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Une lettre anonyme est arrivée le lundi suivant, par le

courrier du matin. Ann est venue me rejoindre sur la terrasse,

le papier à la main, le visage décomposé. Je buvais un jus de

fruit, debout face à la Tour Eiffel en repensant au week-end

idyllique que nous avions passé ensemble. C'était devenu une

habitude chez moi, même si je n'étais avec Ann que depuis trois

jours, de me poster de la sorte pour embrasser du regard cette

ville allongée sous mes yeux, caressée par le soleil levant. Elle

me tendit la feuille en tremblant. Des caractères en majuscule

et en minuscule, de tailles et de polices variées découpés dans

un journal formaient ces mots :

"Nous Savons où est ton Fils.

Remets-nous les LETTRES sinon......."

Sur le coup, je n'y comprenais plus rien et je me posais des

questions. Si Dubourg était à l'origine du cambriolage (comme

Ann l'avait laissé entendre) et s'il était l'auteur de ce courrier,

qu'il avait quasiment signé, pourquoi éprouvait-il le besoin

de se cacher derrière l'anonymat ? Il se doutait bien qu'Ann

le soupçonnerait. À moins qu'il ne craigne qu'elle remette ce

document à la police ? Car il s'agissait bien cette fois d'une réelle

menace à l'encontre de son ex-maîtresse et de son petit garçon.

Mais Dubourg était AUSSI le père de cet enfant, même s'il

refusait de l'admettre. Et il irait jusqu'à utiliser son PROPRE

fils pour faire pression sur Ann et la forcer ainsi à détruire les

preuves de sa paternité, niant par là même l'existence de son

enfant ? Je ressentais trop de contradictions dans cette manière

d'agir que je jugeais perverse et qui échappait totalement à

mon entendement.

Je formulai tout haut ces quelques réflexions qui rendirent

Ann plus désemparée encore, mais je lisais dans ses yeux que,

pour elle, il n'y avait aucun doute à avoir sur l'expéditeur de la

lettre anonyme : ce ne pouvait être que lui.

- Je ne vois qu'une seule chose à faire à présent, lui suggérai-

je en la serrant dans mes bras : il faut te résigner à rendre

ses lettres à ton ancien amant. Je peux m'en charger, si tu le

souhaites.

Étant donné la tournure que prenaient les événements, je

pensais sincèrement que, pour Ann, c'était la meilleure solution.

Mais je devais également avouer que celle-ci arrangeait bien mes

affaires. Je faisais en effet d'une pierre deux coups : je menais à

bon terme la mission qui m'avait été confiée tout en ne perdant

10 jours de canicule [publié, mais épuisé, chez ETT]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant