Un sourire fleurit instantanément sur mon visage couvert de sang coagulé. Je rentre mes griffes pour ne pas attirer l'attention sur moi. Sans même me retourner vers la foule qui commence à redevenir bruyante, je me mets à courir. Je veux quitter cette place de tous mes malheurs, le plus vite possible ! Je veux oublier tout ce qui s'est passé ici ! Je veux oublier cette nuit remplie d'horreur ! Je veux oublier cette nuit qui a changé ma vie ! Je cours le plus vite possible. Je ne veux pas qu'on me rattrape ! Il faut courir ! Courir le plus loin possible ! Ces monstres qui m'ont attaquée ont gâché ma vie ! Des perles d'eau salée viennent couler sur mes joues brûlantes. Je commence à tituber. Je dois m'arrêter. À peine ai-je cessé ma course effrénée que des frissons me parcourent le corps entier. J'ai l'impression de peser plusieurs tonnes ! Sous ce poids, je m'effondre à terre. Des sueurs froides coulent sur mon front. Ma respiration devient sifflante. Ma gorge est sèche. Je suis prise de haut-le-coeur. Avec peine, mes bras me traînent vers le mur le plus proche. Vomir me fait mal. Je n'ai rien rien mangé depuis plusieurs heures. Les spasmes arrivent. Je ne me contrôle plus. Il faut dire que c'est la première fois que je fais une crise de panique aussi violente. Le monde autour de moi se met à tourner à une vitesse folle ! Je ferme les yeux, mais un violent mal de tête me prend.
- Stop. Stop stop stop.
Il faut absolument que je me calme. Mais comment faire ?
Inspire. Expire.
Après plusieurs respirations, la crise passe. Je me mets sur les fesses, adossée au béton. Je ne veux plus courir. A quoi cela va me servir ? Je suis fatiguée de ça. Et de toute façon, où est-ce que je pourrais aller, hein ? Je n'en ai aucune idée... Alors, autant rester ici.
Je lève la tête et regarde où je me trouve. Je suis dans une venelle, à l'abri de tous les abrutis bourrés du vendredi soir.
- Qu'est-ce que j'ai fait ?
Qu'est ce que je vais devenir... ? Si je n'avais pas aidé ce mutant, je ne serais pas en train de me morfondre derrière une poubelle. Ma vie était parfaite en fin de compte ! Mes sanglots entrecoupés par des reniflements bruyants montre à quel point je commence à être nostalgique de l'ancien temps... Il y a quelques semaines j'aurais affirmée que ma vie était pourrie et maintenant je rêve de pouvoir la retrouver !
- Pourquoi moi ? Mon Dieu, mais pourquoi moi ?
Pourquoi est-ce que je me mettrais à prier aujourd'hui ? Je n'ai jamais été croyante. Je n'ai aucune certitude que Dieu, Allah et les autres existent vraiment. Mais pourquoi pas ? Après tout, les mutants existent, alors peut être que ces dieux sont bien réels ! Alors pourquoi ne font-ils rien ? Je n'y crois peut être pas assez fort. Ou alors ils veulent que je me relève seule.
Bon maintenant Gabrielle ça suffit ! Tu vas te relever et arrêter de chialer !
Je réussis à me convaincre jusqu'à arrêter mes pleurs. Je me relève, difficilement certes, à cause des tremblements qui parcourent mes jambes, et me retourne face au mur. Elles ne doivent pas être bien solides. Je les sors, leur arrivée me fait grimacer.
- JE N'EN VEUX PAS !
Je martèle le bloc de béton de coups de poings. À chaque contact entre le mur et mes griffes, des étincelles jaillissent en abondance folle. Après quelques violents contacts, deux d'entre elles finissent par se briser. Je fixe le reste de lames et les deux griffes repoussent. Mais qu'est-ce que... ? Je pensais... Enfin je croyais que... La ressemblance avec mon super-héros préféré était énorme. Mais non. Je ne sais même pas quelle est ma mutation . Je finis par m'arrêter à cause de la douleur et des pleurs qui recommencent de plus belle. Je dois m'endurcir ! C'est ce que ma mère m'a toujours dit. Et cette fois je dois l'écouter, sinon je vais rester des heures ici à pleurer comme une madeleine.
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Mutante
عشوائيLa mutation... C'est sûrement la pire chose qui puisse m'arriver. Ça engendrerait des choses affreuses. Plus de famille. Plus de d'amis. Plus de chez moi. Plus rien. Seulement la solitude et la souffrance. Oui, sans aucun doute, la mutation serait...