Texte 1 : Saleté de vie

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Auteur : PouPouPiDou0
Titre : Saleté de vie

Salut, je m'appelle Khalia. Prénom peu commun pour une maladie peu commune. Je suis atteinte d'une tumeur épithéliale de la trachée. Barbant comme nom, pas vrai ? Seule chose à retenir : je vais bientôt crever.

Vous devez déjà vous dire que je ne suis certainement qu'une petite pleurnicheuse qui ne croit plus en la vie et n'a plus aucuns espoirs. D'un certain angle, vous avez pas vraiment tort. Parce que devoir aller à l'hôpital 2 fois par semaine en tant que lycéenne, c'est pas franchement facile. Parce que parmi les dizaines opérations que j'ai subi, rien ne s'est amélioré. Parce que voir le visage triste et désespéré des médecins à chacune de mes prises de sang, à chacune de mes analyses et essais, ça à le don de te vider de tout espoir possible.

Jamais je ne pourrai être soignée, jamais je ne pourrai vivre comme les autres. Je suis surveillée presque 24h/24h par une aide soignante qui vérifie toutes les 4 heures que mon pouls ne monte pas trop, que je ne risque pas de faire de crises de panique ou encore que je ne fais rien qui pourrait faire augmenter les battements de mon cœur.

Crises cardiaques, arrêt partiel des informations transmises à mon cerveau, surcharge de fer dans mon sang, manque de globules blancs qui causeraient des dommages dans mon organisme suite à des défaillances de mon système immunitaires..

Je pourrai mourir partout, à tout moment. Je suis suivie et prise en charge depuis toute petite, j'ai toujours eu besoin d'une grande attention de la part de tout le monde. Je suis comme les petites danseuses dans les boîtes à musique des enfants, jamais on ne me touche, ne m'approche de peur de me casser et que je me brise en deux.

Saleté de maladie.

Mais elle est où la joie dans la vie que je mène ? Je vous le demande, tiens. Durant mon traitement, je suis passée par différentes phases, toutes faisant des allers et retours, menaçant de me faire perdre la tête.

Tout d'abord, l'espoir. Ah, qu'il était beau cet espoir, qu'il me manque.Je l'ai eu durant les premières années. Chaque jour me semblait meilleur que le précédent, je croyais aux mensonges des médecins et aux faux sourires de ma famille.

Puis, la réalité me prit de pleins fouets. Chaque respiration se faisait de plus en plus douloureuse, je peinais à avoir un souffle normal. J'ai été dispensée de sports en cours jusqu'à une durée indéterminée. Parce que mettre sur un carnet '' durée jusqu'au 28 novembre parce qu'après on la verra plus vu qu'elle sera morte.'', ça le faisait pas trop. J'ai subi une période où je ne suis plus allée en cours pendant presque 1 an, se devait être ma 4ème. Je rattrapais mes cours sur mon lit d'hôpital quand je ne dormais pas, trop assommée par les somnifères pour éléphants qu'ils me donnaient.

Une fois qu'ils ont estimé que j'allais mieux, j'ai repris un rythme de cours à peu près régulier pendant environ 2 ans.

Après, j'ai commencé à ''oublier'' de prendre mes médicaments volontairement. Eh ouais, je le faisais exprès, à quoi me servaient-ils de toutes façons ? A me garder en vie le temps que je souffre et que je douille bien ? J'ai donc encore une fois arrêté l'école, et je n'y suis plus jamais retourné. C'était trop compliqué.

A chaque fois que je reprenais ma respiration, j'avais envie que ça soit la dernière. Parce qu'à chaque fois, c'était comme si des milliers de lames me traversaient lentement ma trachée. Ma vie ne tenait qu'aux quelques perfusions qui trônaient tout autour de moi dans ma chambre et m'accompagnaient lors de mes opérations et analyses le long des sombres couloirs blancs.

Ensuite, vint le jour où la dépression est venue toquée à la porte de ma tête. Elle m'a expliqué sans mensonges ce que j'avais. Je pensais le savoir, mais je ne savais pas que c'était aussi grave que ça. Ou peut-être qu'au fond de moi, si, mais la partie extérieure de moi, non. En tout cas je ne voulais pas l'admettre.

J'ai perdu énormément de poids, je ne me nourrissais plus, ne marchais que très peu. Je voyais les infirmières et les médecins passer par vagues de stresse, je ne prenais même plus la force de ressentir quoi que ce soit lors des prises de sangs ou des médicaments passés par transfusions.

Ils m'ont fait voir la psy de l'hôpital qui m'a dit que c'était normal d'avoir une dépression lorsque l'on subit une telle maladie que la mienne. Elle m'a dit qu'il fallait que j'y crois et que je ne faisais qu'aggraver les choses en faisant ce que je faisais. Mais qu'est-ce qu'elle en savait elle, elle était attente de la même maladie que moi ? Non.

Je lui est balancé la table qui nous séparait. Je me suis jetée sur elle avant d'être ramenée dans ma chambre de force.

Je l'ai ai entendu parler de moi, qu'ils devaient me transférer dans un autre secteur, que je n'étais plus leur problème, que j'étais un cas trop important, qu'il fallait le régler dans une autre clinique. Quels lâches.

J'ai entendu ma mère passer dans le couloir, discuter avec eux, puis je l'ai entendu hurler et s'énerver. Elle hurlait que je n'étais pas folle et qu'il ne pouvait rien faire sans son accord, qu'elle croyait encore au traitement que je subissais. Car je le subissais, on me forçait à prendre mes médicaments, à me garder en vie.

J'ai appuyé sur le bouton d'appel, une jeune infirmière est venue me voir, en prenant ses distances et je lui ai demandé si elle pouvait m'amener ma mère.

Nous avons longtemps parlé, je lui ai expliqué que je n'en pouvais plus.Qu'il fallait que cela s'arrête, que ce n'était pas vivre ce que je faisais. Qu'ils ne se demandaient même pas si moi je voulais continuer ce traitement, si je ne voulais pas laisser tomber. Que finalement c'était ce que je désirais. Elle ne s'en était jamais aperçue, ça a été compliqué pour elle de le comprendre mon choix. Elle ne souhaitait que mon bonheur et elle pensait que pour moi cela signifiait rester en vie, sauf que ce n'était pas le cas.

Ma mère m'a longtemps pris dans ses bras, a pleuré en silence. Moi, je ne bougeais pas, je n'arrivais pas à ressentir la moindre tristesse, j'attendais juste, impatiente d'être soulagée de ce fardeau que je traînais depuis tant d'années. Ma mère réajusta sa chemise noire, ses cheveux, me regarda d'un regard plein de compassion et se dirigea vers la machine qui gérait les perfusions.

« Je t'en supplie, maman. »

Je n'aurais jamais cru ma mère capable de faire ça, de me délivrer. Elle a fait le bonheur de sa fille, et peu de parents réussissent à cela.

Je n'avais jamais ressenti une douleur comparable à celle-ci, des images ont défilées devant moi, celles des infirmières, des docteurs, j'ai entendu des bips incessants, ça ne s'arrêtait plus. Les hurlements et la panique dans la voix de tout ce monde retentissaient. Ils ne voulaient pas me lâcher. Ma gorge me piquait de partout, c'était comme si on l'a coupait en milles morceaux, j'avais l'impression de brûler de l'intérieur. Ma tête me chauffait, mes muscles me lâchaient et mon sang bouillonnait.

Et puis d'un coup, plus rien. Plus de douleurs. Plus de sensations désagréables, juste une douceur incomparable et si agréable.

C'est ma mère qui m'a sauvée, sauvée d'un monde dans lequel je ne voulais pas vivre, pas comme j'étais.

C'est cette même mère qui a été jugée et qui est maintenant en prison pour homicide volontaire.

Saleté de vie.

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~Cyclone

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