[31-Bataillon d'exploration]

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« Crétin ! Abruti ! Pauvre nain sans cœur !

- Je n'ai aucune envie d'avoir cette discussion sans intérêt.

- Tu devrais pourtant, espèce d'idiot !

- Ça ne m'intéresse pas plus qu'hier, avant-hier et les jours d'avant.

- Ça devrait pourtant, ça te concerne tout comme moi. »

Hanji abandonne et se retourne. Elle s'en va en soupirant. Livaï quant à lui, rentre dans sa chambre. Il grommelle et se couche tout habillé sur son lit. Il fixe le plafond sans penser. Il n'en a pas besoin. S'il pense, il n'aura qu'une idée en tête : partir la chercher. Comme Hanji, il est hors de lui mais autant passer ses nerfs sur les recrues de l'ancienne cent-quatrième. Ce gamin aussi doit s'en vouloir de l'avoir laissée partir. Jean Kirschtein doit forcément se demander où elle se trouve.

Quelle inconsciente, cette fille. Où pouvait-elle bien être en ce moment ? Livaï se relève et va prendre un des seuls morceaux de papier qui ne sont pas rangés sur son bureau. Il ne les a jamais archivés, dans l'espoir que ce ne soit pas une « affaire classé ». Il a encore ce vain espoir que ce soit faux. Il lit tout de même ce qui est écrit en se prenant la tête dans une main.

Commandant Erwin Smith,

Soyez informé que la recrue Emily Underhill a quitté la capitale sans encombre.

Que vive l'humanité.

Il pose le message et s'empare d'une deuxième note.

Commandant Erwin Smith,

Soyez informé que la recrue Emily Underhill a disparu dans une soudaine attaque armée de son convoi de retour. Sa mort n'aura pas été vaine.

Que vive l'humanité.

« Sa mort n'aura pas été vaine ». Quelle idiotie. Elle n'est pas morte. Livaï en est certain. Son entraînement n'a pas pu ne servir à rien. Il s'était attaché à cette sale gamine. Elle était devenue chère à ses yeux. Un lien qu'il aurait pourtant tout fait pour éviter. Après la mort de Louis Underhill, il avait réellement compris qu'il avait en fait agit à sa place pendant tout ce temps. Il se sentait responsable d'elle maintenant. Quelle plaie que la responsabilité. Ça impose de faire des choix. Il avait encore fait le mauvais, il aurait dû la retenir de force. Louis aurait fait le bon choix, c'était son véritable grand frère.

Livaï se tourne vers d'autres morceaux de papier, dont un en particulier qui a attiré son attention tout de suite.

Commandant Erwin Smith,

Le titan féminin a été libéré de prison. Veuillez rester sur vos gardes, elle est dangereuse comme vous le savez déjà. Surveillez le sujet Jaëger de près. Toute trahison le conduira à la peine de mort par pendaison.

Que vive l'humanité.

Il n'y avait qu'une personne qui pouvait infiltrer la prison de la capitale : Kenny. Mais qu'aurait-il bien pu gagner en faisant cela ? C'étaient les questions que Livaï s'était posé en premier. Puis il y avait eu toute cette histoire liée aux Reiss et le principal sujet de la théorie du caporal-chef s'était montré. Avant sa mort, Kenny lui avait vomi des tonnes d'informations à la figure. Son nom de famille, son lien de parenté avec lui, le sérum des titans... Livaï lui avait posé des questions sur le titan féminin également dans son agonie :

« Pourquoi tu as libéré ce titan, hein ? Qui t'avais demandé de le faire ?

- Tu... tu dois le sa... voir. Tu l'as entraînée, comme je ... l'avais... fait pour toi.

- Son nom, dis-moi son nom !

- Pas de nom. C'est... l'enfant... al... binos. »

Il lui avait fermé les yeux. Il était partit. Bien qu'étant bouleversé par la mort de son oncle et mentor, il avait souri. Elle était peut-être en vie. Cachée. Il ne l'avait pourtant dit à personne, c'était son secret. Hanji, l'avait submergé d'insultes de plus en plus souvent. Elle avait quand même eu la présence d'esprit de faire comme si de rien était quand ils n'étaient pas seuls. Livaï savait ce qu'elle ressentait. Elle aussi se sentait responsable de la gamine, de la même façon que lui à vrai dire. Livaï était devenu plus détendu depuis qu'il avait rencontré Emily, et était redevenu strict quand elle était partie.

Quelqu'un frappe à la porte brusquement.

« Je n'ai toujours pas envie de te parler, Hanji, maugrée-t-il.

- Ce n'est pas Hanji, caporal-chef, dit une voix tremblotante. »

Livaï ouvre la porte sur Jean, les genoux flageolants. Il avait été forcé de venir ici, vu sa tête.

« Tu ne te prépare pas pour l'expédition de Shiganshina, gamin ?

- Eh bien, c'est ce que je faisais mais Hanji m'a dit qu'elle ne pourrait plus vous parler avant la fin du monde et m'a donné ça. »

Livaï prend le carton des mains de Jean, il est abîmé mais toujours fermé par une force qu'il définit comme étant surnaturelle. Il adresse un signe de tête à Jean mais celui-ci ne s'en va pas et entre dans la chambre en mettant de la boue sur le sol.

« Caporal-chef, je sais que cela va vous importuner mais... C'est à propos d'Emily. Nous comptons faire un éloge funèbre avant le départ pour Shiganshina. Comme nous n'avons pas vraiment eu le temps avant...

- Je ne donnerai pas l'autorisation pour faire ce genre de bêtise sans intérêt, s'agace Livaï. Sors d'ici, Kirschtein. Ne me le fais pas répéter.

- Vous vous fichez donc qu'elle soit morte ? Vous pourriez au moins ressentir quelque chose, merde ! »

Le regard haineux que lui lance le supérieur fait taire Jean d'un seul coup. Il s'en va en râlant. Livaï pose le carton sur les morceaux de papier du bureau et entreprend de nettoyer la boue.

Ceci fait, il ouvre le paquet. De la poussière en sort dans un petit nuage. A l'intérieur, une mèche de cheveux rouge et une énorme chemise. Isabel et Farlan.

Le soldat le plus puissant de l'humanité tombe à genoux en serrant ses souvenirs dans ses bras tremblants. Il sait d'où provient tout ça, de sa propre maison. Mais elle se trouve dans les bas-fonds. Personne n'a pu s'y installer, c'est impossible. Il se relève tant bien que mal et, gardant la chemise et les cheveux écarlates dans son autre main, il extirpe l'objet restant dans le carton. Il écarquille les yeux et une première larme s'échappe de ceux-ci. Son foulard. Un des nombreux qu'il avait laissé là-bas, comme s'il allait y retourner. Un bout de papier froissé tombe par terre. Livaï a les bras plein de ces souvenirs qui lui rappellent ses anciens amis morts au combat. «Sa mort n'a pas été vaine ». Leur mort à eux l'avait été à cause de son mauvais choix. Et il avait recommencé avec la gamine. Il se penche, s'accroupit par terre, toujours les objets dans ses mains, et déplie le papier :

J'ai fait la poussière. C'était dégueulasse.

Livaï se met pour la première fois depuis longtemps à sangloter, sans prendre la peine de le faire en silence. Elle est en vie.

Chapitre écrit par mon incroyable amie Margot que je remercie du fond du coeur.

Emily UnderhillOù les histoires vivent. Découvrez maintenant