Le médaillon de Mousseline

Une journée normale

Le retour à la réalité était toujours un peu violent. Son père, agenouillé devant elle dans le couloir qui menait à leur appartement, lui caressait le front, envahit de sueur.

- ça va?

- J'ai soif...

Il l'aidait à se relever, et l'accompagnait à l'intérieur de la maison. Assise à la table de la cuisine, un verre d'eau fraiche entre les mains, elle racontait sa vision. Puis, comme toujours, elle tentait de raccrocher cette nouvelle pièce au puzzle qui s'étoffait à chaque malaise.

- Ernestine avait donc retrouvé Madame Royale après la révolution. Tu sais toi, ce qu'est devenue Marie-Thérèse après la prison? J'ai lu ça quelque part: elle avait survécu, mais je n'ai jamais pensé qu'elle se serait revue... ce matin Étienne, m'a dit que Ernestine avait sans doute terminée en tant que "contesse des ténèbres"...

- La contesse des ténèbres?

- Une femme qui, en Allemagne, se promenait sans cesse en noir, le visage voilé. On a d'abord cru qu'il agissait de Madame Royal, qu'elle avait été échangée. Mais en fait, non quand on a retrouvé son corps, on a fait des analyses ADN, et elle n'avait pas de lien avec Marie-Antoinette...

Mr Bastille était un peu bousculé, par les connaissances de sa fille. Même si il savait qu'elle s'était beaucoup documentée sur le sujet depuis 5 ans, l'exactitude et la finesse de ses propos ne le rendait pas moins fier.

Le téléphone de Thomasine sonnait et le fit sortir de sa rêverie.

- C'est Étienne.

- Tu veux que je décroche?

- Oui, je veux bien... Je vais aller me prendre un bain. Besoin de récupérer.

Elle se faufila dans la salle de bain, laissant son père au prise avec Etienne, qui était parti sous sa propre injonction retrouver sa mère. Elle fit couler l'eau dans la baignoire, se déshabilla et se regardait dans le miroir. Elle fut effrayé par sa maigreur.

Depuis quelques temps, elle était tellement obsédée par sa quête qu'elle en oubliait de vivre. Le baiser d'Etienne, lui avait révélé cet vérité cruelle mais la maladie de sa mère l'avait ramené à l'urgence de la sauver. Elle se sentie soudainement déchirer entre cette obsession de vivre sa vie d'adolescente, et la nécessite de résoudre son enquête.

Elle étouffa un sanglot dans sa main puis, accroupie derrière la porte, laissa venir les larmes. Elle restait là, prostrée, jusqu'à ce que le bain soit plein.

Elle glissait un pied dans l'eau trop chaude. Cela lui rappelait son enfance: sa mère faisait couler des baignoires toujours trop chaudes, puis petit à petit, elle s'habituait et finissait par rester des heures dans une eau qui mettait un certain temps à refroidir. Dans ce souvenir de petite fille, les larmes se tarirent.

Au bout d'une bonne heure, complétement détendue, elle enfila son peignoir blanc, enroula une serviette dans ses cheveux, et sortie de la douche.

Ce soir, la rencontre avec madame Fontanes était annulée. Elle avait envie de se coucher, en regardant le premier épisode de Game of throne que tous les élèves de sa classe adulaient mais qu'elle n'avait jamais eu le temps de regarder.

Une fois qu'elle eut enfiler son pyjama, elle se rendit dans le salon et proposa une soirée cocoon, une soirée, père/fille comme ils en faisaient quand sa mère était en déplacement.

- Je pense même que l'on pourrait installer la télévision dans la chambre de ta mère et regarder tous les trois une croute, en grignotant au lit.

L'idée la séduit. Sa mère avait été exclue de leur monde depuis deux jours, il était temps de la retrouver.

- Au fait? Etienne...

- Ah oui! En fait j'ai parlé avec sa mère. Elle me disait qu'elle était fatiguée, et qu'en effet elle préférait repousser à demain...

- parfait! Installe l'ordi dans la chambre, je vais préparer le pic-nique.

Dans la cuisine, elle éplucha quelques carottes à croquer, sortie les tomates cerises et les chips et se lança dans la conception de 4 ou 5 crêpes. Quand tout fut prêt elle entra dans la chambre de ses parents:

- Prêt pour le grand cinéma!!!

Mais à nouveau le téléphone sonna. C'était Etienne. Le sentiment de déchirement qu'elle avait éprouvé dans la salle de bain, la saisi immédiatement. Elle baladait ses yeux entre le téléphone et ses parents. Son père lui fit signe de décrocher.

- Etienne... dit-elle en sortant de la chambre.

- Thom, je viens de parler avec ma mère d'Ernestine. C'est son sujet de prédilection. Elle m'a montré des tableau la représentant. Et il y a une légende....

- Quoi?

- Une légende. Une légende qui dit qu'Ernestine, avant la fuite à Varennes aurait confié à Madame Royale un bijoux. C'était la promesse de se revoir. C'était deux gamines Thom, elles se sont fait des promesses! Et devine.... Devine quel bijoux c'était....

Thomasine s'asseillait sur le canapé. Elle fit immédiatement le lien avec sa vision. Ernestine et la froideur de Madame Royale. Elle venait retrouver une amie et celle-ci ne lui parlait que de rang à tenir. Toute sa vision prenait un autre sens. Le bijoux, la prédiction, et Ernestine.... Il n'y avait pas besoin d'être un génie, pour deviner.

- UN MEDAILLON.