Chapitre 11 : Neptune

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Les champs s'arrêtèrent enfin, au bout d'une heure. L'inquiétude me serrait encore l'estomac, je craignais de faire tâche parmi les Gardiens qui m'entouraient et qui, vu la taille de la ville, devaient être connus à Neptune. Lorsqu'on parvint aux hauts remparts de pierres taillées, je mis de côté mes appréhensions pour observer scruter le paysage. L'océan n'était pas en vue, caché par la cité marine, mais je pouvais le sentir à l'air iodé qui flottait et au goût de sel sur ma langue. Carl grommela alors :

- Faites attention. La dernière fois, on s'est fait attaquer ici...

Mon sang ne fit qu'un tour. Attaquer !? A Éden !? Tobias tourna la tête vers moi et je crus voir son visage se durcir un moment, créant une ride sur son front et lui donnait l'air plus dur encore. Il était d'un physique fin mais où l'on devinait des muscles, brun, les yeux marrons, tout à fait ordinaire. Mais son attitude impassible et détachée le rendait intimidant dans un genre différent de Carl. Je déglutis alors qu'il lâchait d'une voix dure :

- L'île n'est pas aussi sûre et paisible que ce qu'ils ont dû te raconter à Pandore. Tu es la fille du Régent et c'est sans doute pour ça que tu es si naïve. Ils ont dû te faire rêver avec leurs histoires d'Entente, de paix, de pays sans démons ...

- Il y a des démons ici ?

Je savais que je le suivais dans l'idée qu'il se faisait de moi et, même si ça donnait un sacré coup à ma fierté de l'admettre, il n'avait pas tord. J'avais toujours cru que les démons n'envahissaient que le Monde, enfin le reste du Monde. C'était si stupide ! Carl ricana et répliqua :

- Ils sont partout. Tu devrais sortir de ton palais plus souvent.

Je serrais les dents et le fusillais du regard. Tobias rompit la dispute sourde qui menaçait d'éclater en nous demandant de continuer d'avancer. Durant l'heure précédente, j'avais compris qu'il était le chef de l'élite. Je m'agitais, soudainement plus tendue à l'idée que je puisse croiser un démon ici, dans ce que je pensais être un havre de joie de vivre... On se mit à longer le grand mur et je me laissais bercer par les bruits venant de l'intérieur. C'était rassurant : des rires, des éclats de voix, de la musique, des bruits de pas claquant sur les dalles ... On atteignit alors l'arc en pierre, l'une des portes permettant d'entrées. Elle était gardée par deux soldats qui ne bronchèrent pas lorsqu'on pénétraient dans l'enceinte. L'un deux adressa même un signe de la main à Sébastien qui lui répondit de la même façon. A l'intérieur, je retrouvais la même activité bouillonnante de ma dernière visite. Des maisons en pierres étaient installées de façon désordonnées, créant de nombreuses rues larges mais sinueuses où des marchant étendaient des produits frais en tous genre, mais surtout des produits de la mer. Les gens se promenaient et je remarquais principalement des Nephilims, ou encore des Elfes. Les passants s'écartèrent sur le passage de nos chevaux et je fus peinée de voir que j'étais la seule à les remercier et à leur sourire. L'élite se contentait de passer, guettant autour d'eux comme s'ils craignaient une attaque. J'eus l'impression d'être de nouveau une simple citadine, comme tous ces autres qui les regardaient passer avec admiration, tout comme je le faisais encore avant d'en rencontrer personnellement. Et c'était encore tout frais. Déçue, je détournais les yeux et fus éblouie par le spectacle qui s'offrait à moi sur ma droite. La ville étant construite en pente sur la côté, elle se terminait par un grand port bondé de bateaux en tous genres, petits et gros, flottant sur une eau calme. L'océan s'étendait ensuite à perte de vue, reflétant le soleil, créant l'illusion de vaguelettes de lumière à chaque mouvement.

- Yélaiah ?

Je fus arrachée à ma contemplation par la voix amusée de Sébastien. Je me tournais vers lui et rectifiait, espérant que ce serait la dernière fois que j'aurais à le faire :

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