The Cancerous and the Vampire

-XIX- Aaron [Réécrit]

La dinde est entrain de cuire, pendant que j'aide As à mettre la table. En cette soirée de Thanksgiving, Astrid reçoit la famille Crimson. Nos deux familles s'invitent mutuellement depuis toujours, depuis que j'ai rencontré Elias dans la cour de l'école primaire. Mais pour la première fois, je n'en ferais pas partie. Ma soirée est réservée à Amy.

Prenant une pile d'assiette que je m'apprête à étaler sur la table ronde, mes bras commencent à faiblir. J'ai de moins en moins de force en ce moment. Je me dépêche d'aller dans la salle à manger et de poser la pile avant qu'il y est de la casse. J'ai réussi, je l'ai échappé belle, mais plus question pour moi de porter quoi que ce soit, ou alors ce sera une cuillère.

Astrid, comprenant ce qu'il vient de se passer, me confie la cuisson de la viande, rien de bien compliqué. Je regardais la dinde rôtir dans le four depuis vingt minutes quand on sonna à la porte.  Les Crimson débarquent dans le salon. Tom accroche difficilement son petit par-dessus rouge au porte-manteau quand j'arrive pour les saluer.

- Hey ! Bonsoir tout le monde, leur dis-je en distribuant les bises, vous pouvez vous installer dans le salon, Astrid arrive dans deux secondes. Quant à moi, je vais vous laisser, j'ai rendez-vous avec Amy.

En partant, je n'oublie pas de dire au revoir à As :

- Passe une bonnes soirée, je crois que la dinde est prête.

Le trajet jusqu'au manoir s'annonce difficile. Dehors, le vent s'agite comme si une tempête allait arriver, aiguisé tel un rasoir. De petits flocons de neige volent dans  le ciel, en cette fin de Novembre. Et pour couronner le tout, je sens déjà les prémices d'un nouveau symptôme arrivé. Cette putain de tumeur ne me laissera donc aucun moment de répit, même le soir de Thanksgiving...

Sur ma route, je passe devant La Maison Noire, sans le vouloir. J'aurais dû l'éviter, la contourner, je suis vraiment stupide. Dès que mes yeux l'aperçoivent, une envie merdeuse refait surface. Bien que je sois toujours sous Subutex, je ressens ce sentiment qui ne m'étais pas venu depuis des lustres.  Cette soif de drogue, d'héroïne. Comme si mon organisme en avait assez de cette drogue de substitution et voulez revoir sa douce héroïne. Hors de question que je cède. Accélérant le pas, je regarde droit devant moi et continu ma route.

Dans la dernière ligne droite avant Amy, mon crâne commence à s'échauffer. Je ne cesse d'avoir mal jour et nuit, ce que je supporte plutôt bien, mais quand il m'élance comme ça, je sais déjà que c'est foutu. J'essaye d'avancer encore quelques mètres, le plus vite possible, mais mes jambes ne m'amènent pas très loin. Ma tête surchauffe, j'ai l'impression qu'elle va exploser. C'en est trop, je ne peut pas continuer. Je m'arrête, m'assis le long d'un mur dans la rue, sur une fine couche de neige. Les jambes repliées contre mon torse, le front sur les genoux et les yeux clos, j'attends que ça passe. Amy attendra...

Mes mains commence à devenir bleue, je devrais repartir, mais je ne peux pas. La douleur qui me fracasse le crâne est plus forte que moi. J'essaye tant bien que mal de me relever. Je suis couvert de neige, et je n'ai aucune idée de combien de temps je suis resté comme ça. Je regarde alors mon portable, j'ai deux appels en absence de Amy. Je relève la tête pour l'appeler, quand je l'aperçois à  deux cent mètres droit devant. Je  crois qu'elle me fait signe de la main, mais avec la neige qui augmente de plus en plus, je la vois très mal.

Elle arrive enfin, ses cheveux sous un bonnet et emmitouflée dans sa grosse écharpe en laine. Elle sent la cannelle, elle a dû se mettre du parfum. Elle me parle, mais je n'écoute pas. La seule chose que j'entends, ce sont les acouphènes dans mes oreilles, et le battement dans mon crâne. Elle m'embrasse alors, doucement, tendrement, jusqu'à ce que l'air dans nos poumons manque à l'appel.