Je me retournai. Depuis que Djila avait disparu, et, à suite, toute la troupe de Yiu, le silence était plus que pesant. Nous avancions sans but réel. Nous étions tous choqué par ce que Djila avait fait pour nous. Sans hésitations, elle avait fui seule, gardant sur elle tous les dangers que représentaient Yiu et son équipe. C'est avec amertume que je repensais à elle. Elle n'avait jamais fait quoi que ce soit de méchant, elle ne méritais pas la mort. Pourtant, c'est dans ses bras qu'elle s'était jetée tout à l'heure. De toute façon, j'avais l'impression que ce monde hostile lui faisait péter les plombs. Mais je n'avais pas pensé que la séparation serait aussi dure. Je m'étais préparée à la séparation, ou du moins, j'avais essayé. Avec tout autant d'amertume, je repensais à la nuit où la tornade avait tout ravagé. J'avais cru qu'elle allait se suicider. Dans ma tête, je voyais déjà les images de son corps sans vie, mutilé, par différents types de tortures physiques capables de tuer quelqu'un. Mais finalement, elle était là lendemain. Oh, mais bien sûr, j'étais ravie de la revoir ce jour là. Ç'avait été de courte durée. Ce qui m'inquiétait le plus, c'était de ne pas savoir si elle était encore en vie, ou non. Si elle faisait encore partie de ce monde, si elle continuait de se battre pour la vie. Un grognement retentit à mes côtés. Mais je m'y étais habituée. A ce bruit de gorge étrange. Celui de Neck. Il faisait ça extrêmement souvent dans le désert. Il devait avoir cette espèce de morve dans la bouche. Au moins, lui, il ne crachai pas. Pas comme une certaine personne nommée Arru.
J'étais surprise de me retrouver là. Jamais je n'aurais imaginée avant que j'aurais pu me retrouver dans le désert, avec des gens que je connais à peine, en pensant que peut-être, Djila était morte. L'idée était affreuse. Imaginer que Djila, mon amie depuis le début de ce calvaire, était morte. Était... partie loin, loin où je ne pouvais la rejoindre. Thea s'exprima :
<< Je ne sais pas si vous ressentez la même chose, mais j'ai l'impression que l'air se rafraîchit. Nous arrivons peut-être vers un point d'eau ou à un endroit avec un peu d'humidité ?
- Ouais, je suis d'accord, répondit Arru.
Seuls Neck et moi restaient silencieux. Je ne pouvais rien dire, j'avais juste l'impression que Djila était loin, et cette sensation m'envahissait plus que tout, comme la mer étend son domaine sur les terres.
- Continuons, reprit Thea. Je veux que gardions l'optimisme. C'est essentiel. Vous comprenez ? demanda-t-elle en plongeant son regard dans le mien.
Je hochai la tête. Neck fit de même.Je recommençai à marcher, la chaleur faisant de ma tête un volcan. Arru s'approcha et me murmura :
<< L'autre commence à faire des trucs chelou. J'ai l'impression qu'il est pas net. >>
Je ne dis rien. d'un côté, je me disais qu'il n'avait pas complètement tort, mais en même temps, j'avais peur qu'il ne s'invente des choses, parce que ça crevait les yeux qu'il aimait ne serait-ce qu'un minimum Djila, et, ben... Neck et Djila, il s'était passé quelque chose entre eux. J'allais faire attention à Neck, mais sans être parano non plus. Comme avait dit Thea, il fallait être optimiste, mais c'était dur de ne pas soupçonner tout le monde, de ne pas devenir fou. Le désert, la perte de Nath, la disparition de Djila, ça ne faisait pas forcément un moral excellent.
