublure, puisqu'elle ne jouera peut-être jamais Juliette à une représentation.

- Attends, je suis sûr que tu n'as jamais été le vilain petit canard, regarde toi enfin ! lui lance Ian.

Lise le regarde avec un léger sourire aux lèvres. Je sens bien qu'elle tente de faire bonne figure devant nous mais rien ne lui remonte le moral.

Malgré le fait que leur physique soit totalement différent j'ai l'impression d'avoir Eva, devant moi, des années en arrière. Même sentiment d'infériorité, même timidité maladive - cependant très mal surmontée par mon ancienne amie.

- Vous êtes adorables, ça ne changera pas le regard qu'elle aura de nouveau lorsque je lui annoncerai la nouvelle..., ajoute-t-elle finalement.

J'acquiesce, embêtée. Lise ne ment certainement pas lorsqu'elle évoque le comportement de sa mère envers elle. Ce genre de choses s'invente difficilement. Mais j'ai du mal à penser qu'une mère peut préférer un de ses enfants à l'autre. En même temps qu'en sais-je puisque je suis fille unique.

- Qu'est-ce qui te fait dire qu'elle te voit ainsi ? l'interrogé-je subitement.

Lise réfléchit un instant et son visage se tord en une grimace. Tout ceci semble encore douloureux pour elle et je me demande si je fais bien de remuer le couteau dans la plaie. N'est-il parfois pas mieux de laisser enfouie la douleur pour qu'elle ne remonte jamais ?

- Ma mère était mannequin lorsqu'elle était jeune, elle a donc toujours voulu avoir deux filles pour avoir la même carrière épanouie qu'elle, commence-t-elle, ce qu'elle a réussi pour ma sœur.

La petite rousse se tait un instant et nous dévisage comme pour nous demander le feu vert pour continuer.

- Seulement avec moi c'était impossible à cause de ma petite taille..., si l'on rajoute à ça mes deux pieds gauches je peux vous assurer que je ne suis en rien la fierté de la famille !

Elle baisse la tête, impuissante. J'aimerais pour rien au monde éprouver la douleur qui la ronge depuis toutes ces années. L'abandon est finalement presque mieux que ça.

- Tu n'as aucune honte à exercer un métier différent de celui de ta mère et ta sœur ! m'exclamé-je convaincue.

Lise lève de nouveau la tête, incrédule.