Len

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- Je ne pense pas que ce soit une bonne idée.

- Viens. Tu commences à me faire pitié.

- Non, je ne pense vraiment pas que-...

Je lui pris son bras par la force, et Kuro se retrouva la tête la première dans son lit, les fesses en l'air et les bras écartés.

- Ouch..

- Je t'avais dit de venir.

Je ris légèrement, et Kuro se releva sous mon regard amusé, l'air véritablement peu serein.

Avais-je fait un mauvais choix ? Je savais très bien que j'étais la personne la moins qualifié pour prendre des décisions.

Je voulais juste qu'il soit près de moi cette nuit.

La nuit dernière avait été bien trop mouvementée.

Une fois rentré de l'entretien avec ma mère, je n'avais pu me retirer cette histoire de la tête.

Je m'étais fait battre par mon père, ma mère l'avait fuit, Meiko nous avait sauvé.

Ce scénario m'inconfortait, mais il ne pouvait qu'être une vérité. Une vérité étouffante, écrasante, accablante, capable de m'empêcher de dormir ou de penser, il n'y avait que des souvenirs hypothétiques, des images, qui s'ammassaient dans mon esprit pour imaginer le pire.

Je détestais l'imagination.

Qu'avait-il pu me faire ?
Qu'avait-il pu faire à ma mère ou à ma soeur ?

Mon corps me démengeait, la panique s'emparait de mes membres qui un par un devenaient incontrôlables.

Une crise de panique.

C'était ça.

Là maintenant, hier soir, en rentrant du rendez-vous.

Je m'imaginais un père violent qui tourmentait mon corps à coups de pieds et de poings, qui tirait les cheveux de ma mère et déchirait les habits de ma soeur.

Puis je voyais le faux sourire d'une mère, tremblante et suffocante, nous conduire jusqu'à ce pavillon de l'enfer qui pourtant un jour fut un paradis.

Une Meiko acceuillante, une mère en détresse, un père dans le dénis, une soeur perdue, et moi, moi minuscule et amnésique, qui devait s'imaginer ce scénario car incapable de s'en remémorer, à répéter en boucle, encore et encore, ces images abominables.

- Len ? Je suis là. Len ? Tu entends ma voix ?

Sans vraiment le réaliser, j'étais tétanisé.

Recroquevillé comme un misérable foetus, et je pleurais en silence, la gorge nouée sans pouvoir sortir aucun son, j'étais totalement muet et pathétique, comme je l'avais toujours été dans ma vie ; n'est-ce pas ?

- Len, je suis là, ok ? Écoute ma voix, que ma voix..

Mais sa voix reflétait tant de choses. Elle reflétait ce garçon aux traits banals, ami de tous, rieur et sympathique, tout ce que je n'étais pas, tout ce qui était hors de ma portée. Et pourtant, il ne semblait n'être rien de ce garçon populaire et souriant qu'il se donnait.

Quelque part, j'aurais voulu qu'il soit réellement ce garçon banal que je détestais par dégoût, et jalousie. J'aurais voulu que ce sourire, si épatant, ne perde jamais de son éclat. Qu'il ne connaisse ni souffrance, ni déception, mais ce n'était pas possible.

Je venais de comprendre cette passion maternelle de ma mère.

L'amour à en perdre la raison.

Je suis malade ( de vivre )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant