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Le matin, c'était un peu moins difficile. La maison se réveillait ce qui lui permettait de se sentir moins seul, juste un peu moins.

Onze mois auparavant, il n'était pas comme ça. Il avait des amis avec qui il pouvait partager ses journées, et aussi, il pouvait parler. Son cerveau n'avait pas ce blocage qui l'avait complètement enfermé dans un enfer.

Mais un jour, un soir d'hiver, sa vie a basculé tout simplement. Un traumatisme, c'est ce que répétaient les psychologues. « ce n'est que passager »
Si tout cela n'était que passager, pourquoi, onze mois plus tard n'arrivait-il toujours pas à vivre comme tout le monde ? Pourquoi avait-il ce blocage qu'il l'empêchait de parler ?

Parfois, il prononçait une phrase, comme ça, mais il n'en faisait pas plus.

Il ne ressentait plus le besoin de se confier ou de rire ; non, il commençait à aimer sa vie silencieuse.

Un jour, alors qu'il était seul chez lui, en se regardant dans le miroir de la petite salle de bain, il avait prononcé un mot : pardon.

Pourquoi s'excusait-il ?

Envers qui ?

C'était trop difficile pour le révéler.

Parmi son reflet dans la glace, il voyait les images qui l'avaient rendu si seul.

Entre ses yeux bleus, il revoyait la pluie, puis la voiture rouge, et tout se recollait et reprenait vie.

À travers sa peau pâle, il ressentait le froid de l'hiver et les gouttes d'eau sur son manteau.

Dans ses petites oreilles, il entendait les grincements de pneus, puis le verre cassé, la tôle froissée et enfin, le bruit sourd de l'impact.

À l'intérieur de ses poumons, il pouvait sentir la fumée que dégageait la voiture. Cette fumée lui coupait la respiration.

Dans son cerveau, ce fut un chamboulement, une explosion.

Comme chaque matin, sa mère venait frapper à la porte de sa chambre pour le réveiller, mais c'était déjà fait. À vrai dire, il ne trouvait plus le sommeil depuis.
Au fond d'elle, sa mère espérait qu'il serait endormi et qu'elle passerait ses doigts entre sa chevelure brune pour le sortir de ses rêves. Elle voulait l'entendre prononcer un « bonjour » ou même « laisse-moi dormir » ; elle voulait juste l'entendre, pour qu'elle sache qu'il était toujours là.

La réalité était qu'il était assis sur son lit, le regard accroché par le mur où étaient accrochés des posters de groupes de rock, encore en pyjama.
Pour être sûre qu'il l'entendait, sa mère prononçait toujours le même mot en ouvrant la porte :

- Nathan ?

Il hochait simplement la tête et elle partait.

C'était devenu un nouveau rituel. Le monde vivait, Nathan sombrait.

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ᴇᴄʟɪᴘꜱᴇOù les histoires vivent. Découvrez maintenant