A l'heure où le soleil était au plus haut, la ville grouillait de vie et de mouvements, comme une vraie une ruche en pleine activité. Tous le monde s'activait, courait de tous les côtés, en ne s'accordant rien de plus qu'un geste vague de la main ou qu'un rapide sourire. Malgré que personne ne prenait réellement le temps d'arrêter ses activités pour parler à son voisin, il régnait un vrai brouhaha. La grande rue était bondée et les citadins se mêlaient aux étrangers dans les nombreux commerces qui la bordent. Ces derniers offraient des marchandises en tous genres, la plupart ne venant même pas de notre pays, l'Eden, mais de l'extérieur de nos frontières.L'Eden était si vaste que j'avais parfois l'impression que mon monde s'y résumait. Ici, tout était à sa place et rien ne sortait du rang sous peine d'être sévèrement punis. Nous avions nos lois, qui étaient plus strictes que n'importe où ailleurs, qui maintenaient au mieux la paix. Mais j'avais compris très tôt que dehors, dans le monde des Hommes, ces mêmes règles étaient beaucoup plus dures à faire respecter. S'en était d'autant plus compliqué que ceux que nous protégions ignoraient jusqu'à notre existence. Ce qui était pour nous une réalité était pour eux des mythes, des légendes, des superstitions tout droit sorties des histoires pour enfants... J'aimais me réciter dans ma tête tous ce qui était différent, dans l'espoir vain que cela me fasse préférer l'Eden au reste du Monde et que cela fasse disparaître mes rêves d'aventure et de voyage...
- Dix minutes avant la fin de l'Assemblée, lâcha une voix robotique sortant de mon téléphone portable qui trônait à côté de moi.
Je me trouvais à Pandore, la capitale d'Éden, l'unique grande ville moderne de tous le pays. Le reste étant composé d'immenses forêts, de chaînes de montagnes, ou encore de petites cités dénuées de tout ce qui peut sembler "Humain". Mais ici, à Pandore, c'était différent. On m'a dit un jour que la capitale était aussi vaste que Paris et tout aussi moderne. Comme à chaque fois que je pensais à la capitale française, je ressentis une bouffée d'espoir, l'espoir qu'un jour je pourrais m'enfuir de tous ceci et me rendre dans de vraies villes pour rencontrer le Monde. Le vrai Monde. Pourtant, une petite voix dans ma tête me rappela que, si Pandore pouvait être aussi moderne que Paris, cette dernière ne possédait sûrement pas la plus grande diversité d'espèces magiques, obscures ou de sang pur, de toute la planète.
En me rappelant cela, je plongeais alors mon regard dans les rues bourrées de monde. Même de là où je me trouvais, je parvenais à discerner nettement les divers types de gens qui marchaient côte à côte comme des membres de la même espèce. C'est ça, l'Eden. La paix permettait d'oublier les anciennes querelles et de vivre les uns avec les autres. Ici, vampires et loups garous pourtant ennemis de toujours se côtoyaient et se respectaient. Là bas, ils n'étaient que des moyens comme d'autres pour terrifier les enfants. Les fées et les elfes qui marchaient de leurs allures légères n'étaient que des personnages idéalisés dans leurs contes. Les sorciers étaient stigmatisés alors qu'ici, leurs dons étaient pris au sérieux et admirés. Les Anges n'étaient que des pions de la religion chrétienne alors qu'ils étaient partis à part entière de notre Histoire, ils l'avaient même débutée ! Les métamorphes et les Démons, quant à eux, ils ne vivaient que sous les lits des gamins désobéissants et on les faisais disparaître en allumant la lumière ou en se répétant qu'ils n'existaient pas. Ici, ils étaient bien réels et craints, et nous les combattions dans une lutte sans merci pour protéger ces mêmes Humains qui ne nous connaissent pas.
Et nous ? Et bien, nous n'existons même pas dans leurs contes. Pourtant, nous descendions des Anges. Je faisais partis de la race des Nephilims et j'avais dans les veines du sang d'Ange. Nous étions ceux qui nous battons pour les Humains, et nous étions invisibles. Cette idée me révolta. Comment pouvait-on ignorer le fait qu'il y ait bien plus de peuples sur la Terre !? Mes professeurs aimaient me répéter que les Humains sont comme ça : ils se croyaient supérieurs et ne pouvaient même pas imaginer avoir d'égaux ! Pourtant tout ceci était bien réel. C'était si réel que je n'avais qu'à tendre la main pour effleurer la tête de tous ces gens.
Enfin, je n'aurais eu qu'à tendre les doigts si je ne me trouvais pas perchée sur le toit de l'une des deux tours composant le plus haut bâtiment d'Éden... Ce bâtiment n'était autre que le siège de l'Ordre, cette institution qui contrôlait l'organisation de tous ces peuples magiques, du plus pur au plus obscure. L'Ordre était une institution de Nephilim, formant une assemblée : le Conseil des Gardiens. Les Gardiens étaient nos guerriers, nos soldats, qui se battaient dans le Monde contre les Démons dans le but de protéger les Humains. Je rêvais d'en faire partie depuis que je suis enfant, précisément depuis mes 10 ans... Je repoussai la vague de souvenirs qui manqua de me submerger alors que le jour où j'avais décidée de devenir une Gardienne me revenait en mémoire. Bien que j'avais reçu l'enseignement et l'entraînement adéquat, l'entrée dans l'Ordre des Gardiens m'était refusée par le Régent, le dirigeant d'Eden : Viktor MerryWeather, mon père.
- Laïa ? fit une voix familière depuis l'escalier qui menait sur le toit.
Je souris et me redressai, restant en équilibre sur le bord du toit. Il n'y a qu'une seule personne se trouvant dans le bâtiment qui m'appellait par mon diminutif que je préfèrais bien entendu à mon nom : Yélaiah MerryWeather. Marianne, la "secrétaire" de mon père, s'avança alors en se protégeant du vent que je ne remarquais même pas. Ses yeux gris s'écarquillèrent en me voyant dans une telle posture et elle s'écria :
- Descends de là ! Tout de suite !
- Je ne risque rien, ricanais-je.
- Ce n'est pas parce que nous possédons du sang d'Ange qu'il va te pousser des ailes si tu tombes ! Alors viens-ici, s'il te plait.
Je la rejoignis d'un pas rapide après avoir levé les yeux au ciel. Marianne n'avait que quelques années de plus que moi mais elle en faisait davantage à cause de ses cheveux blonds tirés en chignon serré et de son tailleur gris impeccable. J'avais l'air d'une sauvage en comparaison : j'avais laissé mes cheveux détachés et je portais un pantalon noir et souple, un tee-shirt bleu et une paire de baskets. Malgré que ce soit la tenue réglementaire des Gardiens, elle était très confortable et mon père ne pouvait pas me l'interdire. Quoi que j'étais sûre qu'il devait en avoir envie ! Marianne me détailla avec un sourire crispé et le mien s'évapora aussitôt. Je demandai, inquiète :
- Qu'y a t-il ?
- Je... Je ne devrais pas te le dire... Ton père m'a demandé de te faire descendre et il a spécifié qu'il ...
- Je gérerais mon père. Dis-moi.
Bien qu'elle soit la secrétaire et la plus proche conseillère de mon père, Marianne était mon amie depuis bientôt deux ans. Et elle avait prit le temps de m'apprendre tout ce que son patron m'avait empêché d'apprendre lorsque je suivais l'enseignement de l'Initiation, la grande école des Gardiens. Je le suivis alors qu'elle se dirigeait vers l'escalier, elle était visiblement tourmentée. En descendant, la grande femme déclara :
- La réunion du Conseil des Gardiens est terminée.
Je me retins de lui apprendre que j'avais mis une alarme sur mon portable pour connaître les va et vient du Conseil. Mon père me tuerait s'il savait. Je la laissais poursuivre.
- Tu sais comment les nouvelles vont vite, ici. J'ai immédiatement était mise au courant : le Régent envoie un groupe important de Gardiens à Paris. Seulement composé des meilleurs guerriers, ils partent ce soir.
- Tu sais pour quelle raison ?
Le Conseil envoyait rarement plus de quelques Gardiens au même endroit en même temps. Tout simplement parce qu'ils étaient suffisamment entraîné pour régler n'importe quel conflit sans avoir à demander de l'aide. Généralement, ce n'était rien d'autre qu'un métamorphe semant le trouble ou encore une querelle entre vampire et loup-garou. Mais là, je sentais que c'était différent. Je m'arrête, perdue dans mes réflexions, et Marianne prit cela pour le signal qu'elle attendait. Je suis sûre que c'était pour que je n'entende pas qu'elle souffla doucement :
- Ils ont du nouveau au sujet d'Asaliah...
Il ne m'en fallut pas plus, je me précipitais dans la cage d'escalier et dévalais les marches. Asaliah. Ma petite sœur.

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Shadows
ParanormalLorsque toutes les légendes du Monde et bien plus encore sont vraies, il peut être vite compliqué de parvenir à ses fins. Alors, dans sa quête pour retrouver une soeur perdue depuis longtemps, Laïa va devoir faire face à des conflits des plus périeu...