XXXIII : Précieuse

770 73 24
                                    

Les dernières lueurs du jour balayaient les toits de Florence, répandant une douce lumière orangée sur les tuiles. Le ciel, bien que le soleil ait déjà disparu depuis longtemps, affichait une teinte rosée, rendant l'atmosphère irréelle.

Adria observait la ville, les pieds pendant dans le vide. Elle aimait particulièrement cet endroit, en haut de la tour du Palazzo Vecchio, où elle venait régulièrement s'isoler. Et ces derniers temps, elle en avait eu grandement besoin.

Les entraînements avec les autres Apprentis avaient été éprouvants. Kataï exigeait le meilleur d'elle-même, et bien qu'elle eut appris d'elle-même beaucoup de techniques de combat, elle se faisait battre à plate couture.

Pendant ces quatre mois d'entraînement, elle s'était cependant endurcie. Sa musculature s'était nettement développée et elle devenait de jour en jour plus rapide, plus forte. Elle avait réussi à égaler le niveau des meilleurs Apprentis, et à se mesurer, sans se faire humilier, à Kataï.

Pour Naldo, c'était infiniment plus difficile. Malgré les nombreux Sauts de la Foi qu'il avait effectué, il n'arrivait pas à se débarrasser de son vertige, ce qui l'entravait énormément lorsqu'ils devaient se déplacer sur les toits. Il avait fait néanmoins beaucoup de progrès en combat mais commettait encore de graves erreurs, qui lui auraient coûté la vie en situation réelle.

Adria tenta de sortir de ses pensées. Ses relations avec le jeune homme s'étaient nettement dégradées depuis leur entrée au sein de la Confrérie. Leurs disputes étaient fréquentes, mais ils finissaient toujours par se pardonner.

Enfin, Adria faisait en sorte qu'ils se pardonnent mutuellement. Elle s'en voulait tellement d'avoir embarqué le jeune homme dans ses galères qu'elle essayait le plus possible de le ménager.

Pourtant, il semblait plus que déterminé à devenir un Assassin à part entière, et surtout à venger ses parents, ainsi que son frère et sa soeur, en tuant les Templiers responsables de leur mort.

Soudain, elle entendit un bruit discret derrière elle. Elle se retourna vivement et aperçut Ezio, qui terminait l'ascension de la tour. L'Assassin vint s'installer lui aussi sur le bord du toit, sans un mot. Adria le salua humblement, d'un hochement de tête. Elle s'en serait bien passé, mais Ezio étant le Mentor Suprême de la Confrérie, elle se devait de ne pas lui manquer de respect.

Ils restèrent ainsi, silencieux, pendant quelques minutes, avant qu'Ezio engage enfin la conversation :

"Adria, je pense que tu es prête pour ta première mission. Tes progrès sont fulgurants, et, Kataï appuyant mes propos, je pense que tu es à même de mener à bien ta première action pour la Confrérie."

La jeune fille hocha la tête silencieusement. Elle avait tant redouté ce moment, mais il fallait bien qu'il arrive un jour ou l'autre. Elle ne prenait pas plaisir à tuer, elle n'avait jamais éprouvé une quelconque joie lorsqu'elle avait tranché la gorge de Templiers. Et pourtant, elle s'était engagée auprès des Assassins. De toute façon, avait-elle le choix ?

Elle aimait se persuader que oui, mais au fond d'elle, elle se résignait.

En effet, ce choix était l'unique possibilité pour elle de rester en vie. Continuer sa vie d'ermite n'aurait pas servi à grand chose, et elle se serait fait tuée à un moment ou à un autre. Quant au fait de rejoindre les Templiers, elle refusait catégoriquement.
Certes, ses parents avaient été à leur côté, mais elle ne supportait pas l'idée que les Borgia martyrisent ainsi la population. Alors, le seul choix possible avait été de rejoindre la Confrérie.

"Adria, renchérit Ezio, tu m'écoute ? J'ai l'impression que tu es distante ces temps-ci, quelque-chose ne va pas ? C'est au sujet de tes disputes avec Naldo ?"

À l'ouïe du nom de Naldo, la jeune Assassine se crispa et serra les dents, retenant une remarque acerbe en direction de son supérieur.

"Ezio, sache que, si je me suis engagée dans la Confrérie, ce n'est pas de mon plein gré. Primo, c'était pour protéger Naldo des Templiers. J'ai commis une grosse erreur en restant chez lui, et par ma faute ses parents ont été tués, je n'allais pas l'abandonner aux mains des Borgia. Secundo, j'ai comme l'impression que tout le monde cherche à me tuer ces derniers temps, et le fait que tes Assassins se soient mêlés de mes affaires à plusieurs reprises n'a pas arrangé les choses. Et enfin, tercio, rappelle-toi que tu as tout de même TUÉ mes parents. Alors ne pense pas que je me soit engagée dans la Confrérie uniquement pour tes beaux yeux !"

Ezio resta de marbre devant l'agressivité de la jeune fille. Adria se mura alors dans le silence, épiant la réaction du Mentor et espérant que celui-ci s'éloigne pour la laisser seule. Cependant, il ne le fit pas, restant immobile, à la même place, le regard fixé au loin.

Finalement, il se décida à briser le silence :

"Adria, je comprends ta colère. Parfois, je dois exécuter des choses qui ne me plaisent pas, pour le bien de la Confrérie ou de la ville entière. Mais sache que tu es infiniment précieuse à mes yeux, ainsi qu'aux yeux de la Confrérie. Tu vas jouer un rôle important dans le conflit qui déchire cette ville, mais ça, tu n'en as pas encore conscience."

Sur ces mots, il se releva souplement et s'éloigna du bord du toit sans se retourner. Avant de disparaitre, il ajouta :

"Tu es quelqu'un de précieux, Adria, et je ne peux me permettre de te perdre. C'est pour cela que je t'ai fais surveiller tout ce temps."

Arcanes | Assassin's CreedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant