XV : Souviens-toi que tu vas Mourir

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Les lettres noires avaient été tracées précipitamment et des gouttes d'encre parsemaient le papier comme des larmes de rage.
Memento mori.

Deux mots, une Maxime, qui signifiaient beaucoup. Deux mots, qui, pour une autre personne qu'Adria, auraient été une menace de mort imminente mais pour elle, ce message était loin d'être anodin, il prenait un sens tout autre et d'autant plus inquiétant.

Memento Mori.

C'était sa devise, son mode de vie, son credo. Cette phrase s'appliquait à elle autant qu'à ses ennemis. À elle, car elle n'oubliait jamais sa mortelle existence, elle savait qu'elle allait mourir un jour où l'autre, d'une manière ou d'une autre. Elle espérait seulement que ce serait le plus tard possible.

Et à ses ennemis, car toute personne osant se mettre sur son chemin, pour l'empêcher d'effectuer ce qu'elle voulait, risquait très gros. D'une simple démonstration de force, et jusqu'à la peine suprême pour certains qui osaient tuer des innocents.
Cependant, cette dernière peine était très rare, la jeune fille préférant laisser une chance de rachat à ces criminels, même si elle savait qu'ils ne le faisaient quasiment jamais.

En revanche, si elle les recroisait dans une même situation, elle n'hésitait que très peu, juste le temps de s'assurer qu'ils n'avaient pas changé, et mettait fin à leurs agissements, d'une manière ou d'une autre.

Adria se reprit rapidement, secouant la tête pour chasser ses funestes réflexions. Ses mains tremblaient et le papier s'échappa de ses doigts pour venir se déposer doucement sur le sol.
Sa devise, elle l'avait patiemment gravée sur ses deux poignards, en lettre dorée sur la lame. Elle n'avait jamais évoqué ce sujet avec Ezio, alors elle était maintenant pratiquement sûre que c'était lui qui avait volé son poignard.

Tous les éléments commençaient à se mettre en place dans l'esprit de la jeune fille. Ezio avait dû récupéré sa lame lorsqu'il l'avait bousculé, volontairement, avant qu'elle ne quitte le cabinet. Restait encore à savoir pourquoi la désarmer ainsi, si ce n'est que pour la rendre vulnérable contre un assassin.

Elle releva la tête lentement et aperçut à ce moment là un poignard gisant sur la table, un peu en retrait. Ce n'était pas le sien, elle en était sûre, elle l'aurait reconnu du premier coup d'œil, mais un autre.

Adria le saisit précautionneusement, la lame pouvait très bien avoir été empoisonnée. Elle récupéra une feuille d'une plante et l'entailla à l'aide de la lame. Puis, constatant après quelques minutes que la feuille ne réagissait pas anormalement, elle en conclut que la lame n'était pas traitée avec du poison.

Elle prit en main le poignard. Il était assez court, pas recourbé comme les siens mais droit, et surtout à double tranchant. Petite arme, parfaite pour s'introduire discrètement et assassiner en toute discrétion, mais néanmoins plus imposante que ses deux précédentes.

La jeune fille était perturbée. Ezio lui avait volé son arme pour lui en redonner une autre, avait enlevé les deux médecins et lui ordonnait de venir le lendemain à un rendez-vous, seule. Qu'est-ce que tout cela signifiait ?

Perturbée, elle décida de passer le reste de la nuit ici, pour patienter jusqu'au rendez-vous qu'Ezio lui avait imposé.

Elle alla s'installer sur le canapé, son arc sur les genoux et son nouveau coutelas en main, prêt à servir au besoin.

Adria essaya de se reposer, en fermant les yeux, mais les derniers événements repassaient sans cesse dans son esprit.

Et si elle s'était trompée sur Ezio ? Était-il vraiment un traitre ? Sinon, pourquoi lui aurait-il volé son poignard et laissé un autre à la place ?

Ces questions demeuraient pour l'instant sans réponse, se rajoutant à une longue liste qui patientaient pour obtenir une explication.

Après quelques dizaines de minute d'effort, elle réussit enfin à s'endormir.

**********

Quelques minutes seulement semblèrent s'être écoulées lorsqu'elle se réveilla en sursaut, sentant une main se poser sur son épaule.

Instinctivement, elle ramena son poignard vers elle pour se protéger, mais une main saisit son poignet pour la faire se lever.
Deux bras vinrent l'enlacer tendrement et elle réalisa soudain que c'était Loris qui la tenait contre son torse.

La jeune fille laissa tomber son bras le long de son corps, extrêmement surprise. Elle était tellement soulagée de le revoir que les mots se bousculaient dans sa tête, mais aucun n'arrivait jusqu'à ses lèvres.

"Je suis désolé Adria de t'avoir laissée sans nouvelles. Ester et moi avons dû se déplacer rapidement car un de nos amis a fait une sévère chute de cheval. Excuse nous, tu as dû te faire du sang d'encre."

Il semblait peu sûr de lui, comme si il ne lui disait pas la vérité, ou tout du moins pas l'entière vérité.

Faisant fis de cette réflexion, elle lui répondit précipitamment, racontant ses mésaventures et la disparition d'Ezio. Elle leur demanda alors si il les avait prévenus mais les deux médecins ne semblaient visiblement pas en savoir plus qu'elle. Elle remarqua cependant que les médecins semblaient nerveux, mais elle n'y prêta pas attention.

Elle avait du mal à s'exprimer et les larmes commençaient à perler aux coins de ses yeux. L'ascenseur émotionnel lui avait fait un effet boeuf.

Adria jeta un coup d'œil vers la fenêtre. Les premières lueurs de l'aube pointaient au-dessus des toits de Florence. Elle avait dû dormir quelques heures à peine.
Pourtant, elle se sentait revigorée à présent. Ses pensées n'étaient plus aussi noires. L'hypothèse qu'Ezio aie enlevé les deux médecins lui paraissait maintenant complètement stupide.

Cependant, plusieurs points restaient à éclaircir et elle comptait bien obtenir des réponses à ses questions dans la journée.

Elle sécha ses larmes d'un revers de la main et serra une nouvelle fois les deux médecins dans ses bras, soulagée de les savoir vivants et en sécurité.

Puis, elle prit un petit déjeuner rapide et léger, sachant qu'elle n'arriverait de toute façon pas à se rendormir après tous ces événements. Pendant ce temps, les médecins, eux, retournèrent dormir. Après cette nuit mouvementée, ils l'avaient bien mérité.

Adria, quant à elle, s'équipa de toutes ses armes et entreprit de gravir la façade du bâtiment, profitant de la semi-obscurité que lui procurait encore le lever du jour.

Elle s'installa une nouvelle fois sur le toit, face au soleil levant. Les rues étaient quasiment déserte, seul quelques badauds rentraient en pressant le pas, se retournant à intervalles régulier pour vérifier si personne ne les suivaient.

Elle avait l'impression de passer encore une fois une journée "normale", comme avant. Qu'elle allait rentrer et tenter par tous les moyens d'éviter Ezio dans la maison. Qu'elle irait se coucher après, sereinement.

Elle en avait l'impression, mais la jeune fille savait que cela n'arriverait jamais plus, que sa vie avait pris un tournant depuis l'agression dont elle avait fait l'objet et la disparition d'Ezio.

Pourtant, tout semblait si calme ...

Arcanes | Assassin's CreedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant