Connexion #16

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Oh, là là là là... J'ai merdé. Enfin, je crois. Disons que j'ai semi-merdé.  J'ai un Oncle posé sur le canapé, en face de moi, au moment où j'écris  ces lignes et... Comment vous expliquer... Bon, je vais commencer par le  début.

Ce n'est pas celui que je préfère, mais disons qu'il a la  capacité de me rassurer – enfin... tout est relatif. Il était aux  alentours de minuit et il n'y avait personne à la maison, mes parents  étant chacun en déplacement (ma mère à Paris, mon père à Bruxelles).  J'étais tranquille, pépère sur le canapé, en train de lire Ne le dis à personne,  de Harlan Coben(1) et j'ai entendu le verrou de la porte d'entrée  tourner. Je ne me suis évidemment pas inquiétée, pensant que ma mère  rentrait plus tôt que prévu. Ce qui m'a titillé l'oreille a été la  manière dont la personne qui était entrée marchait. Un pas lisse,  rapide, et discret au possible. Aussitôt, une torsion m'a crampé les  tripes. Ove ? J'ai rapidement passé en revue les Oncles dans ma tête et  j'ai tiré la conclusion suivante : seul Ove avait des raisons de se  déplacer aussi silencieusement. Il ne m'est même pas venu à l'esprit que  Jin ou Raven marchent TOUJOURS comme ça. En essayant de coordonner mes  mouvements(2), j'ai rassemblé entre mes bras un maximum d'objets  contondants, du livre au cendrier en forme de pied, et me suis ruée  derrière le canapé. La porte s'est ouverte avec lenteur, sans grincer.  Mon cœur battait si fort qu'il allait sans nul doute faire exploser ma  poitrine.

Et là, un soupir a jailli :

- C'est bon, gamine, tu peux arrêter de te cacher.

Même s'il n'était pas entré dans la salle, j'aurais reconnu cette voix gutturale entre mille.

- Jin ! Oh, c'est toi !

Il devait y avoir beaucoup de soulagement dans ma gorge, parce que l'homme a émis un son qui ressemblait de loin à un rire.

- Tu attendais plutôt la visite de Ove, je me trompe ?

Je me suis à nouveau tendue.

- Il est dans les parages ?

- Oui.

Il a répondu simplement, sans fioritures.

- Tu vas rester jusqu'à ce que mes parents reviennent ?

Admettons que j'ai dû y mettre plus de supplication que je ne le voulais.

-  Je ne suis pas là pour te protéger de lui ; je l'ai déjà fait il y a  deux semaines. D'ailleurs, il m'en veut presque autant qu'à toi.

- Oui, sauf que toi, tu as des muscles. Tu as soif ?

- Un verre de bourbon serait le bienvenu. Ton père a une cave splendide.

Plus subtil, tu meurs. On ne dirait pas comme ça, mais Jin a des goûts raffinés.

- En fait, ma proposition était davantage axée sur de la limonade ou une verveine.

Il  savait que je me moquais de lui. Il a grogné et je suis partie lui  chercher un whisky. Heureusement qu'il ne vient pas tous les jours : mes  parents s'inquièteraient de voir les bouteilles du bar à alcool se  vider. J'ai posé le verre sur la table basse parce que, selon Jin, ça  porte malheur de passer un verre de main en main. Le Chinois a mis du  temps avant de le prendre, on aurait dit qu'il hésitait. J'ai vite  compris pourquoi.

Au moment où Jin s'est penché pour saisir le  verre (il y avait déjà un gros blanc depuis quelques minutes, mais ça,  avec l'Asiatique, c'est normal), j'ai remarqué une auréole sous son  aisselle droite. Non, pas un de ces larges cercles moites qui provoquent  aux adolescentes trop sensibles des hauts-le-cœur. Je n'ai pas eu une  seconde d'hésitation quand au liquide qui maculait le vêtement sombre.

L'homme  a empoigné le verre et s'est vite recalé dans le fauteuil. Il n'a pas  esquissé une seule grimace de souffrance, mais à la racine de ses  cheveux, je pouvais voir perler une sueur fiévreuse. J'ai laissé  échapper un :

- Oh, non, Jin ! Tu saignes !

Il m'a jeté un regard mi-figue, mi-raisin. Il n'a rien répondu du tout et a porté le verre à ses lèvres.

- Jin, je t'en prie, laisse-moi au moins jeter un coup d'œil.

- Cette fois-là, occupe-toi de tes affaires, gamine ! a-t-il rétorqué du ton le plus menaçant. Tu en as déjà assez fait.

- Ça m'inquiète, Jin ! Et pourquoi tu dis...

- Qu'est-ce que je viens de dire ?!

- Mais...

- Bi zue !

Du  moment que Jin se met à aligner plus de deux mots dans sa langue  maternelle, mieux vaut faire profil bas. Peut-être que je ne suis qu'une  poule mouillée, mais j'ai laissé filer. Si ça se trouve, il est blessé à  cause de ce que ma boulette, à Orléans ? Vous savez, quand je l'ai  suivi, avec P¤¤¤¤¤¤, et qu'il était avec un autre Chinois. Pendant que  je faisais semblant de lire Ne le dis à personne en me faisant des nœuds au cerveau, le vieux Jin restait sans rien dire.

- Ça ne te dérange pas si j'allume mon ordi ?

- Non, vas-y. Mais apporte-moi un autre whisky, avant.

- C'est trop dangereux, Jin, tu as perdu trop de sang pour pouvoir boire autant d'al...

- Fous-moi la paix ! s'est exclamé l'Asiatique. Fais ce que je te dis !

Jin  qui crie, ça vous dresse les cheveux sur la tête. Et aussi les poils de  bras, si vous en avez. J'ai obtempéré. Une demi-heure s'est écoulée.  J'ai écrit ces dernières lignes entretemps. Mes parents ne seront sans  doute pas de retour avant demain. Connaissant Jin, il sera parti avant.  Il ne me crée jamais d'embrouilles avec ma famille, lui. Ça me rappelle  la fois où

*

(1) Excellent, soit dit en passant, NdN.

(2) Je dis ça parce que je suis de ceux qui coordonnent difficilement leurs mouvements en cas d'alerte, NdN

*

Attention, ce qui suit est un savant mix de Ove et Jonah. Mais c'est l'auteur qui s'exprime...

Hé ! Bande de p'tits sapajous ! Vous croyez qu'ça m'fait rire de publier sans retours ?! Sans déconner, vous poussez un peu mémé dans les orties, là ! Si j'suis ici c'est pour l'Echange (winkwink pour ceux qui ont d'jà lu la suite) ! L'E-Change ! Bon sang de prout ! J'vais finir par m'vexer, hein ?! *

Allez, plein de bisous.

Sea

*L'auteur a actuellement des conditions de travail de merde absolue et elle a besoin de partager ça avant d'aller pleurer en cachette dans un coin du salon.

L'EscorteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant