Abysse | n.jin

08.

L'après-midi touchait à sa fin, mais il faisait encore suffisamment jour.

Seokjin s'était remit de sa frayeur de la veille. Il savait qu'il n'avait pas halluciné, il était sûr et certain de ce que ses yeux avaient vus. Son subconscient également, n'avait pas manqué de lui rappeler ce qu'il avait vécu en le montrant dans ses rêves aussi dérangeants que fascinants.

Ça ne faisait aucun doute. Cette chose existait bel et bien. Et elle semblait intriguée par le Seokjin autant que ce dernier l'était envers elle. Contre toute attente, le châtain était d'ailleurs étrangement motivé. Il était déterminé à en savoir plus sur cet homme du lac, car il ne semblait pas réellement lui vouloir du mal. Du moins, il l'espérait. Certes, Seokjin avait vécu quelques petites frayeurs par sa faute, mais il n'avait sûrement pas fait exprès. Ce n'était pas voulu, il en était quasi certain. Car s'il avait forme humaine, ça signifiait qu'ils pouvaient communiquer.

Et Seokjin voulait savoir qui il était.

Assis sur son lit, l'adolescent regardait la fenêtre ouverte dont les rideaux s'agitaient à cause du vent qui s'engouffrait. Son regard ne parvenait pas à discerner quoi que ce soit du dehors depuis là, mais il s'imaginait sans peine le jardin brumeux, le son des vagues sur les galets, le calme de la fin d'après-midi.

Dehors, il savait que le lac abritait quelque chose. Et cette chose attendait sûrement sa venue, guettant toute opportunité de se glisser hors de l'eau pour fouler la terre ferme.

Seokjin avait l'étrange impression qu'il était à sa recherche, qu'il le suivait. Ce qui s'était passé hier n'était qu'une preuve des plus tangibles Il se leva pour se diriger vers la fenêtre et s'y adossa. Il se pencha vers l'extérieur alors que la brise fraîche soufflait sur son visage pensif.

Dehors, la brume cachait le trésor qu'était le lac aux yeux des imprudents, comme s'il s'agissait d'un avertissement, d'une barrière pour empêcher les hommes d'aller plus loin, ou pour les empêcher de voir ce qu'il abritait en ses profondeurs. La journée n'était pas terminée, le temps semblait s'écouler au ralenti, comme s'il attendait qu'un événement se produise avant d'enfin pouvoir laisser la nuit envahir ce monde.

Seokjin observa ce paysage commun sans réellement le voir. Ses yeux tentaient vainement de transpercer la couche blanche. Il voulait revoir cet homme étrange sorti des tréfonds du lac, mais il ne savait pas comment. Y aller de nuit, comme les fois précédentes, ne lui paraissait pas être une bonne solution. Du moins, elle était loin d'être la meilleure. Son oncle risquait de le voir sortir s'il multipliait encore les sorties, et s'il se rendait compte de ses escapades nocturnes, Seokjin n'était pas certain que cela lui plairait. Il en informerait probablement sa mère. Il n'avait pas spécialement envie d'expliquer les raisons de ses sorties à sa famille ou à qui que ce soit d'autre.

Seokjin se pinça les lèvres, préoccupé. Il ne lui restait qu'une seule alternative; s'y rendre de jour. Son oncle n'y verrait sûrement aucun inconvénient, et c'était aussi plus sûr pour lui, plus rassurant, car il voyait bien mieux dans la clarté du soleil que dans la nuit sans lune. Et puis, comme ça, il verrait plus clairement cet inconnu et il pourrait ainsi se convaincre définitivement de son existence. Il pourrait éclairer le peu de doute et les questions qui noircissaient le tableau.

À quoi bon s'éterniser. Seokjin irait maintenant. Il lui restait encore un peu de temps avant qu'il ne fasse nuit et que ça soit l'heure du repas. Il abandonna son poste près de la fenêtre, son lit, ses livres, sa chambre simple et fade. Seokjin attrapa un pull, l'enfila à la hâte, sortit de la pièce et dévala les escaliers en s'élançant vers la porte d'entrée d'un pas rapide et assuré. Avant que sa main n'atteigne la poignée, la voix de son oncle venant de la cuisine l'interrompit.