Tome 2 Chap 11

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Lorsque papa nous a abandonnées maman et moi, pendant un certain temps je me suis enfermée dans une bulle, une bulle remplie de haine et de colère. J’en voulais à la terre entière, j’étais persuadée de ne faire que du bien autour de moi, pourtant le mal ne voulait pas cesser de me tourmenter jusqu'à que je finisse par perdre pieds et ne plus distinguer le bien du mal. Mes notes chutaient librement, mon niveau de sociabilisation devenait presque inexistant, ma vie ne ressemblait plus à rien et par-dessus tout je me sentais coupable, coupable de ne pas avoir su retenir papa auprès de ma maman. Cette dernière, pendant une longue période, m'a laissée errer selon mon humeur, pensant que j'avais besoin de temps pour me retrouver, pour digérer et me reprendre en main. Elle n'avait pas tout à fait tort, mais le temps passait et aucune amélioration en vue. Comprenant que les choses n'allaient pas en s'arrangeant, elle a décidé de reprendre la situation en main et de me raisonner de la meilleure des façons : en me parlant tout simplement.

Maman m'a toujours dit d'avancer au gré du vent sans avoir de doute ni de regret, de ne jamais regarder en arrière pour ne pas me prendre les murs venant d’en face que je ne verrais pas. «  Ma fille, il faut laisser le passé là où il est et regarder en avant même si la vie est difficile car il n’y a que comme ça que tu pourras avancer. »  Ses paroles ont trotté dans ma tête pendant des journées et des nuits entières, et peu à peu, j’ai rangé ma colère, ma culpabilité et mes peurs au placard pour reprendre goût à la vie. Je suis consciente qu’ils vivent toujours en moi, enfouis profondément quelque part, comme des monstres prêts à attaquer. Je ne peux ni les voir, ni les sentir mais ce dont je suis capable est les contenir car s’ils se réveillent à nouveau, je crains qu’ils deviennent incontrôlables......

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Cette nuit-là, je l'ai passé dans mon lit, je n'ai pas trouvé le sommeil et je n'en avais pas envie donc inutile de rejoindre Liam. Lorsqu’il m’a trouvée dans la salle de bain, accroupie au sol, en panique et en pleurs, je lui ai fait croire à une nouvelle crise sans lui expliquer les détails que je ne comprenais pas moi-même. Il m’a rassurée, comme d’habitude, et nous avons rejoint le salon. Il a mis un film dont je n’ai rien vu tant j’avais l’esprit embrouillé et torturé. Au bout d’une heure, j’ai prétexté un mal de tête et je suis partie me coucher, j’avais besoin d’être seule. Il m’a regardé d’un œil suspect, comme s’il sentait que quelque chose n’allait pas mais il s’est contenté de hocher la tête et de me souhaiter bonne nuit.
Cela fait au moins quatre heures maintenant que je tourne dans mon lit, ressassant des bribes de souvenirs réels, fictifs je ne sais même plus. J’ai l’impression que ma tête va exploser avec toutes ces questions qui refusent de me laisser tranquille, comme si elles ne me libéreraient que lorsqu’elles auront eu leur réponse. Ahhh bon sang pourquoi je ne me souviens pas tout simplement ?! Le docteur Stewart m’a expliqué que je recouvrerais la mémoire lorsque je me sentirais prête, ben là c'est le moment, je me sens prête. Allez, rappelle-toi Alie, réfléchis....réfléchis...

Les heures défilent en vain et lorsque je m’apprête à laisser tomber, une idée inattendue surgit dans mon esprit. Ma première pensée se tourne vers Liam sans savoir pourquoi. En fait, une petite voix me murmure que je ne dois pas le faire, que ça ne lui plaira pas du tout mais tant pis… Je fais taire cet avertissement, il s’agit de la seule solution et après tout, si mon plan fonctionne, Liam sera bien content de retrouver celle qu’il aime…

