Astrå et Thalia menaient un débat enflammé sur la psychologie des tueurs de romans policiers, et pendant ce temps, je faisais figure de plante verte.
Vraiment, je n'y croyais pas. Ma demie-sœur et l'une de mes amies venaient d'avoir un coup de foudre juste devant moi. Ce n'était pas possible.
Bien sûr, je n'ai absolument rien contre les personnes homosexuelles. Qui suis-je pour donner mon avis ? Ce n'était pas le fait qu'elles soient du même genre qui me perturbait, mais le fait que ce soit ma sœur et mon amie.
J'étais perplexe.
Ne voulant pas passer pour quelqu'un de gênant, je me suis éloigné dans les rayons. Enfin, non soyons honnête. Je me suis caché dans un rayon non loin, entre le guide du clitoris et celui de l'impuissance. Tout en surveillant les filles du coin de l'œil, j'ai tapé en vitesse un SMS à Annabelle.
De Å à Nana - 14h12
Au secours !!! J'ai présenté Thalia à ma sœur et je crois qu'elles ont eu le coup de foudre !!!
De Nana à Å - 14h13
Et alors ? C'est grave ?
De Å à Nana - 14h13
Oui ! Enfin, non. Enfin, tu comprends ce que je veux dire ! La situation est délicate.
De Nana à Å - 14h15
Oui, mais si ce n'est pas grave, alors il n'y a pas de lieu de s'énerver.
D'habitude, les paroles d'Annabelle n'étaient que sagesse. Mais là, elle m'agaçait juste.
- Tu fais quoi ?
J'ai sursauté et pris un livre au hasard en feignant d'être le plus naturel possible. Astrå se tenait devant moi un air interrogateur collé au visage.
- Et bien, je regarde, comme tu peux le constater.
Elle a baissé les yeux vers le livre que je tenais entre les mains. Elle a affiché un air à la fois amusé et consterné. Me demandant pourquoi, j'ai aussi regardé le livre. Le fameux bouquin sur l'impuissance, super. Je me suis senti obligé de me justifier :
- J'ai feuilleté par curiosité. Je n'ai aucun problème.
- Ça me regarde pas.
- Non mais vraiment. J'insiste sur ce point.
La brune leva les mains en signe d'innocence et s'en alla à reculons. Je restais là, les bras ballants avec ce foutu livre à la main. Me rendant compte que j'avais l'air d'un idiot, je l'ai reposé à toute vitesse. Un rapide coup d'œil entre les rayonnages m'appris qu'Astrå était retournée aux côtés de la rouquine. Visiblement, on n'avait plus besoin de moi ici.
Je me suis approché pour dire aux filles que je m'en allais. Elles m'ont lancé un bref "okay" sans même me regarder. J'ai passé la porte de la librairie en la faisant bien claquer derrière moi.
J'étais super vexé.
Comme j'étais vraiment très vexé et en colère contre tout le monde, je suis rentré chez moi à toute vitesse, sans passer par chez Annabelle pour prendre mes affaires. J'irai un autre jour. De toute façon, elle finira bien par m'appeler.
En me garant dans la cour chez mes parents, j'en ai profité pour faire un tour à la boite aux lettres. Nous ne pensions jamais à relever le courrier, alors c'était plutôt un exploit. Cela devait faire longtemps que personne n'avait pris la peine de le faire, puisqu'une grosse pile nous attendait.
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Le Carnet de Å [EN PAUSE]
General FictionAu départ, je voulais appeler ce Carnet "Journal de Bord de Å". Mais c'était trop long et un peu chiant. Å c'est moi. Jeune homme de vingt-sept ans aux cheveux roses, et également chômeur professionnel. Auvergnat d'adoption, mon confident est un co...