Après l'arrivée de Nemo, tout est allé très vite.
Les jours, les semaines, sont passés et le mois d'août touchait déjà à sa fin. Thalia rentrera à Paris dans quelques jours, Nemo fera la même chose, mais en Bretagne, et Spouik était devenu un gros tas.
Ce qui signifiait que la fin de sa vie de cochon approchait bien trop vite à mon goût. Ce n'était pas pour tout de suite, mais je n'étais pas préparé à cette triste réalité. Avec Thalia et Nemo (qui sont devenus les meilleurs amis du monde dès qu'ils se sont vus) nous avons préparé un plan d'attaque.
J'ai dû batailler avec mes parents. Et ce ne fut pas une tâche aisée. Si j'ai réussi à convaincre mon père (qui trouva Spouik très charmant) ma mère était catégorique: c'était non.
- On ne va pas accueillir un cochon dans notre jardin Å! Que vont dire les gens ?
- On s'en fout des gens. Et puis vu l'endroit où l'on vit, ça ne devrait pas les déranger.
- On a pas de place.
- Si, à côté de la cabane à outils. Loin de toi. J'ai calculé l'espace nécessaire pour qu'il ne soit pas oppressé. On a largement la place.
- Tu vas acheter la nourriture ? Et son abri ? Et les barrières?
- Avec Nemo, Thalia et Monsieur Masson, on va tout construire. On a déjà le matériel. Et pour la nourriture, il mange de tout. C'est un cochon.
- N'implique pas les autres dans tes idées stupides. Un cochon ça pue.
- Oui mais lui il est propre.
Finalement j'ai gagné.
Nous sommes allés au Puy-En-Velay une semaine avant le départ de Thalia et Nemo. La rouquine avait besoin d'acheter ses fournitures scolaires, et le poisson d'un berceau. Comme je n'avais besoin de rien, j'ai dû accompagner mon meilleur ami à Ikea parce que "tu me seras utile pour la traduction. On sait jamais avec ces trucs."
Au bout de trois quarts d'heure, j'en ai eu assez. Cet homme parle beaucoup trop. Contrairement à d'autres, je savais qu'il ne le prendrait jamais mal. Il sait qu'il est chiant.
Comme nous devions nous réunir à seize heures, j'avais très largement le temps. J'ai voulu appeler Thalia pour la rejoindre, mais elle m'a rappelé qu'elle était une jeune femme indépendante qui pouvait se débrouiller seule. J'ai accepté cette triste réalité, et je me suis rendu à une librairie pas trop loin. Parce que je n'avais pas envie d'être loin d'elle en cas de problème. On savait jamais ce qui pouvait se passer. Après tout, elle restait un bébé.
Alors que je fouillais distraitement entre les rayons, une voix féminine m'interpella:
- Monsieur? Je peux vous aider ?
En me retournant, je vis une très mignonne jeune femme (peut-être de mon âge) avec de jolies formes, de longs cheveux qui lui tombaient en des boucles très serrés en dessous de la poitrine. Ses yeux verts étaient sertis de lunettes rondes et noires. Sur ses jambes, qui ne correspondaient pas vraiment aux critères de beauté de notre temps (mais qui restaient très jolies), je pouvais voir un tatouage qui me disais vaguement quelque chose. Mes yeux remontèrent sur son visage, et je me fis la réflexion que je connaissais réellement cette personne. Sans pouvoir mettre un nom sur son visage. Elle me le confirma :
- Å? C'est toi?
- Oui. Mais qui es tu ? Je te connais mais je n'arrive pas à me souvenir de ton nom excuse moi.
Je me suis senti mal à l'aise, jusqu'à ce qu'elle me dise en souriant :
- C'est normal. J'ai beaucoup changé depuis le lycée. Tu te souviens d'une certaine Annabelle ?
J'ai réfléchi. Puis j'ai trouvé. Alors j'ai crié:
- Nana? La petite brune timide qui a une tortue marine tatouée sur le mollet ? C'est toi ?
- Ouaip.
- OH. C'est dingue de te voir ici. Ça va ?
Elle avait rit. C'était un des sons les plus agréable que j'avais entendu depuis longtemps. J'avais toujours bien aimé cette fille, même si je n'avais discuté que rarement avec elle. Néanmoins, chacune de nos conversations s'était révélée intéressante et enrichissante.
- Ça va depuis le temps. Et toi ?
- Super, génial, tout est super dans ma vie. Ça te dit qu'on aille prendre un verre un de ces quatre ?
Oula Å, mon ami, tu t'emballes! Elle va croire que tu veux tremper ton biscuit dans son verre de lait. Alors que non.
Ses yeux verts s'agrandirent sous ses lunettes, et elle me répondit en bafouillant légèrement:
- Hum... Oui. Pourquoi pas, ça peut être sympa.
Yes.
- Super. Donne moi ton numéro, que je puisse te contacter.
- Bien sûr.
Annabelle sortit un calepin et un stylo de je ne sais où, et elle inscrivit son numéro sur un papier qu'elle me donna ensuite. Elle s'excusa de ne pas pouvoir rester plus longtemps avec moi, car elle devait retourner travailler. Son patron n'aimait pas les tirs aux flancs. Je lui ai répondu que je la comprenais tout à fait et je suis parti.
En sortant de la librairie j'avais un grand sourire aux lèvres. Cela faisait longtemps que je n'avais pas eu le numéro d'une fille. Je pouvais dès à présent repartir en chasse.
Å
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Le Carnet de Å [EN PAUSE]
General FictionAu départ, je voulais appeler ce Carnet "Journal de Bord de Å". Mais c'était trop long et un peu chiant. Å c'est moi. Jeune homme de vingt-sept ans aux cheveux roses, et également chômeur professionnel. Auvergnat d'adoption, mon confident est un co...