Au bout d'un vingtaine de minutes à peu près, le désert laissa peu à peu place à des arbres, puis même à une forêt, ou une jungle je ne sais pas. Les arbres nous protégeait des rayons du soleil, ce qui n'était pas déplaisant. Au bout de quelques temps, Thea s'arrêta, et regarda ses pieds. Elle murmura :
<< De la boue... Il y a de l'eau pas loin ! Venez !!! >>
Elle se mit à courir vers l'endroit où la boue semblait de plus en plus diluée. Nous arrivâmes au plus beau spectacle que j'avais jamais vu. Une cascade se frayait un chemin au travers des arbres, formant une source d'un bleu limpide plus bas. Seul problème, la source d'eau, qui était également notre plus grande chance de survie, se trouvait peut-être à une ou deux dizaines de mètres. Il n'y avait aucun moyen de descendre, à part évidemment de faire un détour immense, ou de sauter comme des suicidaires. Mais la possibilité de mourir ne sembla frapper plus que ça Thea. Cette dernière délaissa sa veste sur le sol, avant de se rapprocher dangereusement du gouffre. Puis elle sauta. Comme ça, sans réfléchir. Et je compris. Il ne fallait pas réfléchir, juste profiter. Dès qu'elle fut dans le vide, elle se mit à hurler de joie. Profiter. Sentir le vent sur notre corps sans se demander si la mort nous attendais en bas. Je pris de l'élan et fit de même. la sensation était indescriptible. J'avais l'impression de voler, l'impression que rien ne pouvait m'arriver. Je ne me souciais plus de Yiu et de sa clique, ni de Djila. Je vivais l'instant présent et je profitais. Quand l'eau me frappa, une vague de douleur m'envahit, mais elle fut presque immédiatement remplacée par une sensation de bien-être parfaite. L'eau n'était pas glacée, bien qu'elle soit froide, ce qui était très agréable. Thea était en train de rire un peu plus loin. Je nageai vers elle. Cela faisait si longtemps que je n'avais senti autant d'eau sur moi en même temps. Thea s'écria :
<< Oh putain !! C'est tellement parfait. Il faut juste profiter et pas se soucier du reste !!!
Un petit silence.
- Bon ils foutent quoi les autres là ? LES ENFANTS, ON EST PAS MORTES !!! REJOIGNEZ-NOUS !!! >>Il y eut de nouveau un silence puis un des gars sauta. de loin, je n'arrivai pas à voir de qu'il s'agissait. Un cri de terreur retentit, vite suivi par des éclats de rire. Arru arriva à côté de moi, tandis que je n'arrivais pas à reprendre mon souffle. Mon rire s'élevait dans ce lieu, en duo avec celui de Thea, plus cristallin. Arru me regarda, les yeux rageurs. Il me balança de l'eau dans la figure. Je riais de plus belle, mais cette fois lui aussi. Puis Djila me revint en mémoire. Une larme coula sur ma joue. Je baissai les yeux. Grâce à l'eau environnante, mes larmes étaient discrètes. Je l'imaginais en train de courir, blessée à différents endroits, pleurant de ne trouver refuge nulle part, avec à sa poursuite Yiu, sans relâche. Je déglutis et écartai cette pensée de mon esprit. Quand je la reverrais, je lui devrais la vie. Et je ne compte pas oublier cette dette que j'ai envers elle. Elle nous a tous sauvé la vie, en devenant une seule et unique cible pour le monstre qu'était Yiu. Une seule cible, c'est tellement plus facile à attraper que plusieurs, ne courant pas forcément à la même vitesse. Djila. Depuis toujours elle avait un tempérament fort, bien que ce soit la personne la plus adorable que je connaisse. Si elle entendait ce genre de pensées, elle m'étriperais, mais c'est ce que je pense. Elle était capable de mettre sa vie en péril, si par ailleurs elle pouvait sauvé quelqu'un en retour. Je ne suis pas sûre que, dans le cas échéant, j'en aurais eu le courage. La voix d'Arru m'arracha à ma rêverie.
<< Il est où ? Neck ? Pourquoi il ne saute pas ? Pourquoi il reste juste devant le gouffre ?
Un mouvement de feuillages plus loin devant attira mon regard. Je reconnus immédiatement la paire de chaussure qui apparut quelques secondes dans mon champs de vision. Je lui répondis.
- Il attend pas. Il est parti.
- Où ? demanda-t-il.
Une idée me titillait l'esprit. Mais il fallait que ce ne soit pas ça. Il fallait que je me trompe.
- Je n'en suis pas sûre. >>
Pas avec Yiu. Je vous en prie.
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Ruines
Fiksi IlmiahDans un monde détruit par le réchauffement climatique, une petite communauté de personne subsiste. Mais un cyclone va changer la vie d'une des filles de ce groupe...