Chapitre I

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"Une couronne, une barre de prétention ornée d'orgueil dans tant de matérialisme" - Christopher Jacky

Comme un phare dans la nuit, elle resplendit, se nourrissant de la lumière de la pièce et la rediffusant avec violence. Les yeux mi-clos, j'essaye de distinguer le décor autour de moi, mais la vive lumière effraye mes pupilles rougeoyantes.

D'un coup, elle cesse de brûler mon crâne et prend une jolie couleur flamme. Mes yeux suivent le mouvement et d'un seul coup, sans que j'en sois consciente, mes ailes s'ouvrent dans mon dos. Argentées, aussi tranchantes que des lames de rasoir, reflétant la couleur mordorée de la couronne, elles sont plus belles que jamais.

Je baisse les yeux sur ma tenue, qui n'a pas changé depuis que mon père s'est volontairement sacrifié pour sauver son petit frère. Mes poignets sont recouverts de gants en kevlars, afin que je puisse protéger mes mains des balles et mieux manier mes lames angéliques. Comme pour beaucoup d'anges, j'ai également le droit d'avoir mon nom inscrit sur ces katanas.

Je suis donc toujours en tenue de combat et je gratte avec lassitude le sang séché qui est resté sur mon haut.

Puis, fatiguée de devoir porter cela, je retire ma protection en kevlar et me retrouve donc en t-shirt noir simple, à bretelle, propre. J'enlève mes gantelets également, les posant sur le bureau. Mes ailes toujours ouvertes, je me tourne vers les immenses baies vitrées et observe avec nostalgie l'Enfer.

Hier encore, j'observais le paysage avec mon père, nous nous moquions allégrement du manque de vie, trouvions cela paradoxal. Un mince sourire vient se plaquer sur mes lèvres avant que quelqu'un ne toque à la porte, brisant le cocon de silence dans lequel je m'étais enfermée depuis une vingtaine de minutes.

L'ancien bureau de mon père, désormais devenu mien, me semble moins pénible à admirer qu'il y a quelques minutes, comme si la couronne comblait le trou béant que son départ a laissé dans mon cœur. Un nouveau coup sur la porte fait légèrement trembler les murs, ce qui me force à m'approcher pour ouvrir ladite porte.

- Votre Majesté, vos sujets attendent. Il faut que vous leur disiez quelque chose, vous avez été silencieuse depuis votre retour. Les Démons sont inquiets, votre Grâce, explique le Démon qui m'a conduit ici.

Je braque sur lui mon regard enflammé, non pour lui faire peur, mais pour lui faire comprendre qu'il ne peut pas débarquer dans ce bureau comme dans un moulin. Même sous le règne de mon père, personne n'entrait sans auparavant toquer et se présenter.

Ce qui me fait penser que je ne connais même pas le nom de ce démon, qui semble être une sorte de valet. Qui plus est, ses paroles sont un mensonge éhonté et il n'essaye même pas de le déguiser. Les Démons ne sont pas inquiets, ils sont furieux. Je sais pertinemment que mon règne est plus que controversé, puisque j'ai des faiblesses angéliques, que les Démons n'apprécient guère.

Lucifer était un Archange mais il a su gagner leurs cœurs. Je ne voyais pas l'intérêt d'en faire de même, puisque mes chances de règne étaient infiniment faibles, mon père étant immortel... Ou du moins, je le pensais. J'ai été entraînée pour être une meurtrière. Un monstre, pas une Reine. Ça, ma mère s'en est occupée.

Les Démons le savent pertinemment. Je sais tuer, mais pas gouverner un royaume aussi vaste que l'Enfer. Et je suis prête à parier que les Démons fonceront dans toutes les failles que je laisserai apparaître.

- Évidemment. Dois-je improviser un discours ou y a-t-il quelque chose de pré écrit ? Demandé-je.

D'un geste maladroit, le jeune démon me tend une liasse de feuilles -composée d'au-moins quatre feuilles- sur laquelle est griffonné un discours. Je fais de mon mieux pour rester impassible tout en lisant ce fouillis, mais aucune des idées exprimées ici ne me ressemblent.

Les Chroniques d'Idan (tome 2) : La Première ReineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant