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Mercredi 17 Février 2010

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Mercredi 17 Février 2010

Je vais mal.
Je vais super mal putain.
C'est le moment d'écrire.

Ça fait un mois. J'arrive pas à m'y faire. J'ai tellement mal que parfois, j'en suffoque, j'ai l'impression qu'un poids me compresse la poitrine et martèle mon cœur de milliers de petites lames, je me sens déchirée. J'ai passé mes vacances à rester allongée dans le noir, sans rien faire, sans bouger, jusqu'à essayer d'arrêter de penser.
Ma mère est venue me faire la réflexion ce matin. Enfin, ce matin à quatorze heures. Elle est entrée dans ma chambre, elle a ouvert les volets en grand, et elle m'a balancé : « t'es encore couchée à cette heure-ci, mais qu'est-ce que tu fous ? » Mais laisse-moi tranquille, maman, j'ai juste envie de mourir.

J'arrive plus à rien, j'arrive plus à avancer. J'ai l'impression que je vais me noyer dans un torrent de larmes alors que j'arrive pas à pleurer. Je crois que la douleur est si forte que y a plus rien qui sort. C'est comme si j'avais cessé de fonctionner. Constamment, j'éprouve une sensation d'étouffement, comme si quelque chose me maintenait au sol, m'empêcher de décoller, comme si mon esprit était rempli de fumée noire.

Alors je reste là, allongée sans rien faire, hormis compter les heures.
Et je dors.
Je dors dès que je peux, tout le temps, je dors pour fuir la réalité.

Et je rêve de Loyd.

Et l'impact de la chute est presque insurmontable.

Il y a cette fraction de seconde, tu sais, juste avant le réveil, où l'on n'a pas encore conscience de la réalité, une partie de notre esprit étant encore dans notre rêve. Cette fraction de seconde est la plus magnifique. Pendant un instant, juste pendant un instant, j'ai oublié que Loyd m'a quittée, j'ai oublié qu'il n'est plus là, j'ai oublié que nous ne sommes plus ensemble et j'ai oublié à quel point j'en souffre.

Et puis, je me souviens.

Juste après cette fraction de seconde, je me prends la réalité en pleine face, une grande claque violente qui m'arrache une bonne partie du visage. À force, je finirai défigurée. Et pourtant je recommence à chaque fois. Dormir, rêver, prendre un coup de la réalité, et se rendormir, rêver à nouveau... Si je pouvais m'enfermer dans mes rêves, tomber dans le coma... Perdre la mémoire pour oublier Loyd, pour effacer tout ce que je ressens pour lui, recommencer comme au premier jour, et surtout ne jamais, jamais retomber amoureuse de lui.

Je crois que j'en serais incapable.
Certaines choses sont incontrôlables, l'amour doit en faire partie. La tristesse aussi, visiblement.

Ce n'est même pas de la tristesse en fait, c'est... Plus fort que ça.
Je me sens pas triste ; je me sens morte de l'intérieur.

J'ai affreusement mal, et j'ai l'impression que personne n'est là.

J'ai passé deux semaines à voir son visage tous les jours, à le croiser dans les couloirs de ce foutu lycée qui est bien trop petit pour espérer éviter quelqu'un, j'ai même hésité à faire l'école buissonnière.

J'ai besoin de quitter la maison, j'ai besoin de sortir parce que j'y étouffe, mais il est où mon refuge maintenant ?
Aller au lycée avant, ça me réjouissait parce que j'y voyais Loyd.
Maintenant, j'y vais à reculons parce que je sais que je vais le voir...

J'essaye de faire bonne figure, mais je sais pas vraiment si j'y arrive.
Et là, les vacances sont bientôt finies, et je vais devoir me préparer à affronter ça à nouveau.

Est-ce que je peux crever maintenant ou est-ce que j'attends quelques jours ?

Quand je dors pas, je passe ma vie à écouter la chanson de Rihana, aussi, Russian Roulette je crois.
Oui, c'est ça.

J'écoute les paroles, je comprends ce que je peux comprendre, et j'ai surtout l'impression qu'elle calque son rythme sur les battements de mon cœur (à moins que ce ne soit l'inverse).

Bonsoir,
je me sens
vide.

Il est vingt-et-une heures cinquante-deux, ça fait deux heures que j'ai arrêté d'écrire histoire d'aller dormir.
Pour changer.
Ça fait un peu moins d'une heure que je suis réveillée.

J'écoutais encore la chanson tout à l'heure quand il est venu me parler.

À quel moment, mais à quel moment de ma vie j'ai décidé de me connecter sur MSN, moi ?

Oui Jordanne, avoue que dans le fond t'espérais lui parler.
Et pourtant...

Il est venu, il m'a dit « salut, comment ça va ? », alors j'ai répondu :
« Parce que ça t'intéresse ? »
« Évidemment. », qu'il a affirmé. « Sinon je te poserai même pas la question. »
« Pourtant j'ai pas vraiment l'impression que t'en aies réellement quelque chose à faire, de savoir comment je vais. »
Après un instant sans réponse, il a dit :
« Qu'est-ce qu'il t'arrive, Jordanne ? »
Oh, bah écoute...

Il m'arrive que j'ai envie de crever, que j'ai mal à m'en saigner depuis que t'es parti, que j'arrive plus à surmonter le temps qui passe sans être à tes côtés, que chaque journée qui m'éloigne de toi, de nous, est de plus en plus difficile ; mais sinon ça va, tranquille, t'inquiète pas la santé tout ça c'est nickel.
(Enfin quoique, je suis même pas sûre...)
Voilà ce qu'il m'arrive, et encore, je pourrais en dire tellement plus, écrire un bouquin entier sur ce que je ressens, d'ailleurs c'est peut-être même ce que je vais faire.

« Rien. Il m'arrive rien. », j'ai dit. « J'ai juste l'impression que tout le monde s'en fout, que je suis pas importante. »
« C'est faux. », a répondu Loyd. « T'es importante aux yeux de plein de gens, et aux miens aussi. »
« Ah oui, c'est pour ça que tu m'as larguée. », j'ai lâché spontanément.
« Ça n'a rien à voir, Jordanne, ça ne signifie pas pour autant que je ne tiens pas à toi... Et puis je te l'ai dit, avec ou sans moi, tu ne seras que de plus en plus heureuse. »
« Oui, oui, je te crois. », j'ai fait sans conviction.

J'étais soulée. Clairement.

« T'as pas l'air convaincue, pourtant », qu'il m'a dit.
« Non, pas du tout effectivement. En fait, j'en ai plutôt mare de tes beaux discours et de tes phrases à la con pour être honnête, je veux juste que tu me foutes la paix. »
La réponse ne s'est pas fait attendre :
« Je peux savoir pourquoi t'es agressive comme ça ? »
« Je suis pas agressive. », j'ai simplement dit.
Le petit encart "Loyd est en train d'écrire" était encore affiché quand j'ai déconnecté. J'avais pas envie de savoir ce qu'il avait à dire.

Wow, voilà, ça y est, je suis de nouveau mal. J'ai l'impression que c'est pire quand j'essaye de lui parler, c'est frustrant, c'est comme s'approcher d'un trésor et ne pas pouvoir y toucher, pas la moindre parcelle... C'est mourir de soif et avoir une étendue de flotte devant soi, mais être incapable de toucher le rivage.

Je me sens détruite, j'ai envie de pleurer.. Mais au moins, j'ai de l'inspiration pour écrire. Parfois les plus beaux discours ne sont pas faits de mots, mais de maux. Ah punaise c'est beau ce que je dis en fait. C'est dingue, j'écris mieux quand je suis déprimée. Je devrais bien écrire tout le temps alors, ah ah ah.

Bref, je vais aller dormir. Voilà à quoi se résume ma vie, maintenant. Dormir, avoir envie de mourir, dormir, avoir envie de mourir...

Et dans trois jours, j'aurais seize ans.

Les Anges tombent en premier {correction à venir} [[en pause]]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant