Chapitre 1 : Monsieur Parfait

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Média : via tumblr
Musique de fond : What the hell, Avril Lavigne
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      Je crispai les mâchoires et lançai un regard assassin à mon voisin de table alors qu'il s'installait. Il y avait trente places dans la salle, dont la moitié pour l'instant inoccupées, et il avait dû se mettre à côté de moi, évidemment. Je m'appliquai à regarder devant moi, les narines frémissantes d'une rage que je peinais à retenir. Je sortis mes affaires et les posai sans délicatesse sur la table, attirant l'attention de mon charmant camarade. J'aimais faire dans la douceur. Du coin de l'oeil, j'aperçus sa bouche s'étirer en un sourire amusé.

      Je tirai la chaise avec vigueur et m'assis sans un mot. J'entendais presque ma conscience se moquer de mon attitude puérile. Dans la précipitation de mon départ, j'avais laissé tomber mon téléphone et l'écran s'était fissuré de part et d'autre (ce genre de mauvais plans ne peut arriver que le jour de la rentrée, de toute évidence) ; devoir en plus m'asseoir à côté d'un emmerdeur de première en cours de littérature anglaise en plus m'énervait au plus haut point.

      Bon. Il fallait bien le lui reconnaître, le pauvre enfant ne m'avait absolument rien fait, et le juger de par son apparence de fuckboy était totalement ridicule. Un débat intérieur me forçant finalement à me détendre, je soupirai longuement.

      Le garçon lança, les yeux rieurs :

«T'es toujours aussi antipathique ou c'est mon corps de mannequin qui t'impressionne ? »

      Les sourcils haussés, je pris quelques secondes pour le regarder plus attentivement avant de lui répondre. Son visage me semblait vaguement familier, mais je n'avais aucune idée d'où. Il avait des traits assez durs, des lèvres pleines et des yeux en noisette. L'une des premières choses que l'on remarquait en le regardant étaient ses yeux, justement. Leur couleur vert d'eau et les pupilles cerclées d'un jaune dont certains filaments se mêlaient au vert en formant comme un soleil les rendaient impressionnants. Ses cheveux blonds étaient retenus dans un chignon lâche qui lui conférait un charme certain.

« Je pencherais plus pour la première option », répliquai-je avec un sourire faux.

      Je réalisais que je me comportais comme une vieille aigrie de quatre-vingt ans (ou une gamine boudeuse de sept ans, comme vous voulez), mais j'étais contrariée de ne pas être seule. Légèrement asociale sur les bords, en effet. Je m'étais dirigée vers le premier rang, tout à gauche, puisque tout le monde sait que le premier rang, c'est pour les intellos, et que personne ne veut y aller. Il y avait moins de trente élèves dans ce cours, donc j'avais potentiellement la chance d'éviter de côtoyer de si près un humain pendant une heure et demie par semaine.

      Si je voulais être seule — ça n'avait aucun lien avec le blond, qui n'était pas désagréable à regarder et semblait plutôt sympathique — c'était parce que je ne voulais pas gagner le statut de rédactrice en chef des devoirs d'anglais des autres, comme ç'avait été le cas bien trop longtemps. Je n'avais plus envie d'être la fille trop gentille dont tout le monde profitait.

      Mais ce garçon, dont je ne connaissais même pas le nom, venait, en s'asseyant à mes côtés, de contrecarrer mes plans. Il avait quand même l'air d'un sacré cas, affalé sur son coin de table comme il l'était. C'était limite s'il ne ronflait pas déjà. Je me dis que de toute façon, personne, et surtout pas lui, ne me tirerait un devoir cette année. L'avantage, c'est que je ne connaissais pratiquement personne dans cette classe, ou seulement de vue, et donc ils n'avaient pas pris la fâcheuse habitude de tout me demander.

ALICE ET CE SALOPARD DE CUPIDONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant