Chapitre 11 : Ailleurs.

810 70 5
                                    

Dans la rue, quelques personnes passent rapidement. Je regarde les papiers d'identité que j'ai dans le portefeuille pris sur l'homme dans le hangar. Il s'appelle Victor Dery et habite dans le huitième arrondissement de Paris. Une épaisse liasse est présente. Je prends la carte bleue et à un distributeur, je prends tout ce que je peux retirer. Me voilà avec une coquette somme. Quelques minutes plus tard, dans un autre quartier de la capitale, je vends la montre. Quelques minutes encore et me voilà à la Gare de Lyon, auprès des consignes. J'en ouvre une dans laquelle je ramasse des papiers d'identité, des coordonnées bancaires ainsi que quelques vêtements

Dans cette gare, je me lave. Dans la cabine, l'eau chaude ruisselle sur mon corps. Ça me fait du bien de sentir toute cette crasse accumulée par les derniers jours. Je m'habille avec des vêtements plus communs qu'un costard d'un grand couturier et je ressors de la gare.

Je traverse la Seine pour aller à la Gare d'Austerlitz. Du pont Charles de Gaulle, j'aperçois les bateaux qui voguent sur la Seine. Ils sont nombreux depuis l'installation des multiples canaux entre les grands fleuves. Bateaux de transport, mais aussi bateaux de particuliers aux privilèges abondants qui se payent le luxe d'habiter sur l'eau, voguent sur le large fleuve qui traverse la capitale. Du pont, je peux apercevoir divers bâtiments. Un fort contraste me saute aux yeux entre le centre de Paris, ancien et peu peuplé, et la périphérie aux constructions récentes au design futuriste et très peuplé.

Mes pérégrinations oniriques s'achèvent lorsque j'arrive à ma gare de destination. J'y prends un billet pour le sud. J'ai quelque temps à attendre. J'en profite pour me sustenter et passer sur internet. Les v-games se déploient lentement. Les joueurs commencent à affluer. Je monte dans mon train. Il est peu rempli. Seules trois personnes sont là dans le wagon avec moi. Je fais tout pour qu'on ne me voie pas. Je prononce quelques mots afin que ma présence ne soit pas remarquée. Je m'endors, bercé par le rythme du train.

Je me réveille en sursaut alors que le train s'approche de la gare où je veux descendre. Je me lève doucement, toujours sans être remarqué. Aucun train ne s'arrête à cette gare désormais. Je m'approche de la porte. Quelques mots et mon corps devient intangible. Il perd sa consistance pour prendre un état gazeux. Je n'aime pas faire ça. J'ai à chaque fois l'impression que tout mon être s'éparpille partout atour de moi. Arrivé à la gare, je m'expulse hors du train. Je suis une traînée de brouillard blanchâtre étalée sur quelques mètres sur le quai d'une vielle gare de province. Je me réassemble dans le couloir souterrain sous les voies. J'arrive devant le bâtiment principal. Les vitres sont pour certaines éclatées, les portes condamnées. Je franchis la porte pour rentrer dans le petit hall voyageurs.

Une personne s'y trouve, assise sur une chaise en plastique, comme si elle attendait. C'est une petite vieille habillée de vêtements dont les couleurs, initialement dans les bleus, sont maintenant bien délavées.

- Ah, c'est donc vous, me dit-elle. Je ne pensais pas que vous ressembleriez à ça.

- Pardon, fais-je surpris ?

- Eh bien voilà maintenant douze ans que cette gare a fermé. Depuis ce jour-là, j'attends l'arrivée de quelqu'un. Je ne pensais pas que ça serait quelqu'un comme vous. Comment vous-vous appelez ?

- Appelez-moi Godot.

- Ah, vous avez le sens de l'humour. Vous êtes vraiment étonnant. Et vous venez pour quoi ? Pour la Creuse ? Pour les balades ?

- Pour le musée.

- Tiens, des gens se souviennent encore du musée, c'est étonnant. Toute la fin de ma vie, j'aurais attendu quelqu'un venu pour un musée. Voilà qui n'est pas banal. Merci d'être venu, maintenant que vous êtes là, je vais pouvoir partir en paix.

Le réveil des Sang-dragonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant