Chapitre 16

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   Quand j'ouvris les yeux, ils mirent du temps à s'adapter à la lumière blanchâtre du soleil matinal. L'état de sérénité dans lequel je me trouvais me donnait l'impression de flotter au dessus du monde, de cette vie qui n'avait jamais pu m'appartenir totalement. Il dormait paisiblement à quelques centimètres de mon corps, son souffle apaisé rythmant le mien. Revenant soudain à la réalité, je secouai le plus doucement possible le bras de la moitié.
"Harry, Harry...
-Hmm..."
Il bougea à peine, il semblait si heureux. J'hésitai à faire abstraction des cours pour rester ici avec lui, si seulement mon avenir ne dépendait pas que de mes notes...
"Harry, on doit aller en classe, réveille toi...".
Il passa ses mains dans ses cheveux, marmonna quelques paroles inintelligibles, puis se redressa enfin. Nous prîmes le peu d'affaires que nous avions emmenées lors de notre escapade nocturne, puis nous dûmes faire preuve d'une grande prudence pour ne pas se faire repérer dans cette partie de l'école aussi éloignée de nos dortoirs.
Une fois notre petit déjeuner pris, nous nous dirigions vers les cachots quand un préfet de Serpentard m'interpella pour m'informer que le professeur Dumbledore souhaitait me voir. Immédiatement. Voyant mon regard inquiet, Harry insista pour m'accompagner.
La porte cernée d'un phénix d'or, aussi impressionnante qu'à son habitude, était déjà ouverte. Précipitamment, nous montâmes les escaliers quatre à quatre, anxieux. Au centre du bureau se tenait notre directeur, droit et l'air bienveillant, et à sa droite...ma mère, Narcissa Malefoy. L'effet de surprise me gagna instantanément.
"Ma...Maman? Mais qu'...qu'est-ce que tu fais ici?"
Dumbledore la devança:
"Drago, il vaudrait mieux que vous disiez au revoir à Monsieur Potter dès maintenant.
-Dire au revoir, mais pourquoi?"
Cette fois, ce fut ma mère qui me répondit:
"Drago, écoute moi. C'est pour ton bien. Tu dois rentrer au manoir. Des hommes de ton père ont entendu des rumeurs sur...Harry et toi. Tu sais comment sont les garçons de ta maison. Je t'en prie, ne fais pas d'histoires et viens avec moi, tes affaires sont déjà prêtes."
Avant même que je n'ai eu le temps de dire quoi que ce soit, les larmes brouillèrent ma vue. Mon coeur se déchirait: je ne pouvais pas survivre sans lui. C'était une évidence.
"Maman, ne m'y oblige pas. Tu n'as pas le droit de me forcer. Laisse moi rester ici avec Harry, je t'expliquerai."
Derrière moi, il sanglotai également, la haine avait envahi ses beaux yeux verts, pour la première fois depuis notre rencontre. Je me retournai, tremblant. Il m'étreignit avec désespoir, accentuant le mien. J'allais l'embrasser quand soudain, je sentis la main glacée de ma mère saisir mon épaule et m'arracher à mon âme soeur. Nous transplanions. Ils avaient tout prévu. J'eus tout juste le temps d'apercevoir son regard avide de vengeance, puis tout devint noir.
                                                                       ⭐️⭐️
  Le trajet dura une seconde, deux tout au plus, mais il me sembla qu'une éternité s'était écoulée entre le moment où j'avais quitté le bureau de Dumbledore et celui où je me retrouvai dans le salon austère de Malefoy Mannor. Du feu crépitait dans la cheminée noir vernis. À ma droite, ma mère avait délicatement pris ma main, que je dégageai dès que j'eus pris conscience de son geste. Maman, Maman. Elle qui avait toujours pris mon parti, elle qui avait osé me soutenir et m'encourager à prendre une autre voie que celle de mon père. Le dégoût qu'elle m'inspirait désormais était indescriptible. Je me sentais trahi. Elle tenta d'entamer la conversation:
"Mon chéri, je suis désolée...
-Je ne veux ni de ta pitié, ni de ta fausse compassion. Tu m'as enlevé du seul endroit où j'ai été heureux, et tu voudrais que l'on vive une existence de rêve comme s'il restait un semblant de vérité entre toi et moi? Arrête. Ne me regarde pas comme si j'étais ingrat, tu me répugnes, Maman. J'en ai fini avec toi. Laisse moi maintenant."
Choqué par mes propres paroles, je me hâtai de monter les marches jusqu'à ma chambre avant de faire marche arrière et de m'excuser. Ma valise était posée en bas de mon bureau, le reste n'avait pas bougé d'un fil. L'ensemble était sombre, je n'ouvrais les volets que rarement. Je poussai un soupir de désespoir, m'assis sur le rebord de mon lit, le regard plongé dans le vide. C'était ça le problème. Mon esprit me faisait l'effet d'un trou noir, insensible à chaque émotion qui aurait du me submerger. Ma seule source de motivation résidait dans mon désir de retrouver celui ou ceux qui m'avaient balancé auprès des hommes de mon père, et de leur rendre la monnaie de leur pièce.
Le soir venu, je ne descendis pas dîner. J'avais passé pratiquement toute ma journée à ruminer mes sombres pensées, et à élaborer des plans plus ou moins vicieux. J'avais toujours rejeté les mauvaises intentions, mais toucher à ma relation avec Harry me semblait être le pire des crimes. J'avais conscience que mes pulsions presque meurtrières allaient me faire défaut. Mais on m'avait éloigné de mon unique raison de vivre. Ce soir-là, je commençai à comprendre que l'on se rendait compte de ce que l'on a, uniquement lorsque l'on le perd.

 

Toi contre moi- DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant