La derniere fois

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La journée a été rude. J’ai appelé la clinique. Katie m’a expliqué qu’il avait laissé une lettre pour moi.

Je n’ai pas le courage d’aller la chercher. Il me faudra du temps avant de la lire. Ça m’a fait quelque chose de revoir Adam  aussi. Il avait l’air tellement triste.

Je ne sais plus où j’en suis. Je fume plus que de raison. Je n’arrive plus à écrire. Il faut que je sorte de là. Il faut que je retarde mon départ pour aller à l’enterrement. il faut que je sorte.

Maintenant.

J’enfile un pull, prends mon sac et mes cigarettes. L’air frais me revigore. Je prends ma respiration comme si je n’avais plus d’air à l’intérieur. Je déambule sans point précis. Je repense à plein de choses, à nos discussions avec Fabian, nos fous rires pendant les réunions de groupe, nos confidences. Les larmes me montent. Je m’allume une cigarette pour me donner de la contenance.

Adam  m’envoie un message.

« Notre relation difficile ne nous empêche pas d’être toujours amis, si tu as besoin de moi, je suis là »

Ca me va droit au cœur.

« puisque tu m’en parles, oui, je me sens pas très bien. J’aimerais qu’on aille prendre un café ensemble »

« je suis resté à San Diego, rendez-vous au starbuck »

« je suis à côté, j’y suis dans cinq minutes. Merci »

C’est inespéré pour lui. Il est content qu’elle ait accepté de le voir. Tout à l’heure, c’était très rapide et puis dans un mauvais contexte.

Je marche à vive allure comme si j’avais peur qu’il s’en aille. Je passe devant une librairie, je ne fais pas gaffe sur le moment mais une grande affiche orne la vitrine. Je percute. Je fais marche arrière.

« Adam Lawson et Diane Warwick, plus que des amis ?». Je feuillette, photos à l’appui. je les vois enlacé dans la rue. Ça me fait mal. Il m’avait pourtant dit que je me faisais des idées. Et tout cas, ce que je vois là, me rend encore plus triste. Comment a t-il pu me mentir ?

- hey ma p’tite dame, on est pas à la bibliothèque ici !

Je me tourne.

- Euh…. Oui excusez- moi, je l’achète

Le starbuck.

Quand il me voit entrer, il se lève. Il me sourit. J’ai du mal à cacher mon désarroi. Il s’approche de moi, et m’embrasse sur la joue. Je m’assois.

- Qu’est ce que tu prends ?
- Un café chantilly

Il fait signe à la serveuse.

- Tu te sens comment ?
- Anéantie…

Je ne le regarde pas. Je ne veux pas faiblir devant lui. Je veux la vérité.

- Aly, je sais que tu as pris ta décision mais en attendant tu pourrais revenir à la maison, tu te sentirais moins seule.
- Je ne crois pas que ce soit une bonne idée
- Ok
- Sinon tu fais quoi en ce moment ?
- Rien de spécial, j’essaie de me remettre…
- De te remettre ?
- Oui, de ta décision, puisque c’est toi qui l’ as prise seule
- Adam…
- J’ai pas compris, Aly, je ne comprends toujours pas d’ailleurs

Je bous à l’intérieur. J’ai envie de lui sortir le magazine et de lui jeter à la figure mais je me retiens.

- J’ai pas envie de vivre le reste de ma vie en ne sachant pas où tu es et avec qui ?
- Mais pourquoi tu veux que ça se passe comme ça ?
- Adam, tu es à longueur de temps sur les routes et moi dans tout ça je deviens quoi ?
- Tu sais très bien que j’aurais pu faire des efforts mais tu ne m’as même pas laissé le choix.
- Les efforts tu les aurais fait un temps mais ensuite….

Il reste silencieux.

- Je pourrais tout arrêter si tu me le demandais
- Jamais je ne te demanderais une chose pareille !
- Laisse nous une dernière chance

Ca y est. Il a lancé la phrase.

- Une dernière chance pour quoi Adam ?

- Pour nous, pour qu’on soit heureux. Moi je ne vis plus sans toi, tu me manques.
- Tu es sur de ça ?
- Pourquoi tu doutes tout le temps comme ça ?
- Parce que tu es exposé, tu as des tentations

Il boit une goutte de son café et me regarde interrogateur.

- Je ne t’ai jamais trompé, si c’est ce que tu insinues
- Oui je sais ton frère m’a dit ça aussi au téléphone l’autre soir
- Mon frère t’a appelé ?
- Oui, il m’a incendié mais j’ai trouvé ça mignon qu’il prenne ta défense
- Aly, j’ai l’impression que tu ne me dis pas tout. J’ai fait quelque chose qui t’a déplu ?
- Tu vois Adam, moi je t’ai caché des trucs horribles mais c’était pour que notre couple n’en pâtisse pas. J’ai toujours voulu nous préserver mais toi…..
- Quoi moi ? Il s’énerve

Je lève mes yeux vers lui. Il est tendu. Je fouille mon sac et sort le magazine que je jette sur la table. Il comprend de suite.

- Aly…. C’est n’importe quoi ce torchon et tu le sais très bien !
- Tais toi, Adam, j’ai pas besoin que tu argumentes, tu fais ce que tu veux de ta vie maintenant.
- Y’a rien eu entre nous, je ne t’aurais jamais fait ça
- Tu sais, je peux tout accepter de toi, mais ne me ment pas, s’il te plait ait au moins ce respect pour moi.
- Je te jure que c’est n’importe quoi !

Il s’agite. Des gens se retournent sur nous.

- Je me suis vue comme une princesse dans ce milieu, je me suis vue arriver comme dans les contes de fée et puis je suis tombée bien bas. Je te comprends tu sais, je ne te rendais pas la moitié de ce que tu me donnais.
- Je suis plus quoi te dire….. tu ne me laisses pas m’expliquer
- Adam, il n’y a rien à expliquer… quand je la vois, je me dis que tu as fait le bon choix. C’est ton univers cette fille, pas moi.
- Tu dis n’importe quoi ! Tu cherches des excuses à notre rupture mais tu sais très bien que je n’ai rien fait !
- Les images parlent d’elles mêmes, Adam dis-je d’un calme olympien
- Je ne te reconnais plus

Cette phrase me tue. J’ai l’impression de revenir au moment de mon overdose quand il me regardait avec des yeux suspicieux, qu’il n’avait plus confiance en moi.

- Bon je crois qu’on a plus rien à se dire, je vais y aller.

J’essaie de faire bonne figure, et me lève tranquillement. Il pose sa main sur la mienne et me dit :

- Aly, je sais que tu m’aimes encore, ne pars pas

Je retire ma main, une boule dans ma gorge se forme. Mes yeux s’embuent. Je détourne la tête.

- Au revoir Adam, je te souhaite tout le bonheur que tu mérites

Je sors vite du café et marche à grands pas. Il me court après et m’attrape par le bras. Je me retrouve nez à nez avec lui. Il me serre fort contre son corps. J’éclate en sanglots.

- Aly… dit-il dans un souffle
- Va t’en Adam, va t’en

Il me garde encore un instant contre lui comme si il voulait imprimer l’odeur de mon corps sur le sien. Je me détache et pars aussitôt.

Lui reste transi, au milieu de la rue. Il me regarde disparaître. Il sait que c’est la dernière fois qu’il me voit.

Une autre vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant