5

1.4K 15 0
                                    

L'appartement était sens dessus dessous. Dans le vestibule les

placards avaient été vidés. Linge de table et ustensiles de cuisine

jonchaient les parquets. Le vaste salon, très lumineux avec ses

baies vitrées donnant sur une terrasse arborée, semblait avoir

été pris d'assaut lui aussi, mais pas par la femme de ménage :

étagères renversées, tiroirs ouverts, livres et disques éparpillés

sur le sol et sur le canapé de cuir clair. Apparemment, aucune

dégradation sur les meubles ou les objets de décoration, mais

chaque vase avait été retourné, chaque boîte de rangement

inspectée, jusqu'aux tableaux qui avaient été décrochés et jetés

sur la moquette. Je continuai mon inspection en essayant de

faire le moins de bruit possible, examinant ce qui restait du

contenu des placards de la cuisine américaine. Peut-être les

cambrioleurs étaient-ils encore sur les lieux...

Et Ann ? Où était Ann ? Je ne me sentais pas prêt à affronter

seul une bande de malfrats musclés, armés de battes de baseball

ou de barres à mine, voire de couteaux à cran d'arrêt, de

pistolets... J'étais relativement grand mais fluet, j'avais des

« épaules de serpent », comme m'avait dit un jour un ami

pour se moquer, et je n'avais jamais impressionné personne,

sinon moi-même, peut-être, et encore rarement... J'étais

stagiaire et je n'avais pas d'arme, évidemment. Et qu'en auraisje

fait, d'ailleurs ? J'étais surtout capable, avec une arme, de

me tirer une balle dans le pied... Je longeai le couloir qui

desservait une première pièce sur la gauche et poussai la porte

entrouverte. C'était la salle de bains, totalement retournée,

elle aussi. Parfums, crèmes de beauté, médicaments, flacons

de toutes sortes, serviettes et vêtements d'intérieur étaient

entassés, pêle-mêle, dans la baignoire, ou jetés sur le meuble

du lavabo. Rien à signaler dans la pièce suivante dont la porte

était grande ouverte et qui abritait les WC. La dernière porte,

située au fond du couloir, devait en toute logique ouvrir sur

la chambre à coucher. Elle était fermée. Je restai planté là,

indécis, l'oreille plaquée contre le panneau, tentant en vain

d'identifier un bruit, imaginant le pire. Mais que pouvait

être le pire ? Surprendre les voleurs en plein cambriolage et

m'exposer à leur immédiate réaction, ou bien découvrir Ann

laissée pour morte, peut-être violée ? Je me sentais incapable

de choisir entre ces deux options. En vérité, je n'en souhaitais

aucune. Mais, au risque de me faire exploser, j'avais une toute

10 jours de canicule [publié, mais épuisé, chez ETT]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant