Chapitre 16 : Alcool et larmes

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Média : via tumblr → Alice (Astrid Bergès-Frisbey)
Musique de fond : Starlight, Muse
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Le vacarme que fit la sonnette en retentissant me réveilla en sursaut. Je m'étais assoupie sur le canapé, et un mal de crâne terrible me martelait le cerveau. Je mis plusieurs dizaines de secondes à réaliser que je devais aller accueillir un visiteur.

Je me levai en vacillant et allai ouvrir la porte d'un pas peu assuré. Sam se tenait dans l'embrasure. Il fallait bien sûr que ce soit lui qui débarque pour me voir totalement défoncée. L'envie de lui claquer la porte au nez me tenta, mais une petite voix me susurra que je n'étais déjà pas capable de tenir debout, alors balancer une porte dans la tête d'un gars baraqué était sans doute bien au-delà de mes forces.

Je trouvai malgré tout la force de murmurer d'une voix endormie :
« Qu'est-ce que tu fous ici ? »

Je me demandai l'espace d'une seconde si je ne venais pas d'être aussi aimable avec Sam que lui la fois où j'étais allée lui donner des papiers de la part de Noah.

« Oh putain », je soufflai dans le vide en me maudissant d'avoir pensé à mon connard de meilleur ami.

Soudain tremblante, je m'accrochai au chambranle de la porte dans un simulacre de maintien.

Sam passa une main devant mes yeux que je peinais à garder ouverts.
« Alice ? Alice ! »

Sa voix grave résonnait en moi. J'avais l'impression qu'un marteau tapait à répétition sur ma boîte crânienne. Je chancelai et me dirigeai vers le canapé en abandonnant Sam à la porte, restée ouverte.

J'entendis le son de sa démarche ferme s'approcher, puis je sentis son parfum alors qu'il se penchait sur moi.

« Alice ? »

Je fus surprise de l'inquiétude que je perçus dans son ton habituellement moqueur ou méprisant. Les yeux toujours fermés pour tenter d'oublier la réalité, je marmonnai avec difficulté :

« Va t'en.
- Qu'est-ce que t'as fait, Alice ?
- J'ai bu. Je pense que c'est assez évident », je lançai d'une voix sarcastique.

Je pensai avec horreur que ma mère ne se remettrait sans doute jamais de me voir dans cet état-là, parce qu'un simple mal de tête ne pouvait pas me retenir au lit plus qu'une matinée. Elle avait beau être gentille, elle n'était pas naïve.

Sam soupira, sans doute en voyant l'ampleur des dégâts, puis déclara :
« En effet... »

Le silence se prolongea face à la triste réalité que nous refusions tous les deux de commenter plus. Je sentis Sam prendre une inspiration.

« Noah s'excuse.
- Ah, parce qu'en plus tu viens le défendre ? »

La colère prit le dessus sur l'effet soporifique qu'avait l'alcool sur moi, et elle me rendit même lucide, quoiqu'agressive. J'ouvris les yeux et je me redressai vivement.

« Tu te rends compte de ce que tu viens de me dire ? Il s'excuse ?! Mais je me fiche de ses excuses ! Tu peux aller lui dire. Et s'il n'a pas assez de courage pour s'excuser en face, qu'il ne le fasse pas du tout. »

Je me retins fortement de dire un autre mot que courage, mais encore une fois, j'aimais trop Noah pour parler de lui en ces termes. Et ça me déchirait. Sam plongea ses yeux dans les miens, le regard empli de pitié, et je n'avais qu'une envie, c'était de le gifler pour qu'il arrête de me regarder comme ça.

Je ne voulais pas qu'on me prenne en pitié.
Je voulais juste qu'on me dise que tout cela n'était qu'une vaste blague, et que Noah vienne me dire que jamais, jamais il n'aurait pu me faire ça, et qu'il fallait que je sois moins crédule, parce que ça me jouerait des tours. Je voulais que Noah rigole à l'idée que j'aie pu le croire, qu'il m'affirme que je devais me faire soigner, parce que ma santé mentale avait un sérieux problème si je commençais à croire toutes les conneries qu'il débitait tous les jours.

Mais je savais qu'il ne me le dirait pas, tout simplement parce que la sincérité dont il avait fait preuve quand il me l'avait annoncé ne pouvait être remise en question.

« Calme-toi, Alice.
- Je suis calme, martelai-je avec une voix vibrante de rage qui démentait mes propos.
- Arrête de me mentir. »

Je baissai les yeux et sans que je m'y attende, un larme brûlante dévala ma joue droite. Soudain, Sam approcha sa main de mon visage, et son pouce vint effleurer la courbe de mes lèvres. Je relevai la tête et l'un de ses doigts vint arrêter la course de la goutte qui suivait son bonhomme de chemin dans l'encolure de mon cou.

« Et arrête de pleurer, ajouta Sam dans un murmure.
- Tu ne penses pas déjà que je viens de perdre le peu qu'il me restait de dignité en laissant échapper cette larme ? Il faut en plus que tu me rappelles que je suis ridicule ?
- C'est pas ça. J'aime juste pas te voir pleurer.
- Tu voudrais que je saute de joie de partout à l'idée que Noah sorte avec le garçon que j'aime ? »

Sam me regarda d'un air surpris et curieusement courroucé. Ce fut à mon tour de lui jeter un coup d'œil étonné.

« Tu ne savais pas ?
- Non. Il m'a juste supplié de venir l'excuser à sa place. »

Une grimace de mépris me déforma le visage et je crachai :
« Donc il t'envoie faire le sale boulot, et ce, probablement pendant qu'il texte Vic. »

Un long silence passa pendant lequel Sam m'observa avec un regard inexpressif.

« Pars, je finis par dire. Laisse-moi tranquille. S'il te plaît. »

Sam se détourna de moi et avança jusqu'à la porte, où il marqua un temps d'arrêt, sans pour autant se retourner.

« N'oublie pas qu'il t'aime. Quoi qu'il ait fait. Et nous, on est là si t'as besoin de nous. »

Il reprit plus bas :
« Et moi, je suis là, si tu as besoin de moi. »

Je le vis vaguement déposer quelque chose sur le meuble à côté de la porte d'entrée, puis mes yeux se fermèrent, éreintés d'avoir dû rester ouverts le temps de la conversation que j'avais eue avec Sam. La porte claqua doucement et je me sentis partir, avec une affreuse envie de vomir qui resurgissait.

ALICE ET CE SALOPARD DE CUPIDONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant