Kuro

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Nous étions dans le bus, assis l'un à côté de l'autre. 

Il n'y avait pas grand monde, un petit vieux au béret à l'avant, et une jeune fille enfoncée dans son siège, casque sur les oreilles.

Len perdait son regard au sol, embarrassé de son propre comportement.

Quelques minutes plus tôt, il avait évoqué un " nous deux ".

À moi aussi, ça me paraissait encore gênant et débile de nous considérer comme un couple, deux entités dépendantes l'une de l'autre.

Je ne réfléchissais pas vraiment au fait d'aimer un garçon, d'être en quelque sorte homosexuel, ou bisexuel.

La seule chose qui me préoccupait l'esprit, c'était d'aimer une personne malade, souffrante.

La seule chose qui m'importait était nos moments d'intimité, nos conversations douloureuses ou rieuses.

Je ne voyais pas en Len la peur d'assumer une nouvelle sexualité, j'y voyais la chance d'être heureux.

Et c'était la seule chose qui comptait désormais à nos yeux.

- Ce qu'il s'est passé la dernière fois, donc. Je marquai un blanc. Cette situation ne me convenait pas, commençai-je.

- C'est à dire ?

Len me regarda, circonspect.

- J'avais la sensation de ne pas être à ma place. De devenir ce que je ne suis pas.

- Ça ne semble pas si négatif que tu le prétends. Vu comment tu te décris.

Il posa sa main sur la mienne.

- Léa et Karl me l'ont assez fait savoir que je ne pouvais pas débarquer dans ta vie, faire des changements comme bon me semble et repartir en abandonnant tout derrière. J'étais persuadé de ne pas pouvoir jouer le rôle du héros, parce que je ne suis pas quelqu'un sur qui compter.

- Et maintenant ? Sa voix devenu plus froide.

- Maintenant je vois des choses qui me persuadent le contraire. Je ne suis pas forcément un héros, mais suis-je donc inutile ? J'aimerais que tu me dises que non..

- Non.

Je ris à sa fermeté.

- Je doute beaucoup sur mes capacités à être un bon.. petit voilà, à réussir mon BAC qui est dans quelques semaines, je pense tellement a pleins de trucs, j'ai eu peur, ce jour-là. Peur de ne pas être à une place qui me correspond.

Un silence s'installa. Ce foutu silence si représentatif de notre relation. Je ne savais plus l'aimer, ou même le détester.

- C'est à toi de décider la place que tu veux avoir Kuro.

Son regard fut l'un des plus doux qu'il ne m'avait jamais montré. Il commençait à ressentir de la compassion, mais pour tout dire, ça ne lui allait pas.

- Je ne sais pas ce dont je suis capable. Je ne comprends plus, tout s'emmêle dans ma tête, un coup je me sens comme la plus grande des merdes et un coup je me dis que j'arrive à rendre les gens heureux.

- T'es peut être les deux.

J'avais retrouvé mon amoureux.

- Sûrement ouais.

On arriva à destination, je fis un signe de tête à Len, il comprit et nous descendirent du bus, avec encore quelques mètres de marche.

- Et moi, quelle est ma place ? Demanda Len.

Je suis malade ( de vivre )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant