« Je vais ouvrir ! »
Trois coups venaient de retentir à la porte, l'heure de l'interview était arrivée.
L'homme qui pénétra dans la cuisine n'en était assurément pas un. Il en avait l'apparence, bien sûr, mais, lorsqu'il se présenta, on put entendre des notes métalliques dans sa voix et son regard resta figé lorsque les coins de ses lèvres se soulevèrent dans une mimique qui, dans ses programmes, devait probablement se nommer « sourire ».
« Pouvons-nous commencer ? »
Europe hocha vivement la tête, pressé d'en finir.
« Bien, avant cela je tiens à vous dire que si une de mes questions provoque en vous une des réactions négatives suivantes : tristesse, colère, gêne, embarras, agacement ou un sentiment global de mal-être, il vous est permis de me le dire et je n'insisterais pas. »
Un peu déconcerté, il finit par répondre d'une petite voix tout en captant du coin de l'œil des mouvements assez rapides. Son accompagnatrice était en train de pianoter comme si sa vie en dépendait sur un clavier. Devant le regard interrogatif du garçon, elle fit un signe de la main signifiant plus ou moins qu'il ne devait pas prêter attention à elle.
« Très bien, pouvez-vous me décrire précisément ce que vous faisiez avant l'accident ?
— Heu... On était venus pour visiter la station et aussi le logement qu'on nous proposait. On était dans... heu... je ne sais pas très bien... La partie juste avant la station. Un peu comme un hall d'entrée ? Les autres stations n'ont pas ça mais celle-ci oui, c'est parce qu'on devait s'équiper avant d'entrer. Mes parents étaient devant la porte, ils m'attendaient, le robot n'arrivait pas à trouver un masque pour respirer sous l'eau à ma taille. Donc mes parents attendaient en regardant l'intérieur de la station à travers une vitre. C'était très joli et... heu... bleu. Et moi j'essayais d'enfiler ma combinaison, c'était pas facile parce qu'elle collait beaucoup à la peau mais il fallait la mettre sinon on n'aurait pas pu marcher au fond de l'eau, on serait remontés à la surface comme lorsqu'on plonge à la mer. Sauf que là, il n'y avait pas de surface. »
Europe s'arrêta et prit une grande inspiration. Il avait déjà raconté cela, juste après son réveil à l'hôpital, mais alors le choc l'avait empêché de se rendre compte qu'il était en train de parler du pire moment de sa vie. Il avait agi comme une sorte de cocon qui lui avait permis de parler sans fondre en larmes, d'une voix atone.
« Et ensuite ? Vous n'avez pas répondu à l'intégralité de la question, vous deviez aller jusqu'à l'accident. Vous avez l'air triste... Ma question provoque-t-elle en vous une des émotions négatives dont nous avons parlé précédemment ? demanda-t-il après un petit moment de silence.
— Non, ça va. Après ça, je ne sais plus trop. J'ai entendu un grand bruit, je crois que c'était la vitre qui se fissurait mais je n'en suis pas sûr. On m'a dit qu'il y avait eu un souci avec la pression. Que normalement tous les jours on enlevait toute l'eau de la station pour la remplacer par de la propre et que l'eau sale était ensuite nettoyée pour être réutilisée. Et... je n'ai pas très bien compris mais les journaux expliquaient que lorsqu'on enlevait par exemple un verre d'eau, en fait c'est pas un verre c'est beaucoup plus mais un verre c'est plus simple, bref. Lorsqu'on enlevait un verre on en rajoutait aussi un de propre pour que ça ne se vide pas vraiment. Et je crois qu'il y avait aussi une histoire comme quoi on mettait quelque chose dans l'eau sale qui devenait plus lourde, je crois, juste avant de commence à vider pour ne pas mélanger les deux eaux. La propre était plus claire et restait en surface, comme ça on savait aussi où s'arrêter et... Je... Heu... Ah, la pression. Oui. Mais le jour de l'accident il y a eu un souci, ils ont commencé à rajouter de l'eau mais l'endroit par où sortait celle usée ne s'est pas ouverte. Et impossible d'arrêter d'ajouter de l'eau, il y a eu un souci avec les machines et donc...
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Nouvelle Terre:
Научная фантастикаNous sommes 100 ans dans le futur et l'Homme vit dans une immense station spatiale du nom de Nouvelle Ère. Là bas un garçon de dix ans du nom d'Europe écoute d'un air émerveillé les histoires de son grand-père et de deux autres personnes âgées: Luna...