Comme une fausse évidence

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Je ne suis vraiment pas la reine lorsqu'il s'agit d'exprimer mes sentiments. Enfin, si on laisse de côté ceux qui me poussent à insulter, à me battre... Pour ce qui est de la colère, ça je sais très bien gérer la communication. Non, moi je parle des sentiments tout mielleux, ceux qui dégoulinent de crème caramel, ceux qui vous poussent à crier des « Wow, j'adore ! » et tout le toutim. 

Mais quand on a en face je ne sais combien de paires d'yeux brillants qui attendent les éloges qu'il méritent de surcroît, je m'improvise maitresse en la matière, et offre aux enfants tous les applaudissements et autres déballages de sentiments.

— Wow ! J'adore ! J'ai adoré, vraiment ! Bravo à tous. C'était vraiment... Wow ! 

Ok. J'ai pas dit que j'étais non plus devenue une érudite en la matière ni la patronne de la prose. Juste que j'étais parvenue à exprimer des sentiments de joie et d'émerveillement pour ce que je viens d'entendre. Et mieux encore, des sentiments de reconnaissance. 

Le chant des enfants m'a transportée et fait vivre tout un tas de choses. Ok, bien plus que je n'aurais pu le prévoir. Je sais que de drôles de paroles se sont imposées dans ma tête, mais je crois que... que c'était sous l'émotion. Parce que... Pfff quoi ! « Je suis amoureuse » !?! Pourquoi pas aussi : « Quand je serai grande, je serai irréprochable, parfaite, un modèle pour toutes les femmes ».

Mais tandis que le fameux « chef d'orchestre - mini dieu - inspirateur d'idées loufoques » s'approche de moi, je me rends compte que mon coeur est sûrement resté bloqué sur la chanson, parce qu'il se met à taper comme le feraient des cymbales, mais plutôt en mode hard-rock. Et je trouve très étrange ce réflexe que je mets en place et qui consiste à serrer fermement les cuisses, maintenant que Goran est à ma hauteur. Hop, lève-toi, Charlie, mais ne marche surtout pas !  

— Ça vous a plu alors ? 

— Quoi donc ?

Non mais quelle truffe ! « Quoi donc ? » Il y a peu de chance qu'il me pose la question au sujet de son boule ou de ce que je crois avoir ressenti à son sujet ! Punaise, je me demande s'il existe un atelier pour mon cas. Un atelier qui permettrait de dévier ma libido explosive au contact de ce gars, à des fins créatives. Bon sang, je suis certaine que j'ai de quoi créer la huitième merveille du monde avec mes hormones. Parce que oui, la partie qui les renferme est à deux doigts ( au pitié, pas deux doigts !!! ) d'exploser, et je...

— Quelque chose ne va pas, Charlie ?

— Si, si, tout va très bien, je lui réponds le ton las, épuisée par mon combat intérieur.

J'inspire plus que nécessaire, et avant de répondre de façon appropriée à sa question - absolument dénudée ( Oh mon dieu !!! Je voulais dire dénuée ! ) de tout ce que j'ai en tête - je me promets de rapidement me trouver un exorciste, histoire de me débarrasser de mes démons lubriques. 

— C'était fabuleux. Ils ont un talent de dingue ! je préfère répondre, à sa première question.

— C'est vrai. Et ils ne le doivent qu'à eux mêmes et à leur travail acharné. Et vous ?

— Quoi et moi ?

— Vous voulez nous montrer ce que vous savez faire ?

— Mouaaaaaahhh ! ris-je sans pudeur. Non. Sérieusement, non. C'est même ultra méga déconseillé pour la survie de l'humanité de ne pas entendre le moindre son sortir de ma bouche - Aaahhh bouche...

— Je suis sûr que vous êtes extrêmement dure avec vous même. Après tout, il s'agit d'un organe comme un autre qui ne demande qu'à se développer.

Goran ( Sous contrat d'édition chez Black Ink Editions)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant