Chapitre 1: Amnésie

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Le gout cuivré du sang réveilla Kaythleen, qui encore sonnée papillota ses paupières, aveuglée par les différentes nuances de blancs. Elle tenta de se rappeler les événements, mais elle se heurta à un mur. Ses yeux s'ouvrirent sur un plafond nacré et une douleur vertigineuse à la tête, la fit gémir. 

-Kaythleen, dit une voix qu'elle identifia étant celle de sa mère. 

-Maman, parvint-elle à articuler malgré sa langue engourdie et sa bouche pâteuse.

Kaythleen se  redressa avec peine, les os s'entrechoquant dans son corps. La jeune fille ignora pourtant les protestations de sa silhouette endolorie. Les images tanguèrent devant ses yeux. Pourtant, elle parvint à discerner, le visage de sa mère et le reflet de ses prunelles glacées dans ses pupilles.

-Trésor! Enfin que s'est-il passé?

En réponse aux interrogations de sa mère, Kaythleen chercha dans sa mémoire, un quelconque indice lui permettant de se souvenir. Elle eut beau plisser les yeux, déjouer les nombreux pièges que lui imposaient son esprit, en vain. Ces souvenirs avaient disparus. 

-Je n'arrive pas à me souvenir de quoi que ce soit. 

Sa voix n'était qu'un murmure. Elle resserra son drap autour de sa poitrine et se blottit contre le giron réconfortant de sa mère qui s'asseya à ses côtés. Cette dernière lui caressa les cheveux, en un geste apaisant. Sentant la chaleur revenir en elle, Kaythleen s'autorisa à se laisser aller. Elle enfuit sa tête contre le torse de sa mère tandis que les larmes roulèrent d'elles-mêmes sur son pull en laine miteux. Sa gorge semblait s'enflammer et les sanglots secouèrent son corps de spasmes. Pourquoi ne se souvenait-elle de rien? Un bruit clos la força à se détacher de sa mère. Les yeux rougis, elle dévisagea la femme vêtue de blanc qui venait d'entrer, un bloc de feuilles à la main. Lorsqu'elle vit Kaythleen, elle lui adressa un petit sourire.

-J'ai les analyses des examens passés par votre fille. (elle jeta un coup d'œil gêné à Kaythleen) Puis-je vous en parler dehors?

Cette dernière acquiesça. Une fois les deux femmes sorties, Kaythleen se laissa tomber sur son oreiller. D'ailleurs ou était-elle? Sûrement pas chez elle, dans sa chambre. Déjà qu'elle était incapable de se souvenir de événements de la veille ou qui sait, d'une semaine, voilà qu'elle doutait de la décoration de sa propre chambre. Non, elle n'était tout de même pas traumatisée à ce point-là? Si? Et puis traumatisée par quoi, d'abord?

Des multitudes de questions tournoyaient dans son esprit. Elle inspira une goulée d'air et expira puis se massa les tempes. Quel était son dernier souvenir déjà? Une soirée chez sa meilleure amie. Une fête ou elle avait un peu trop bu. Ensuite? Le néant.

C'est cet instant que choisirent les deux femmes pour pénétrer dans la chambre.

-Où suis-je? Demanda la jeune fille.

-A l'hôpital.

Au moins, ça elle le savait. Du moins, elle s'en doutait un peu. Un homme entra peu de temps après. Pas particulièrement vieux, mais pas particulièrement jeune non plus. Il avait la peau jaunie et des yeux bridés ainsi qu'une tignasse hirsute de cheveux noirs éclatant de santé.

Son regard passa de Kaythleen à sa mère, puis de nouveau à Kaythleen.

-Nous avons effectué des test, commença l'homme. Votre corps se remet très rapidement, mais vous avez quelques troubles de mémoire, je présume.

Elle acquiesça, redoutant la suite des aveux de l'homme.

-Il semblerait que durant l'accident, une zone de votre cerveau a été gravement touchée. En clair, vous souffrez d'amnésie. Vous vous souvenez de quel âge, vous avez?

Kaythleen souffla de soulagement. Au moins une chose dont elle se souvenait.

-Quinze ans, murmura-t-elle. J'ai quinze ans.

Elle guetta le regard approbateur de sa mère. Cette dernière prit soin de l'éviter et trouva une nouvelle importance à ses bottes rouges.

-Tu as dix-sept, Kaythleen.

La jeune fille resta coi, ses mouvements suspendus dans l'espace-temps. Elle en oublia presque de respirer lorsqu'elle entendit la terrible nouvelle que lui avait annoncée sa mère. Elle avait dix-sept et non quinze comme elle le pensait. Ce qui signifiait qu'elle avait oublié deux ans de sa vie. Deux ans de sa vie qui ne réapparaitrait pas. Deux ans qu'elle avait perdus.

A la tombée de la nuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant