Chapitre Quatre.

10.5K 840 168
                                    

« Il existe un langage qui est au-delà des mots. »
- Paulo Coelho.

***

          Johanna venait de partir, il était dix-sept heures et le jour commençait déjà à descendre le long de l’horizon. Harry était sur le tapis, en tailleur, et pianotait distraitement sur son téléphone ; ses sourcils était froncés et l’habileté avec laquelle ses doigts tapaient l’écran devenait de plus en plus rapide.
Louis, quand à lui, était assis sur le canapé de manière inconfortable, le dos droit, et n’osait pas bouger. Il ne se sentait pas à l’aise et le manque de paroles du garçon à ses pieds ne l’aidait pas vraiment.
Harry pourrait au moins essayer de communiquer ou…
_Louis ?
La voix qui venait de retentir fit sursauter le garçon, rompant ses pensées, et ses yeux se fixèrent aussitôt sur Harry. Il venait de parler. Il venait de prononcer son prénom.
Le bouclé n’ajouta rien et se contenta d’un léger sourire timide, essayant de décrypter les différentes émotions qui passaient lentement sur le visage de son ami.
Et pour être honnête, il y en avait plusieurs : la peur et le choc, l’incompréhension, l’intimidation.

La peur. D’où venait cette voix ? La seule personne présente avec lui était Harry, mais jamais il ne l’avait entendu parler, jamais il ne l’avait entendu rigoler. Pour Louis, sa voix n’existait pas et il s’était stupidement trompé, associant trop vite la surdité au mutisme.

Le choc. Harry avait parlé.

L’incompréhension. Son prénom ; c’était son prénom qui avait passé les lèvres roses et pulpeuses du garçon en face de lui. D’une certaine manière, cela affectait encore plus Louis ; car de tous les mots qu’il aurait pu prononcer, pourquoi avait-ce été le sien ? Et pourquoi son cœur battait-il désormais aussi fort que s’il avait couru le marathon de New-York ?

L’intimidation. C’était, de tous les sentiments qu’il venait de ressentir, le plus étrange à décrire et à comprendre ; il venait de se rendre compte qu’Harry pouvait parler. Pourquoi ne l’avait-il pas fait avant ? Pourquoi ne le faisait-il pas plus souvent ?

Louis ne bougeait pas, il regardait le garçon devant lui comme s’il avait trois têtes et des dents de vampire.
_Louis ? répéta le bouclé.
Il n’avait pas rêvé, Harry avait parlé. Sa voix était douce et rauque à la fois, hésitante, tremblante, comme s’il n’était pas sûr d’émettre un quelconque son ou qu’il avait des doutes sur le mot employé.
Il venait de prononcer son prénom.
Les questions refirent surface : Pourquoi Louis n’arrivait-il plus respirer ? Pourquoi son cœur battait-il si vite ?
Les mouvements du plus jeune le ramenèrent brusquement à la réalité et il cligna des paupières plusieurs fois pour remarquer qu’il lui tendait une feuille. Il l’attrapa doucement et après un dernier coup d’œil à son ami, regarda la phrase qui y avait été écrite.

« Tu vas bien ? »

Ses iris se fondirent instantanément dans de l’émeraude et il hocha doucement la tête.
Le bouclé, quoi que septique, lui sourit gentiment et commença à signer avant de se stopper en plein milieu d’un geste et lui jeter un regard désolé. Il reprit la feuille. 

« Tu as l’air mal, tu es sûr que ça va Louis ? »

« Comment tu arrives à parler ? »

« Je suis sourd, pas muet. »

Les mots le frappèrent une fois de plus en pleine figure comme si une paire de doigts avaient claqué sa joue de façon forte et brutale.
Evidemment.
Il le savait déjà, mais le voir écrit noir sur blanc devant lui était tout de même plus réel et plus violent à encaisser que des simples pensées dans son esprit.

Silent Memories.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant