Chapitre 35

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Tris laisse le bus qui l'emmène à la ferme de Jeremy, brinquebalant sur la route inégale, la bercer. Elle sourit vaguement en repensant à l'expression de ses compagnons de route quand elle est montée dans le bus, étonnés de voir une jeune Audacieuse les suivre aux travaux agricoles. Tous étaient vêtus de la tenue traditionnelle des Fraternels.

Par moment, Susan entame un babillage sur l'activité de la ferme de Marcus, dit Jeremy, sur Caleb, ou sur les cheveux de Tris sur lesquels elle ne cesse de s'extasier.

- C'est ton idée, la mèche sur le côté Susan, merci, dit Tris pour meubler un peu la conversation. On voit moins ma cicatrice comme ça.

Tris laisse Susan lui faire une grosse tresse, tout en réfléchissant. Déjà, elle n'est pas complexée par sa cicatrice, elle lui rappelle chaque jour la valeur de la vie, la chance qu'elle a eue d'être formée pour se défendre, et surtout, le bonheur d'avoir des amis.

Et puis Tris n'est pas trop d'humeur à parler. Cela fait plusieurs nuits qu'elle dort mal, et elle est certaine que Tobias s'en est aperçu. En se réveillant en sursaut, elle trouve toujours ses bras sur ou autour d'elle pour l'aider à se rendormir. Nul doute que les révélations sur ses ancêtres, et en particulier leur espérance de vie si courte, est la raison de son inquiétude.

Pourtant, Tris se dit qu'elle n'a pas peur de mourir, enfin, elle le croit. Beatrice n'avait pas peur de mourir, elle a même défié la mort plusieurs fois. Une fois de trop. Sans avoir sa fougue irraisonnée et parfois suicidaire, Tris comprend aujourd'hui mieux son sacrifice. Peut-être la lecture des archives des Prior lui a-t-elle ouvert les yeux sur la vraie raison de son existence, sur son destin. Peut-elle lutter contre ? Le doit-elle ? Ses parents étaient les gardiens de la boîte, ils l'ont défendue jusqu'au bout. Beatrice a donné sa vie pour éviter à toute la population de Chicago d'être lobotomisée. Caleb a travaillé pour lui donner la vie, à elle, afin de donner une chance à la ville de poursuivre l'œuvre de Beatrice, aux Divergents de trouver leur place et de prouver leur absolue nécessité pour la réparation génétique de l'être humain. Mais elle ? Quelle doit être son œuvre ? Pourquoi Caleb n'était-il pas l'héritier apparent ? Beatrice est partie car elle avait accompli la mission pour laquelle elle était destinée. Et son œuvre à elle ? L'eau ? Tris n'y croit pas. Tôt ou tard, les scientifiques auraient trouvé la solution.

Elle ferme les yeux, appelant au secours ses illustres ancêtres, pour qu'ils lui soufflent la réponse. Mais elle ne parvient qu'à ressasser ses cauchemars. Selon les nuits, elle se retrouve au bord d'un gouffre sans fond, poussée par une force irrésistible, et elle tombe en entraînant Tobias, Christina et tous ses ancêtres avec elle, dans un grand cri.

Susan voit bien que son amie est pensive, voire renfermée. Ce n'est pas habituel chez elle. Mais son éducation Altruiste lui interdit de se montrer curieuse. Elle a été étonnée quand, la veille, Tris est venue rendre visite à son frère, pour lui demander de profiter du trajet de Susan vers la ferme Fraternelle de Marcus, où elle travaille. La jeune fille a raconté à son frère une partie de ses découvertes dans les archives secrètes des Prior. Assez pour l'intéresser, lui livrer des bribes de l'histoire et de la destinée familiale, mais pas suffisamment pour effrayer Caleb avec ses craintes de décès prématuré. Caleb s'est mis en colère quand Tris lui a refusé l'accès à ces archives secrètes.

- Tris, pourquoi me mets-tu à l'écart, enfin ? s'est indigné Caleb. Si, comme tu le dis, nous sommes une lignée de Gardiens, j'en fais partie aussi !

- Je... Je ne sais pas, Caleb. Je ne te mets pas à l'écart puisque je t'en parle ! Je ne comprends pas encore ce qui m'arrive, ni pourquoi moi, j'ai eu accès à ces archives, et pas toi. Rien n'arrive par hasard, j'en suis sûre, laisse-moi le temps de... réfléchir.

Divergente 4 - RésurgenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant