Chapitre 13: Dimena

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Une confrontation douloureuse.

Le silence régnait d'une manière ostensible au sein du village, sous le couvert d'une douce clarté de pleine lune rassurante et réconfortante, dans un ciel étoilé dénudé de son habituel manteau de nuages. L'aura bleutée de la nuit n'avait pour une fois rien d'inquiétant ni de trompeur. Pour la saison, cette nuit-là relevait entièrement du miracle, mais le cœur n'était pas à ce genre de réjouissance futile. Une atmosphère lugubre et froide, à couper au couteau, régnait au cœur des maisons. Et à l'intérieur de la maison Castelbois sévissait une ambiance sulfureuse palpable, une tension désagréable et manifeste des tourments intérieurs de ses occupants.

Le dîner n'avait pas encore commencé, mais tous hormis Morna, qui s'affairait encore à la préparation du repas, étaient déjà attablés. Un lourd silence planait au-dessus des êtres, les enveloppant comme une couverture jusqu'à les étouffer. Un feu flambait joyeusement dans l'âtre, léchant avec avidité des bûches crépitantes qui se consumaient en une douleur sourde. La chaleur qu'elles prodiguaient en brûlant avait quelque chose de sirupeux, de collant. La pièce était plongée dans une clarté dansante et orangée, artificielle et mystérieuse, mystique. On voyait des ombres provenant de partout et de nulle part à la fois entamer une danse endiablée sur le visage de la famille Castelbois, immobile et silencieuse après les aveux de la fille aînée.

Dimena regarda discrètement le visage de son père qui, les mains croisées au niveau de sa bouche, analysait les paroles d'Assylana. La jeune fille s'évertua à lire ce visage grave et silencieux avec plus de minutie, cherchant des éléments qui la mettraient sur la voie pour savoir ce qu'il pensait. En vain. Quant à sa sœur, elle paraissait craindre ce qu'il allait dire – habitude, sans doute. Mais, de la même façon qu'elle semblait déjà savoir que les remontrances fuseraient vers elle comme l'éclair, elle paraissait s'y être plus ou moins préparée. Il était impossible de savoir avec exactitude quelle serait la réaction de Luthan, car même sans être réellement imprévisible, il était l'une des personnes les moins faciles à déchiffrer, et ce même après des années passées à le côtoyer.

— Donc vous êtes en train de dire qu'en échange de votre vie, Thranduil a doublé les taxes et réduit le temps pour les payer, est-ce bien ça ? demanda posément Luthan.

— Je ne pense pas que qualifier cela « d'échange » soit le terme approprié, rétorqua Assylana avec un rictus amer, en essayant de camoufler tant bien que mal sa gêne sous un calme et une maîtrise de soi factices. Mais c'est en effet ce que nous sommes en train de dire.

— Avez conscience de ce que cela sous-entend ? enchaîna l'homme d'une voix trop posée pour être authentique.

— Plus que tu ne le crois, répondit la jeune femme avec sérieux.

La main qui s'abattit avec violence sur la table en faisant trembler toute la vaisselle fut si inattendue que tous sursautèrent violemment. Un verre se brisa en un bruit creux en touchant le sol, mais personne n'osa lui accorder une once d'attention. Trop risqué. Tous retinrent leur souffle, les yeux baissés, afin de ne pas attirer le regard noir du père de famille, et même le feu parut chercher à faire moins de bruit. Luthan, les sourcils froncés et le visage déformé par la colère, se leva brusquement en pointant un doigt accusateur vers sa fille.

— Arrête ça ! Ce n'est pas un jeu Assylana ! tonna-t-il d'une voix dure.

— Comme si je ne le savais pas ! cracha-t-elle avec la même violence, en se levant à son tour. Comme si je n'en avais pas conscience !

— Ne prends pas ce ton avec moi, cela va bien plus loin qu'une stupide histoire de taxe ! s'emporta Luthan. Ne crois-tu pas que dès que les gens entendront l'annonce, ils ne chercheront pas à se venger, à chercher à coupable à tout ceci ?! Et, ô miracle, ce coupable a déjà un nom ! Il en a même deux.

Prisonnière des bois [SDA] - TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant