Chapitre 5

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Le lendemain, 12h00.
Après avoir consacré toute ma matinée à réviser mes cours, une pause s'imposait à midi. Vêtu d'un jean et d'un t-shirt blanc, légèrement élimé mais porteur d'authenticité, je décidai de faire un détour par la pizzeria qui trônait au coin de la rue, en face de la plage. Alors que je tournais l'angle de la rue pour m'approcher de l'établissement tant apprécié, mes yeux s'arrêtèrent net sur un garçon s'approchant de moi. Son visage finement ciselé et ses vêtements griffés avaient marqué ma mémoire. Bien que son allure fût plus décontractée ce jour-là, chacun de ses gestes trahissait une éducation empreinte d'aristocratie.
- Hé là-bas ! Comment ça va ? s'exclama-t-il, s'avançant rapidement vers moi.
- Ça va à merveille, répondis-je d'un ton enjoué.
- Vous allez quelque part ? interrogea-t-il.
- Je vais à la pizzeria d'à coté, révélai-je, levant les yeux vers lui. Je suis Ilyan, ajoutai-je en lui tendant la main.
- Junior, rétorqua-t-il sèchement, saisissant ma main avec une poigne ferme mais éphémère. Amina m'a parlé de vous.
- Oui, exact, acquiesçai-je.
- Comment la connaissez-vous ? demanda-t-il alors, une pointe de jalousie teintant sa voix.
- Nous avons partagé des moments ici, confiai-je.
- Je vois, murmura-t-il, cherchant à cacher son trouble.
- Bien, je vais vous laisser, conclus-je, me préparant à reprendre mon chemin, bien que les émotions tourbillonnant autour de nous laissent présager d'une suite plus complexe à notre rencontre.

Tout homme qui aurait délibérément choisi de s'éloigner d'Amina était indubitablement dépourvu de tout sens commun. Et cela s'appliquait également au garçon se tenant devant moi, car il avait commis cette même erreur fatale. Peut-être n'était-il pas parti de son plein gré, mais il n'avait rien fait pour retenir Amina. Avec le recul, il m'était évident qu'il avait agi d'une manière d'une profonde stupidité, ignorant les véritables joyaux de la vie qu'il avait laissé échapper.

POINT DE VUE DE FATMA.

Le lendemain, 12h00.
Je franchis les portes de l'école pour me retrouver dans le restaurant, à la recherche d'Amina qui siégeait solitaire à une table.
- Que fais-tu là, assise seule sans même un repas devant toi ? m'enquis-je d'un ton préoccupé.
Elle baissa les yeux, une expression chagrine dessinant les contours de son visage.
- Je me cache, confessa-t-elle. Junior est à ma recherche.
Je fis mine d'un frisson exagéré, cherchant à conjurer les pensées de ce rendez-vous indésirable.
- Arrête, je t'en prie, n'en dis pas plus. Le simple fait de le revoir serait encore trop tôt pour moi.
Les sourcils d'Amina se froncèrent légèrement.
- Tu ne l'as jamais véritablement porté dans ton cœur, n'est-ce pas ?
Je haussai les épaules, sachant qu'il n'était plus nécessaire de dissimuler la vérité maintenant qu'ils étaient séparés.
- Je suis désolé, mais en effet, je n'ai jamais vraiment été son plus grand admirateur, concédai-je avec une pointe de regret. J'ai essayé, pourtant, par égard envers toi. Mais je n'ai pu m'empêcher de le trouver rigide et jugeant les autres. Bien qu'il soit un bel homme, cela n'a jamais compensé son absence d'humour et de personnalité.
Un éclat de rire s'échappa des lèvres d'Amina.
- Allons, ne sois pas si dur envers lui !
- Malheureusement, il souffre d'un sérieux déficit en matière d'humour, insistai-je. Il ne s'est pas privé de me faire comprendre à quel point il me méprisait. Il me tenait responsable de chaque minute que tu consacrais à m'écouter ou à me venir en aide.
Amina secoua légèrement la tête.
- Tu exagères en disant qu'il te déteste à ce point.
L'air de scepticisme se peignit sur mon visage, tandis que je levais un sourcil interrogateur en réponse aux paroles d'Amina.
- Je te prie, épargne-moi tes mensonges. Allons, Amina, tu ne peux ignorer les sentiments qu'il nourrit à mon égard. Son regard glacial en dit long, comme s'il considérait que je ne suis qu'une perte de temps pour vous deux. Il cherche à me rabaisser, à me faire sentir que je ne suis qu'une insignifiance.
Un sentiment de culpabilité s'empara d'Amina, trahissant la véracité de mes paroles.
- Je suis désolée, je ne me rendais pas compte que c'était à ce point-là.
- J'y suis habitué, répliquai-je. Ce qui me chagrine, c'est qu'il t'ait fait ressentir la même chose.
Amina sembla stupéfaite.
- Mais non, il ne s'est jamais comporté ainsi avec moi !
- Si, c'est le cas !
- D'accord, tu as peut-êre raison, concéda-t-elle à contrecœur. Je suppose que tu as déjà trouvé l'homme parfait qui ne me traitera jamais aussi mal.
- Effectivement. Tu dois admettre que Ilyan possède de nombreuses qualités. Si ce n'était pas son amour inconditionnel pour toi, je me laisserais volontiers tenter.
- Et pourquoi ne pas essayer ? demanda Amina d'un ton feignant l'indifférence.
- Vraiment ? m'enquis-je, guettant sa réaction à mon aveu d'attirance. Cela ne te dérangerait pas ?
- Il est libre de faire ce qu'il veut. Il ne m'appartient pas. Vas-y.
Un rire s'échappa involontairement de ma bouche.
- Et risquer de te voir furieuse si tu nous surprenais en train de nous embrasser ? Je ne pense pas, non.
Amina me lança un regard noir.
- Je t'ai dit que tu pouvais y aller.
- Tu le dis, mais tes yeux trahissent une autre vérité. Je pense qu'il vaut mieux que je reste à distance, loin de Ilyan.
- Et toi, tu peux me parler de Moussa, répliqua-t-elle.
- Il est adorable ce garçon, répondis-je.
Un sourire espiègle se dessina sur les lèvres d'Amina.
- Il te plaît, à ce que je vois.
- On dirait bien. Tu sais, je l'ai même invité chez moi pour dîner un soir, et il était venu accompagné de Ilyan. Ils formaient un duo si charmant, tu n'imagines même pas.
- Fatma est amoureuse, plaisanta Amina.
- Oui, et au moins, je l'assume pleinement.

La Chanson Du SouvenirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant