Chapitre 29

630 40 5
                                    




Le trajet dure une heure, dans un silence apaisant pour tous après la tension du pèlerinage au Bureau. Mark a indiqué que la destination se trouvait environ à mi-chemin entre le Bureau et le lac, vers l'Est. Tris s'est endormie, la tête sur les genoux de Tobias, épuisée par les émotions qui l'ont traversée dans le labo d'armement. Au moins, Christina ne voit aucune crispation sur son visage.

Parfois, par sécurité, Mark stoppe le camion, va vérifier l'intégrité de la piste qu'il suit, puis repart. Le paysage est sec, les bosquets sont petits, l'herbe rase sauf à certains endroits où, sans doute, une nappe d'eau affleurant le sol a permis à la végétation de renaître, et autorisé de hautes graminées ondulantes à prospérer. Plus ils s'éloignent du Bureau, plus les bois et les plantes sont nombreux, et variés. Le complexe doit absorber une grosse partie des ressources naturelles pour son développement.

Au bout d'une demi-heure de route, Mark reconnaît déjà les paysages qui caractérisent sa région natale. Des petits cours d'eau torturés, tordus comme des veines sur une peau ridée, des arbustes plus nombreux, des chemins balisés, un village au loin, dont il connaît plusieurs habitants. L'homme de la Marge a averti ses équipiers de la possible hostilité de certains habitants, qui ne peuvent pas encore oublier les souffrances, l'isolement, l'exploitation dont ils ont été victime du temps de David. La vigilance sera indispensable en permanence, même si la présence de Mark sera évidemment de nature à calmer certains agressifs.

Quand le chauffeur prévient qu'il ne reste plus que quelques kilomètres, Tobias réveille Tris, les affaires sont rassemblées, l'armement vérifié et fixé aux tenues. Il ne s'agit pas de préparer une offensive, mais d'être prêt en cas d'attaque. D'ailleurs, Tobias le répète : aucune agression ne doit provenir d'eux.

- Il est préférable d'aller se présenter au village, pour ne pas avoir l'air louche, propose Mark. Et je ne serais pas fâché de revoir ma famille.

- Tu nous guideras, Mark, approuve Tobias. Combien de personnes compte ton village, et combien sont armés ?

- Nous sommes plus d'une centaine aux dernières nouvelles. Un tiers des adultes peuvent être armés, répond Mark. Mais avant tout, c'est un village calme, nous ne cherchons pas les ennuis.

- C'est noté. Mais nous sommes clairement en infériorité numérique, même si nous sommes mieux préparés au combat. Pas d'héroïsme, ok ? Tris, ça ira ?

- Oui, bien, confirme Tris en ajustant sa tenue d'Audacieux et vérifiant l'arrimage de son couteau, son arme favorite.

La jeune fille tresse ses longues mèches blondes pour empêcher le vent taquin, en les faisant voltiger, de lui boucher sa vue. Elle ouvre la porte latérale du camion et s'assoit au bord.

- Qu'est-ce-que tu fais Tris ? demande Christina.

- Je me mets à leur place, un gros camion bruyant et fermé, c'est hostile. Avoir une attitude décontractée en arrivant est déjà plus positif, ça prouve qu'on n'a pas de mauvaise intention, argumente Tris.

Derrière elle, Tobias sourit, du Tris tout craché. Une Audacieuse qui utilise son côté Erudit pour ne pas avoir recours à la force. Et c'est en ça qu'elle est différente de Beatrice, qui elle, était sur le pied de guerre tout le temps. La bienveillance domine Tris, là où la colère noyait Beatrice le plus souvent dans des réactions épidermiques qui faisaient douter de leur légitimité. Il reste à savoir si Tris frise ou non la naïveté dangereuse... Tobias se place debout près d'elle, appuyé le plus naturellement possible contre la paroi coulissante ouverte du camion, cramponné pour absorber les nombreuses inégalités de la piste.

Divergente 4 - RésurgenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant