13.

1.2K 191 47
                                    



Seokjin referma la porte derrière eux avec tant de prudence que le simple déclic de la serrure lui sembla trop bruyant.

Un peu nerveux, il se tourna vers Namjoon. L'autre se tenait si près qu'il semblait pouvoir le saisir dans ses bras pour l'étouffer. Mais l'homme du lac restait droit et immobile, bien calme. Il le regardait avec la même expression, les mêmes yeux; dans la pénombre du couloir, la ligne de sa mâchoire paraissait aiguisée, sa peau plus pâle.

Seokjin baissa les yeux pour se concentrer sur le long couloir qu'ils allaient devoir traverser. Les murs semblaient s'allonger à l'infini, comme une illusion d'optique, mais l'adolescent savait que ce n'était que son imagination trop fertile. Lorsqu'il battit des paupières, l'impression disparu. Il connaissait ses murs, ce couloir. Il connaissait le chemin, et il savait qu'il ne devrait pas faire ce qu'il était sur le point d'accomplir.

Son esprit semblait se tordre sous le stress. Son cœur se mit à battre plus vite, plus fort lorsqu'il fit le premier pas sur le carrelage froid. Il jeta un coup d'œil en arrière pour faire signe à Namjoon de le suivre mais surtout, d'être très silencieux. S'ils se faisaient voir, eh bien il n'osait pas imaginer la suite. Il posa donc son index sur sa bouche et la créature sembla comprendre le geste. Elle le suivit de près, si bien qu'en avançant à pas feutrés, Seokjin sentait sa présence dans son dos, sa main glaciale effleurer parfois son avant-bras. Il ne faisait pas un bruit. Il était devenue son ombre. Une ombre qui le fascinait autant qu'il la craignait.

Plus ils approchaient du bas des escaliers et occasionnellement de la porte qui menait à la cuisine, d'où les bavardages des invités émanaient, et plus Seokjin devenait nerveux. Il était certain que son cœur faisait trop de bruit dans sa poitrine. Namjoon pouvait sans doute les entendre, lui aussi, tant ils paraissaient bruyants. L'idée lui semblait curieusement attirante, bien que très bizarre.

Seokjin posa une main sur la rambarde, puis se faufila sur la première marche aussi discrètement qu'une petite souris. Il n'osa pas se pencher pour vérifier s'il y avait quelqu'un à travers l'encadrement de la porte entrouverte; à la place, il fixa Namjoon et lui tendit sa paume libre en signe d'invitation pressée. Il ne désirait qu'une chose; monter au plus vite.

L'homme du lac saisit sa prise tiède et, l'air perdu, suivit Seokjin. Ce dernier l'emmena en haut des escaliers. Ils montèrent les dernières marches à la hâte, si près du but qu'ils se fichaient de savoir si leurs pas désynchronisés furent entendus. Quelques secondes plus tard, Seokjin refermait la porte de sa propre chambre et tournait la clé dans la serrure de peur d'être dérangé. Il était en sécurité à présent, enfermé entre quatre murs avec quelqu'un d'autre, quelque chose d'autre.

Seokjin alla refermer la fenêtre en frissonnant, rassuré de ne pas s'être fait attraper. Lorsqu'il se retourna, Namjoon se tenait toujours près de la porte, le visage placide. Il semblait curieux, peut-être un peu perdu également, voire même troublé. Seokjin ne parvint pas réellement à interpréter le pli de ses lèvres ternes, ni même ses épaules si légèrement voûtées. Il observait le papier peint vieillot.

Et maintenant, que faire ? Il avait le sentiment qu'il venait de commettre un acte interdit en emmenant Namjoon ici, dans cette chambre close où régnait une ambiance froide et une odeur de vieux meubles. Mais cette impression s'accompagnait d'un léger frisson d'excitation. C'était justement parce que ça lui semblait interdit qu'il voulait tant le faire. Seokjin se racla doucement la gorge. Il n'osait pas faire trop de bruit, bien qu'il était certain qu'en bas, les autres ne pouvaient pas les entendre. Il avait beaucoup de questions à poser à Namjoon, mais il n'osa pas l'assumer avec ça. Alors il se contenta d'être poli.

Abysse  | n.jinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant