Connexion #74

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Je n'ai pas joué aux Sims longtemps... Une demi-heure environ après avoir écrit les lignes ci-dessus, j'ai perçu un claquement sur le volet. J'ai su tout de suite que ce n'était ni Sawyer, ni Jo car ce n'était pas la même fenêtre que la veille. Avant d'ouvrir, j'ai donc pris la précaution de demander :

— Qui est là ?

— C'est moi, p'tite idiote ! Qui veux-tu qu'ce soit ?!

J'ai levé les yeux au ciel : il ne pouvait pas me laisser tranquille plus d'un mois, celui-là.

— Y'a des saloperies d'moustiques partout ici ! Ouvre !

— Attends, j'éteins la lumière pour qu'ils ne rentrent pas...

C'est vrai qu'au sud de la Loire, ces vicieux insectes pullulent. Ove a râlé lorsqu'il a appris qu'il devait attendre cinq secondes supplémentaires. Il était encore plus négligé que d'habitude : sa chemise comportait de larges déchirures, quelques taches, et son jean s'effilochait aux extrémités. Il dit toujours que « ça lui donne un genre ». Tu parles ! Ça lui donne un genre de clochard, oui !

— Punaise ! Ma parole, c'est pas des moustiques dans c'patelin ! C'est des vampires en chaleur !

Je suis allée lui chercher de la crème parce qu'il faut avouer que les démangeaisons qui suivent les piqûres sont très désagréables.

— Aaah, pour une fois qu'tu fais quelque chose de gentil pour moi ! Alors ! Tout va comme tu veux ?

— Plus depuis deux minutes. Qu'est-ce que tu es venu faire ici ?

— Bah rien, v'nir un peu te pourrir l'existence. J'suis un as pour ça, non ?

J'ai glissé un « ça, je confirme » entre mes dents lorsque je suis partie ranger la cortisone dans la pharmacie.

— J't'ai vu t'marrer avec tes p'tits cousins, là. Ils ont l'air de bien t'emmerder, hein ? Ils t'ont arrosée, c't'après-midi, dis-donc, t'étais trempée comme une soupe !

Il s'est allongé sur le canapé tandis que je reprenais place sur mon matelas.

— Tu nous as espionnés ?

— Je s'rais bien v'nu m'joindre à eux pour t'noyer, mais j'me suis laissé dire qu'tu l'aurais p'têt' mal pris...

— C'est ça. À qui tu crois faire avaler ça ? Comment va Jin, sinon ? Ça fait un bail que je n'ai pas eu de nouvelles...

— Me prends pas pour une gourde, Boyd m'a tout raconté. T'inquiète, le vieux sait rien du tout. Mais vous avez joué serré, ce coup-ci !

— Tu parles... On a surtout failli se faire attraper.

— Et quand j'pense qu't'as empêché Nuka et Boyd de r'garder une vidéo sans doute capitale pour leur enquête... J'étais dégoûté.

Cette vidéo me hante. Je n'ai pas envie qu'elle revienne sur le plateau. Je ne veux pas savoir qui est Jin. Histoire de changer de thème, j'ai demandé ce que Ove avait fait ces derniers jours.

— Comme si ça t'intéressait... a-t-il fait remarquer.

Il a cependant enrayé sur ce sujet. Sympa.

— Et bieeeen... je suis sorti avec Jo, Jin et Nuka ; j'ai dragué des nanas, y'en avait des pas mal ; j'ai bu de l'alcool ; j'ai fumé des choses qui te plairaient pas forcément ; j'ai dit plus de jurons que d'habitude et... ah oui : j'ai fait un casse avec Boyd.

Il m'énerve quand il se moque de moi.

Depuis qu'il était arrivé, j'avais mis un peu de musique en aléatoire sur l'ordi. Au moment où il avait conclu sur ses activités les plus récentes, la chanson dotA de Basshunter s'est mise en route.

— Oh ! me suis-je exclamée. Tiens, écoute, c'est du suédois.