Encore cette musique qui flotte dans l’air d’un son à peine audible. Elle résonne dans ma tête, telle une litanie me suppliant de me souvenir, de comprendre. Je me trouve dans le noir complet mais je n’ai pas peur, bien au contraire. Je sens l’adrénaline et l’euphorie couler dans mes veines, je me tourne à la recherche de quelqu’un, d’un indice sur le lieu dans lequel je me trouve mais rien…à part ce son lointain. Je ferme les paupières et tente de vider mon esprit, de ne pas chercher à comprendre mais plutôt de me laisser aller. Il me semble que la musique se fait de plus en plus forte, je la ressens dans tout mon corps et mes jambes suivent lentement le rythme. Je sens quelqu’un s’approcher derrière moi, mon cœur se met à battre la chamade tellement fort que cela en devient presque douloureux. Je dois avouer que cela me plaît cette sensation de frissons, familière  mains pour le moins singulière. Un souffle chaud enflamme ma nuque et me fait frémir de plaisir tandis que je sens une main se poser sensuellement sur mon ventre et une autre dans ma chevelure. Un corps se rapproche dangereusement de mon dos jusqu’à le coller et un sourire timide envahit mon visage. Je ne comprends pas ce qu’il m’arrive, ce n’est pas mon genre de me frotter ainsi à quelqu’un mais l’émotion qui s’empare de moi est tellement forte qu’elle balaie toutes mes hontes et mes retenues. Je me laisse aller contre le corps de mon partenaire que je sens musclé et commence à me déhancher en parfaite osmose avec lui sur cette musique aux origines latines Sa main posée sur mon ventre remonte lentement le long de mon corps, parvient jusqu’à mes épaules et me retourne subitement. J’ouvre enfin les yeux et découvre mon partenaire....Liam. Il a beau faire très sombre, j’arriverais à discerner ses traits parmi mille autres visages dans la nuit. Son regard me trouble, tellement intense et sensuel que j'ai l'impression que le sol menace de se dérober sous mes pieds à chaque instant. A ce moment-là, quelque chose de doux caresse mes épaules dénudées puis la sensation se poursuit le long de mes bras. En levant les yeux, j'aperçois une fine lumière émanant du ciel dont j'ignore la source. Ce que je parviens à discerner ressemble à des flocons de neiges tombant du ciel. Je m’empare de celui qui vient de se poser sur le bout de mon nez et découvre qu’il s‘agit finalement d’un pétale de rose blanc. Il en pleut de plus en plus, je ferme les yeux et tends les bras pour profiter pleinement de la douce sensation que leur caresse me procure. Puis, subitement, plus rien : la musique a cessé, les pétales de roses de tombent plus, l’ambiance se fait morne et le froid a envahi la pièce si bien que je me frotte les bras pour tenter de me réchauffer un peu. J’ouvre alors les yeux, lève la tête et découvre une paire d’yeux énormes incrustés dans le ciel. Je me pétrifie sur place, terrifiée par ce regard qui me tétanise. Je voudrais fuir mais j’en suis incapable, c’est alors qu’en baissant la tête, je surprends des ronces s’entrelacer autour de mes chevilles. La sensation des épines lacérant ma chair à nue est atroce, je tente de me débattre mais mon corps refuse d’obtempérer, j’ai beau hurler mais aucun son ne parvient à sortir de ma bouche. Une coulée chaude glisse  jusqu'au sol et je comprends qu’il s’agit de mon sang. Des larmes de douleur se mettent à rouler le long de mes joues, et j’implore Liam, qui s’éloigne peu à peu, pour qu’il réagisse, qu'il cesse cette torture. Soudainement, à peine deux secondes plus tard, je me retrouve à nouveau libre, Liam a disparu et l’horrible regard s’est dissipé. Je jette un coup d’œil à mes chevilles, les ronces se sont retirées en ne laissant aucune trace, ni aucune cicatrice ou goutte de sang. Je me retrouve seule dans l’obscurité comme au début mais cette fois-ci, la panique et l’angoisse ont remplacé l’adrénaline et l’euphorie. Je cherche Liam partout du regard, pour qu’il revienne, pour qu’il me rassure mais il reste introuvable. Soudain, un coup de feu retentit et un élancement s’empare de moi, dans mon dos à l'endroit où se trouve ma cicatrice. Je m'effondre au sol, n'arrivant plus à tenir sur mes jambes ni même à bouger. La douleur que je ressens est atroce, insupportable et de plus en plus intense. Mon cœur bat tellement fort qu’il menace de me lâcher, je ne parviens pas à respirer, j’halète du mieux que je peux pour aspirer de l’oxygène tandis que je sens du liquide m’inonder le dos. Tous mes sens sont en alerte et j’entends des pas lourds se rapprocher lentement de moi, j’ai envie de hurler tant je souffre mais n’y parviens pas. La mort serait sans doute plus apaisante, d’ailleurs mon corps se refroidit peu à peu et mes pupilles tentent de se fermer bien que je lutte pour les en empêcher. Les pas ont cessé, et je discerne des boots pleines de boues, juste à côté de mon visage. Dans un effort qui requiert le peu de force qu’il me reste, je lève lentement la tête, mon regard remonte tant bien que mal et je distingue des chaussettes qui me rappellent quelque chose, son tibia, son genou puis tombe sur une petite lueur orangée. Il s’agit d’une cigarette, l’individu dans la pénombre la porte à sa bouche et s'accroupit d'un coup vers moi en m'envoyant la fumée sur le visage. Impossible de voir son visage mais d’un ton menaçant, il déclare :

ALIE Tome 1 Et 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant