« On n'entend pas de trompettes le jour où l'on prend les décisions importantes pour le reste de notre vie.
Le destin se fait connaître en silence. »
- Agnès de Mille.***
Les murs blanc cassés de l’hôpital riaient ; Harry en était sûr, ils se moquaient de lui. L’impression de déjà vu était trop forte, trop présente, trop étouffante pour qu’il essaye tant bien que mal de reprendre une respiration normale. Son front était moite de sueur et ses vêtements lui collaient à la peau, les rendant brusquement trop serrés et trop chauds pour l’atmosphère lourde et insoutenable de l’hospice.
Cela faisait dix minutes qu’on lui avait maladroitement ordonné en BSL d’attendre dans la salle d’attente, mais cela s’apparentait à des heures ; des heures qu’il mourrait d’avoir des nouvelles de son meilleur ami, des heures qu’il avait envoyé un message aux garçons et à Lily pour leur dire de venir, des heures qu’il était coincé ici en se souvenant parfaitement de la vision insupportable et douloureuse de Louis allongé sur le sol carrelé de la cuisine.
Il avait d’abord cru qu’il était simplement tombé et s’était fait mal ; mais lorsque les yeux bleus de l’anglais avaient obstinément refusés de s’ouvrir, Harry avait paniqué, commençant à pleurer avant même d’avoir touché le corps désormais inerte devant lui. Il avait murmuré son prénom plusieurs fois, secouant ses épaules comme jamais il ne l’avait fait auparavant : un peu plus violement de minute en minute, ses chuchotements devenant également plus fort et plus brisés par les sanglots.
Louis n’avait pas réagit du tout, et dans un élan d’épouvante, le bouclé s’était rendu compte qu’il ne pouvait pas appeler les urgences parce qu’il n’entendait pas, il ne parlait pas.
Seulement il était inconcevable pour lui de ne rien faire, il était inconcevable d’attendre qu’il se réveille, il lui était tout simplement inconcevable d’abandonner Louis. Il avait donc sorti son cellulaire, composant le numéro du Samu en s’y reprenant à plusieurs fois tant ses doigts tremblaient contre l’écran et ses larmes brouillaient sa vue. Il n’avait pas attendu avant de coller le téléphone à son oreille et bégayer des mots sans liens en espérant qu’on le comprenne : « au secours » - « aide » - « Louis » - « s’il vous plait » - « vite ».
A bien y réfléchir, il ne savait définitivement pas comment les urgences l’avaient trouvé ; surement grâce à un système de localisation hautement performant ; mais toujours est-il que les sirènes et les gyrophares rouges et bleus avaient débarqués dans la rue en moins de sept minutes.
Sept minutes pendant lesquels Harry n’avaient cessé de sentir les perles d’eau salées roulées le long de ses joues tandis qu’il serrait contre lui le corps inconscient de son amoureux, l’ayant ramené tout contre lui en s’asseyant par terre.
Deux mains le ramenèrent brusquement à la réalité, le coupant de ses souvenirs tortueux en entourant sa nuque. Il sentit un visage se loger dans son cou et reconnu l’odeur de cerise de sa meilleure amie au même titre que les cheveux blonds contre sa joue. Alors il la serra, inondant les jolies boucles soyeuses de la jeune fille de sanglots qu’il ne contrôlait plus.
Un peu plus loin arrivaient rapidement Liam, Zayn et Niall, un masque d’inquiétude non dissimulé peint sur leurs visages fatigués : il n’était après tout que neuf heures dix un samedi matin.
Sans mot dire, les trois garçons se joignirent automatiquement à l’embrassade et bientôt, Harry fut entouré de bras qui l’aidèrent légèrement à calmer ses pleurs, lui rappelant qu’il n’était pas tout seul et qu’ils étaient tous ici pour lui et Louis.
_Tu veux que je prévienne Johanna ? demanda Zayn une fois que l’étreinte fut rompu.
_Je lui ai déjà envoyé un message ; elle a dit qu’elle déposait les filles chez une voisine et qu’elle prenait la voiture aussitôt ; mais elle ne sera pas là avant midi et demi.
_On va rester avec lui de toute façon, commença Liam avec un sourire. Comment il va ?
_Je ne sais pas, signa le bouclé en baissant les yeux et se mordant la lèvre pour s’empêcher de craquer de nouveau.
_Tu ne sais pas ?
_Ils m’ont dit de rester ici, je ne sais pas ce qu’il se passe et personne ne veut m’informer de quoi que ce soit ; de toute façon, ils sont incapables de signer alors ils ne me comprennent pas.
_Ils ne connaissent pas le BSL ? s’étonna Niall en parlant, surpris.
Pour simple réponse, le jeune homme secoua la tête de droite à gauche et jeta un énième coup d’œil vers la double porte coupe feu par où Louis avait disparut il y a plus d’une demi-heure.
Il y eu alors un léger silence ; pas un de ceux qui alourdissent l’atmosphère au point de la rendre insoutenablement tendue ; pas non plus un silence gêné ; c’était un silence qui permettait à quiconque aux alentours de remarquer à quel point les cinq étudiants ici présents étaient soudés et savaient affronter les épreuves ensembles ; un silence calme qui les aidaient à se rassurer sans besoin de paroles ou de gestes.
Un simple silence qui leur permit de respirer un peu mieux en sachant qu’ils étaient tous les cinq ici pour se soutenir, et que tout irait bien.
_Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
C’était le pakistanais qui venait finalement de poser la question à cent mille livres en rompant la quiétude de la pièce, celle qu’aucun d’entre eux n’avait pu se résoudre à poser pour le moment.
Les dents blanches et parfaitement alignées d’Harry entaillèrent une fois de plus sa lèvre et il su que s’il continuait ainsi, elle serait totalement gercée et sèche avant la fin de la journée.
_Il est rentré hier soir, signa-t-il enfin en fixant un point sans intérêt derrière le comptoir de la réception, repassant les évènements dans sa tête à mesure qu’il les racontait. Seulement je ne m’en suis rendu compte que ce matin, quand il est arrivé dans la cuisine. Je lui ai demandé où est-ce qu’il avait disparut, et en fait il était à Doncaster. Bref, j’ai tenu bon, je n’ai pas craqué ni rien ; même quand j’ai remarqué la trace rouge dans son cou et la fatigue sur ses traits ; puis d’un seul –
_Une trace rouge ? le coupa Liam en levant un sourcil.
_Je n’ai pas envie de parler de ça, soupira le concerné en chassant cette image de sa tête, secouant la tête en faisant voler ses bouclettes brunes.
Il détaillait désormais le sol comme si c’était la chose la plus intéressante du monde ; comme s’il était honteux ou que la vision du carrelage blanc pouvait l’aider à retenir ses larmes.
_Quoi qu’il en soit, reprit-il finalement au bout de quelques secondes, on à commencé à se fâcher et il s’est mit à crier, à hurler que je lui donnais mal à la tête et que c’était de ma faute si on en était là aujourd’hui. Puis il est parti.
Le bouclé agita la tête derechef et rafla d’un revers de la main les larmes qui coulaient de nouveau.
_Je ne l’ai pas vu tout de suite parce que je ne l’ai pas entendu…
Ses yeux embués se relevèrent vers ses amis, la désolation et le désespoir se lisant avec tant de facilité dans ses iris que les autres durent se retenir de ne pas s’effondrer aussi devant tant de fragilité.
_Je ne l’ai pas entendu, répéta le bouclé en se laissant tomber à genoux sur le sol pour enfouir son visage entre ses doigts.
A cet instant, Niall tourna les talons pour ressortir de l’hôpital à grandes enjambées ; pas parce qu’il en voulait à Harry ou le blâmais pour quoi qu’il ait pu se passer ; juste parce que la pression et la détresse qui émanaient de son ami étaient trop fortes et qu’il ne pouvait se permettre de craquer devant lui.
Alors il se rua dehors, sous la pluie qui n’avait pas cessée, et il se cacha sous l’auvent du parking, s’asseyant sur un banc de marbre pour se mettre à pleurer librement.
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Silent Memories.
FanfictionLa dispute venait d’éclater de nouveau ; le sujet n’était pas différent, il était seulement abordé avec plus de violence : Louis criait méchamment, même s’il savait qu’Harry ne l’entendrait pas. C’était juste plus fort que lui, il ne pouvait pas re...