J'ai haussé le volume. Il s'est levé et s'est assis à côté de moi pour mieux entendre. Il a froncé les sourcils. Lorsque la voix (?) du chanteur s'est élevée gracieusement dans les airs, telle l'envol du cygne, les yeux du Scandinave se sont exorbités :

— C'est quoi cette merde ? Qui c'est l'attardé qui chante ça ?!

— Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il dit ?

— Il répète deux phrases qui ne veulent quasiment rien dire tout au long du morceau. Ça parle d'un jeu vidéo, je crois... mais c'est d'une connerie abyssale ce truc ! s'est insurgé Ove. Et la mélodie vaut pas un rond. T'as pas ça dans ton lecteur mp3, j'espère ? C'est une honte. Une aberration musicale ! Pire que d'la musique classique ! N'écoute plus jamais ça, hein ? J'veux plus jamais qu'ça salisse tes jolies p'tites oreilles ! Quelle merde, mais quelle merde ! J'cautionne tout à fait les rappeurs qui disent que les femmes sont toutes des esclaves à baiser, mais ça, ÇA... ! Tssss.

Le « tssss », il l'a fait pour imiter Raven. D'habitude, c'est Boyd qui le fait, parce que Boyd déteste Raven.

Cette caricature m'a tout de suite fait oublier son sermon contre Basshunter et sa réflexion douteuse, mais sans doute ironique, sur les rappeurs. Elle a fait remonter en moi tout ce que Jo et Saw m'avaient dit. J'ai cru comprendre et, désappointée, me suis reculée.  

— Ah... ils t'ont délégué pour me convaincre de...

— ... de rien du tout. C'est juste Nuka qui m'a demandé d'te dire qu'l'opération de Raven aurait lieu le vingt-cinq. Il a d'fortes chances de perdre totalement la vue, mais il a tenu à tenter le coup. Il est plus courageux que c'que j'pensais, j'dois dire...  Si cette tentative foire, Nuka dit qu'il peut toujours tenter lui-même un truc, mais ça s'ra pas légal. Ni le fait qu'il se charge de Raven, ni l'opération en elle-même. À cause des produits, j'crois.

— J'espère qu'il va s'en sortir !

— Oh, t'inquiète. Il est solide, hein. Et puis... c'est pas comme si il allait y rester. Pas à la première opération, en tout cas. Il passe sur le billard pendant quelques heures et après, hop ! I's'réveille !

Il m'a frotté les cheveux version « dévissage de tête », mais le cœur n'y était plus. 

— Nuka m'a aussi dit que, si tu voulais, on pouvait s'réunir chez toi l'vingt-cinq, tu sais, dans la dépendance à côté d'ta maison. Comme ça on pourrait attendre les résultats tous ensemble. C'est Nuka qui nous téléphonerait. Y'aurait moins d'angoisse, tu penses pas ?

Ça, je ne m'y attendais pas. C'était vraiment gentil de leur part. Parce que qu'est-ce que vous croyez ? Mes Oncles sont tous grands, ils n'ont pas besoin qu'on leur tienne la main pour attendre des nouvelles – même accablantes – de l'un d'entre eux. Il s'agit d'un effort qu'ils font pour moi. Le Scandinave m'a invitée à lui répondre en me donnant une tape sur l'épaule :

— Alors ? C'est oui ? Tu nous la prépares, la soirée ?

J'ai reniflé et hochant la tête, ce qui l'a agacé :

— Rooooh ! Me dis pas qu'tu vas encore pleurer ?! Tu pleures tout l'temps, c'est pas possible, ça ! Tu vas m'passer c't'ordi et dormir, parc'que t'as des valises sous les mirettes, j'te raconte pas. On dirait Ravy, tiens ! Allez, couchée !

D'autorité, il s'est emparé de mon précieux appareil, m'a forcé à me glisser sous le drap s'est réinstallé dans le canapé. Je me suis endormie presque sur le champ, ce qui est rare.

*

Voilà ! Nom d'un petit bonhomme, ne vous laissez pas faire par Season ! Et n'hésitez pas à la bombarder de critiques sur toutes ses fictions !

Bonne semaine !

Kääntäjä Umhumushi

L'EscorteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant