Luxe & Crime

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La vue était magnifique. Je me prélassais sur mon transat, sur ma terrasse. La mer était bleu azur. Ma terrasse, au deuxième étage de mon duplex, était immense. Des plantes se tenaient dans un coin à l'ombre, deux imposants transats trônaient à gauche de la terrasse, à côté de l'énorme table. Je pouvais voir la mer, mais aussi mon jardin, avec ses magnifiques arbres fruitiers et sa piscine. Avoir une piscine en bord de mer, ne sert absolument à rien, me direz-vous. Mais c'est une apparence de l'opulente richesse des Sparks. Et pour ma grand-mère, tout était question d'apparence. Je trouvais cependant cela triste et superficiel. Une vie mondaine, pleine de cocktails, de robes hors de prix, de ragots et de tout ce qui se rapproche de près ou de loin avec la richesse ne m'intéressait pas.

Maintenant, j'ai un autre avis : il faut savoir utiliser ses points forts et ses faiblesses. Dans un métier comme le mien, avoir beaucoup de moyens était très utile : nous sommes les justiciers de l'élite, rappelez-vous.

Je suis un éternel rôle de composition, toujours aux multiples visages, à effacer mes traces. Mes pas sont ancrés dans les journaux New-Yorkais, sur Internet. Mes pas sous le masque de princesse mondaine de New York, bien entendu. A quinze ans, j'avais gagné un prix international de beauté, ce qui avait lancé la presse à mes trousses.

Encore et toujours, des rumeurs fusent selon quoi je me lance dans l'immobilier, tels mes arrière-grands-parents. J'avais à peine posée le pied à Barcelone que les New-Yorkais lisaient la Une d'un célèbre journal : Après le mannequinat, Emily Sparks se lance dans l'immobilier en Espagne, suivant les pas de sa famille.

De plus, qui irait soupçonner de quoi que ce soit une jeune femme faite pour le mannequinat portant des Christian Louboutin et des lunettes Dior hors de prix. C'est pour cela que lorsque je me suis dirigée dans un immeuble luxueux de Barcelone en prétendant être la propriétaire pour en fait poser des caméras devant la porte de Mlle Svetlana Carlyle, personne ne s'est douté de rien.

Tout est question de pas. Un mauvais pas, tout s'effondre. Mais le tout est d'être efficace, donc pour espionner Svetlana, envoyer une blonde avec un faux accent russe en faisant croire qu'elle est journaliste pour la jeunesse de Barcelone suffit amplement, car Mlle Carlyle n'a pas beaucoup d'esprit et laisse entrer beaucoup de monde dans sa villa.

L'organisation Manigances Espagnoles est tellement effrayante aux yeux du monde qu'elle pense que personne ne s'en prendrait à elle volontairement. Etant elle-même un rôle de composition, Svetlana est sûre de n'être vue que sous son meilleur jour aux yeux des paparazzis. Si j'étais Miss New-York, Svetlana Carlyle devrait être élue Miss Barcelone sur-le-champ. Invitée à chaque événement, elle se déplace souvent et je me dois de la suivre constamment, ce qui est exténuant.

La pendaison de crémaillère de la galerie du centre était adorable, le restaurant indien où Svetlana était allée était très luxueux mais mon enquête se résumait à des mondanités, alors que je poursuivais une personne responsable de nombreux délits. La seule bonne raison de ces éternels diners était que plus le temps passait, plus le jour où Jeremy allait arriver approchait.

Jeremy passait ses examens de combat depuis deux jours. Il devait, Dieu merci, arriver demain dans la soirée. Je fermais les yeux quand soudain...

— Alors Emily, on dort ? me demanda une voix venant de ma gauche, me faisant sursauter.

Je tournais les yeux et dévisageai la personne qui venait de surgir sur ma terrasse. La jeune femme avait de longs cheveux blonds, de grands yeux bleus encadrés d'épais mascara noir, des dents blanches étincelantes, des lèvres badigeonnées de rouge à lèvres Chanel et de longues jambes fines. Elle tenait deux cocktails dans ces longues mains manucurées.

Heureusement qu'elle était là ! Sans Jeremy, j'avais dû trouver quelqu'un pour m'aider, et je m'en veux encore pour ne pas avoir penser à elle en premier. C'était Ariana Sparks, ma cousine qui avait quasiment grandit avec moi à Washington mais elle avait déménagé à Barcelone pour la filière espagnole de la Sécurité Supérieure Internationale.

J'ai brisé le secret en lui avouant que je faisais partie des services secrets, mais elle a été recrutée deux semaines après, donc le secret n'en été plus vraiment un. Nous n'avions pas d'occasions de se voir, mais cette mission est une opportunité pour nous de recréer des liens perdus avec le temps. Nous espérons juste que ce ne sera pas notre dernière occasion de nous voir, étant donné que notre mission n'était pas gagnée d'avance. La ME a tout de même beaucoup de morts à son actif.

Ma cousine a donc joué des rôles différents depuis son arrivée, nous nous répartissons le travail, ce qui est nettement plus gérable. J'avais donc joué la propriétaire de l'immeuble et avait causé un scandale dans un restaurant pendant qu'elle avait joué la journaliste russe et la passionnée d'art qui voulait tout acheter à la nouvelle galerie. Lorsque Jeremy arriva, lui, Ariana et moi serons prêts à accueillir les membres de la ME.

Je pris le cocktail que me tendait Ariana et en but une gorgée. Tout n'était peut-être si mal, en fin de compte...du moins pour l'instant. Mais après tout, qui sait ce qui pouvait se passer ?