Kuro

72 7 0
                                    

Ça y est !
Je l'avais fait !

J'avais invité Len Aishi, 16 ans, à venir chez moi pour discuter d'une relation potentiellement amoureuse, dans un lieux potentiellement propice aux contacts très très rapprochés, avec un garçon potentiellement capable de me faire rougir bégayer et de réveiller chez moi le monstre sentimental pathétique.

Je l'attendais avec impatience dans ma chambre, m'assurais que la pièce était bien propre, le lit assez confortable, et je vérifiais même pour des draps supplémentaires, au cas où la nuit se ferait plus longue. - Je n'arrivais pas à croire que je puisse penser ça.-

Je repassais en boucle devant le tiroir contenant les lames de rasoir, les morceaux de verres et le cutter abîmé. Je ne savais plus quoi en penser. Aujourd'hui, je ne m'étais pas senti mal. Ça faisait tellement longtemps. Tellement que j'en avais oublié ce sentiment.

Ce vide, non pas crevasse, froid et terne. Un vide plutôt apaisant, comme un océan après la tempête, un vide d'idées noires, une trêve à ce combat sempiternel contre les pensées auto-critique. Je regardais autour de moi, et tout semblait flotter, et même si mes pieds étaient bel et bien fixés au sol, que toute ma réalité restait présente, je voyais la vie d'un angle un peu plus meilleur.

Je me disais " Tant pis." devant pas mal de choses, et le peu de choses qui m'importait se volatilisait de mon esprit à la minute où son prénom revenait en tête.

Len.

C'était beau comme prénom. Ça glissait sur les lèvres, ça frappait de colère, tremblait de tristesse. C'était original, tant par sa beauté que par sa provenance asiatique. - Comme le mien.- C'était FORCÉMENT un signe que nos deux familles, détruites, nous avaient baptisé d'un prénom asiatique.

Mais après, je revenais sur ce tiroir, et mon sourire idiot disparaissait.

Est-ce que j'allais de nouveau toucher à ça ?

Ce n'était pas vraiment la bonne question à se poser.

- Yoo~. Clama Maxence dans le micro.

- Salut.

La véritable question à se poser, lorsqu'un tiroir rempli de lames de rasoir et de tous autres objets contondants déjà utilisés existait dans votre vie, c'était simplement : Pourquoi j'arrêterais ?

Est-ce que j'étais vraiment prêt à oublier ce quotidien quelque peu bancale ?
Est-ce que j'étais capable de me séparer de ça ?
Est-ce que j'avais les ressources nécessaires ?
Voulais-je vraiment devenir autre chose ?

- Alors, depuis que nous nous retrouvons par Skype, avec un merveilleux réseau à la con, j'ai l'impression que nous nous sommes rapprochés toi et moi, dit Maxence.

- C'est effectivement la bonne chose à dire, alors que n'importe qui pourrait venir nous butter.

- Ce n'est qu'un jeu. Moi personnellement, j'aurais fabriqué un grenier et je me serrais terré jusqu'à ce que cette voix qui nous à tous manipulé déclare : Top 1.

- Moi, je n'aurais pas été manipulé.

Maxence et moi, ça partait d'un voisin de table en Sciences et en Maths, puis d'un groupe un peu trop dispersé jusqu'à une marche chaque matin en sa compagnie, et d'échanges Skype sur des jeux vidéos. Bien souvent, Maxence partait d'une bonne attention à vouloir me faire dévoiler des choses, néanmoins ça retombait sur du n'importe quoi. Et ça depuis quelques semaines seulement.

- Toi, tu aurais été le gars le plus manipulé de nous tous. Toi tu serais nu, avec seule protection des gilets par balles, dont un accroché aux couilles, et tu défoncerais tout sur ton passage juste pour obéir à la voix.

Je suis malade ( de vivre )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant