Élisa Legrand, avait assisté avec une certaine jubilation à la représentation théâtrale, certaine que celle-ci serait au centre de l'actualité des prochaines semaines. Le célèbre acteur avait invité tout ce que l'Amérique comptait de personnalités, et bien entendu la famille André, avait, elle aussi, reçu son lot d'invitations. Et c'était elle, Élisa, qui avait eu la chance de les réceptionner. Elle venait justement d'arriver au manoir de son oncle ce jour-là, lorsque Dorothée avait déposé un abondant courrier sur la table du salon. La rouquine n'avait pu s'empêcher d'aller y jeter un coup d'œil et lorsqu'elle avait compris ce que contenait l'enveloppe aux bords argentés, elle s'était empressée de l'escamoter, une lueur mauvaise dans le regard. Et une fois rentrée chez elle, elle avait sorti les invitations de l'enveloppe et en avait bien sûr trouvé une pour Candy, qu'elle avait lentement fait brûler entre ses doigts, avec une joie sauvage, avant de se débarrasser des restes calcinés du carton dans la cheminée.
Elle ricana rétrospectivement. La fille d'écurie ne risquait pas, cette fois-ci, de lui pourrir sa soirée.
Et, lorsqu'elle s'était mise en tête d'aller voir l'acteur dans sa loge, pour le féliciter et plus si affinités, elle ne s'était pas gênée pour prendre l'identité de Candy afin de passer le barrage des employés, qui apparemment avaient pour ordre de ne laisser passer que cette moins que rien. Elle avait dû se forcer un peu tout de même... Imaginez donc... Se faire passer pour Candy... Quelle horrible déchéance ! Elle grimaça de dépit en pensant à ce que cela pouvait sous-entendre : Terry n'avait apparemment pas oublié cette... cette petite... dévergondée qui faisait tourner la tête de tous les hommes qu'elle croisait... Par chance – mais pouvait-on vraiment parler de chance alors qu'elle avait si habilement manœuvré – cette petite sotte n'était pas là ce soir et c'était elle, Élisa Legrand, qui aurait le privilège d'approcher le bel acteur, lequel, elle ne l'oubliait pas, était aussi fils de duc, même s'il avait apparemment rompu tout lien avec son auguste famille.
Alors qu'elle était là, devant la loge du comédien, vérifiant une dernière fois la bonne ordonnance de la tenue dernier cri qu'elle s'était offerte pour l'occasion, remettant une mèche en place et enfin prête à frapper à la porte, elle interrompit son geste, en entendant un bruit de voix, celle grave et bien timbrée de Terry et une autre qu'elle n'arrivait pas à situer. Une femme ? Un enfant ? Elle approcha son oreille de la porte pour mieux distinguer ce qui se disait. Ben quoi... Vous ne vous imaginiez tout de même pas que la rouquine allait se comporter en femme du monde et s'éloigne dignement de là... Non ? Si ?! Oh ! Mon Dieu, mais vous ne connaissez pas Élisa Legrand alors... Il faudra que je vous explique... Enfin, vous comprendrez en lisant la suite...
Ladite Élisa avait à présent l'oreille carrément collée à la porte et percevait avec une certaine netteté les paroles échangées dans la pièce. Il y était question de... de... de Candy ?! Elle s'écarta un instant de la porte en serrant les poings, folle de rage et dut se faire violence pour ne pas laisser échapper le hurlement qui montait dans sa gorge et réprimer l'envie qu'elle avait de tout casser autour d'elle. Cette peste n'arrêterait-elle donc jamais de se mettre sur son chemin ? Elle aurait dû l'étrangler de ses propres mains depuis bien longtemps, en fait depuis le moment où sa chiffe molle de frère avait fini par se laisser lui aussi embobiner par les airs de sainte nitouche de cette fille aux origines douteuses. Après avoir inspiré un bon coup pour essayer de se calmer un peu, elle colla derechef son oreille à la porte et sa fureur monta encore d'un cran lorsqu'elle comprit qu'il était question que Terry se rende à La Porte. Heureusement, le comédien semblait réticent. Peut-être devait-elle intervenir et lui dire qu'il avait bien raison d'hésiter, que la meilleure chose à faire pour lui était d'oublier cette Candy de malheur et de s'intéresser enfin à des personnes de qualité, et que si Susanna, ne lui convenait pas, elle était prête, elle, la merveilleuse Élisa Legrand, à lui offrir sa précieuse compagnie... Un sourire niais aux lèvres, elle était déjà en train de s'imaginer au bras du séduisant comédien lorsque la porte s'ouvrit à toute volée. Elle eut tout juste le temps de se jeter dans un recoin sombre et vit passer un garçon blond qu'elle n'avait encore jamais vu, et qui lui rappela vaguement Anthony. Sans doute un de ces petits va-nu-pieds dont s'occupait sa cousine et qui lui vouaient, on ne savait pourquoi, une reconnaissance éternelle. Cette dévotion... C'était à n'y rien comprendre. Et d'ailleurs, comment ce garçon avait-il pu passer le barrage des employés du théâtre pour se rendre dans la loge de l'acteur ? Hein ? Il n'avait tout de même pas pu, lui aussi se faire passer pour Candy ?
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Les rois mages
FanfictionEt si les rois mages se mêlaient du destin de Candy et de Terry ?