Chapitre 24 : Entorse, yoga et salive

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Média : via tumblr → Charlie qui souffre (Ezra Miller)
Musique de fond : I love you, Avril Lavigne
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Pour une fille qui passait sa vie à lire des romans d'amour, j'étais décidément hyper mauvaise (même carrément incompétente pour rester objective) dans le domaine de l'amour.

Comment dire... premièrement, j'avais embrassé un seul type de toute mon existence avant Sam, et c'était à une soirée dans un action-vérité (oui, on a fait plus romantique — m'enfin je ne me plains pas, le gars en question était mon crush du moment). Deuxièmement, ma seule relation datait de la cinquième. Ma vie amoureuse avait depuis ce moment-là commencé à fortement ressembler au désert Sahélien.

Ce vide intersidéral peut être expliqué — je suppose — par le fait que j'étais d'une timidité maladive quand il s'agissait d'aborder la question de mes sentiments (« Quoi ? Lui dire que je l'aime ? Mais pourquoi ? Y'a aucune chance que ce soit réciproque, de toute façon, Jeannette. »), et puis parce que j'avais beau être déjà tombée plusieurs fois amoureuse, je croyais à l'Amour avec un grand A et que je voulais attendre l'homme parfait. Qui n'existe pas, qu'on soit bien d'accord. Quoique... Sam s'en approchait pas mal.

En tout état de cause, je n'étais pas très à l'aise avec les démonstrations affectives en public. Vous pouvez prendre en compte dans ma peur du regard des autres l'angoisse suprême que ma chère mère apprenne l'existence d'une quelconque relation. J'avais beau aimer de tout mon cœur ma génitrice, je ne pouvais tout simplement pas lui parler de ça. Pourquoi, me direz-vous ? Aucune idée.

Je ne savais même pas si Sam et moi étions en couple. Suffit-il d'aimer une personne et que ce soit réciproque pour cela ? Est-ce même obligatoire de s'étiqueter le statut "en couple" ?

Ouah. L'amour, ça prend la tête.

Après deux minutes de réflexion, je me dis que ça n'avait pas grande importance, et vous savez quoi ? J'allai au Lycée pratiquement en sautillant tellement j'étais légère, ce jour-là. Peut-être que l'amour donne réellement des ailes.

***

Devant les grandes grilles du Lycée, je vis Sam et Noah, assis sur leur place habituelle qu'était le muret de l'entrée. Un coup de panique me prit brusquement. Comment allai-je bien pouvoir saluer Sam ? Surtout devant Noah !

Je m'avançai à reculons vers eux et je répondis timidement au sourire que m'adressait Noah. Sam cligna des paupières plusieurs fois, lentement, et je vis son regard se fixer sur moi, sans qu'une seule expression ne vienne s'étaler sur son visage si friand de sourires goguenards.

Lorsque ma dernière enjambée me plaça à quelques dizaines de centimètres seulement de Noah, je me penchai pour lui faire la bise. Décidant d'adopter la même technique de salut avec Sam (tout cela était digne d'une stratégie militaire), je commençai à me pencher vers lui, mais sa main vint emprisonner mon menton à la hauteur de son visage.

Enfin, il souriait.

Je louchai pour garder un semblant de vue sur sa tête, ayant sans doute l'air ridicule, mais j'abandonnai lorsque des larmes commencèrent à me monter aux yeux. Je fermai les paupières et Sam murmura, propageant l'odeur mentholée de son chewing-gum jusqu'à mes narines.

«Je crois qu'il faut que je te prouve quelque chose. Puisque tu ne me crois pas.»

Et il m'embrassa. Tout comme la veille, un feu fit de mon corps une étuve, et d'un coup je me fichais de savoir si Jean-Claude, Jacqueline et Paul-Mahmoud pouvaient nous voir.

ALICE ET CE SALOPARD DE CUPIDONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant