Un rubis au cœur de pierre

13. De fessier en fessier

La journée à peine commencée que mon téléphone se mit déjà à vibrer. Un message. Maman.

« J-44 ma chérie » accompagné un smiley traduisant sa hâte.

Et c'était tous les matins comme ça. Très lourd. Mais vraiment trop mimi.

Cependant, avant de retourner en France, un bon nombre d'autres villes m'attendait. Et la première était pour bientôt. Dans 3 jours pour être exacte. Mais pour le moment je me concentrais surtout sur le programme de cette belle journée ensoleillée. Ah le bonheur qu'est que de ne pas travailler l'histoire de quelques heures. Vous ne vous rendez pas compte comment la vie de journaliste peut être épuisante. Il faut être dans les starting-blocks 7j/7 et presque 24h/24. Du coup je compte bien profiter de ces trois petits jours. Et pour se mettre bien en jambe dès le matin et s'aérer les poumons lorsque l'air est encore frais qui a-t-il de mieux qu'un footing?

« Tirer un coup? » proposa ma conscience qui ne perdait aucune occasion d'avoir des pensées salaces.

J'enfilai donc un short, un débardeur et une casquette pour camoufler la jungle qui me servait de coupe de cheveux. Je m'armai de mes baskets avant de partir en direction de Central Park où j'effectuai mon tour habituel. Les écouteurs dans les oreilles, j'étais coupé du monde. Ma cadence était rythmée par les battements des sons.

Le soleil tapait déjà en cette fin du mois de mai et se reflétait sur les flaques d'eau qu'avait laissé au sol l'orage de la veille.

Je laissais volontairement traîner mon regard sur les femmes qui suaient dans le parc pendant leur effort physique. Je joue sans cesse avec la gente féminine mais qu'est-ce que je ferais sans elle?

Derrière mes apparences de coureuse de jupons, mon plus grand rêve est des plus banal. Une compagne qui m'aime. Une maison. Un chien. Un enfant qui court dans le jardin en criant «maman». Voir l'amour de ma vie arriver à la mairie au bras de son père en longue robe blanche avec une ribambelle de gosses qui veillent à ce qu'elle ne touche pas le sol, l'entendre me dire «oui» avec des yeux amoureux, l'embrasser plus passionnément que jamais, la faire devenir ma femme, l'aimer tout le reste de ma vie, lui être fidèle.

Bon ok pour ce dernier point je repasserais. C'est vrai qu'il n'est, au premier abord, pas mon fort. Soit.

Mes jambes avançaient à vive allure et mon regard se promenait de fessier en fessier. Très bien faits. Bien faits. Moins bien faits. Mal faits. Très mal faits. Il y en avait pour tous les goûts.

Quand je levais la tête sur celui qui se déhanchait un peu plus loin devant moi, sa démarche, son aspect musclé et sa taille parfaite furent immédiatement reconnus par ma mémoire. J'accélérais alors le pas afin d'arriver à sa hauteur. Tout en courant et entre deux respiration je fis sursauter Emmy qui ne m'avait, jusque là, pas remarquée.

- Belle journée et belle vue pour courir Mlle Warren.

Elle retira ses écouteurs qui diffusaient la musique tellement forte que je l'entendais à travers les miens. Elle n'a pas réagit à ma remarque. À bout de souffle, elle me désigna un banc sur lequel elle alla s'étirer.

- J'ai faillit croire que tu avais disparu, me lança-t-elle essoufflée.

Aïe. Ce petit pique de la part de ma styliste préférée me fit comprendre qu'elle semblait avoir mal prit mon absence de ces dernières semaine. Je dois avouer que mon comportement ignorant et ma réapparition soudaine ne sont pas ultra compatibles. Oups.

- Je t'emmène boire un café pour me faire pardonner? essayais-je de me rattraper.

Elle esquissa un léger sourire.