Chapitre 21: Legolas

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Message implicite.

— Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, Méridiel, avança Legolas en esquissant une grimace. De plus, vous êtes l'invitée du Roi, vous n'avez pas à faire tout ceci pour nous.

— Quand bien même suis-je l'invitée du Roi, je suis avant tout maîtresse de ma propre vie, rétorqua Méridiel les lèvres pincées et les mains sur les hanches. Je ne dépends pas de votre royaume, et quand bien même suis-je censée respecter l'autorité de son monarque, je suis certaine que votre père ne me refusera pas cette requête. Ne faites pas semblant, Legolas. Vous avez besoin de moi dans vos rangs. C'est plus qu'une évidence.

Le prince ne put réprimer le soupir qui s'échappa de ses lèvres par mégarde. S'ils avaient certes besoin de tous les volontaires possibles pour former des escouades dignes de ce nom et repousser l'inébranlable assaillant, l'idée de mettre en danger une invitée et qui plus est une amie n'était pas pour lui plaire. Or la jeune elleth avait l'air de tenir bon, et férocement bon même. Il ne serait sans doute pas chose aisée de lui faire entendre raison et de la forcer à demeurer en sécurité au sein de ses quartiers. Legolas vit presque le pour et le contre se peser devant ses yeux. Il réalisa qu'il se donnait lui-même du fil à retordre, car après tout, Méridiel avait arpenté la Terre du Milieu seule depuis des années, elle avait forcément dû rencontrer un impondérable au moins une fois qui avait nécessité qu'elle prenne l'arc ou l'épée.

Les dénivelés de la région non plus n'étaient pas sans receler d'une bonne dose d'adrénaline pour quiconque s'évertuait à voyager seul avec l'esprit s'estimant en paix. En outre, les forêts environnantes foisonnaient de bêtes sauvages pour la plupart affamées. La vie n'était pas rude à proprement parlé, mais il fallait s'accrocher et ouvrir l'œil – et le bon. Il avisa un regard curieux vers son interlocutrice qui n'avait pas bronché, qui continuait de darder vers lui un regard pressant. Il fallait qu'il se prononce.

—Êtes-vous certaine de pouvoir vous en sortir ? Nous n'avons pas le temps d'assurer nos arrières et celles de nos compagnons, jugea bon de préciser Legolas en accentuant bien ses propos.

— Combien de fois vais-je devoir m'évertuer à vous le répéter ? s'impatienta l'elleth. Faites-moi confiance. Qu'est-ce qu'il faut que je fasse pour que vous soyez rassuré ?

— Survivez cette nuit, lâcha Legolas, capitulant. Et je vous jure sur ce que j'ai de plus cher que je ne nourrirai plus aucun doute sur vos capacités de combattante.

— Elles existent Legolas, croyez-moi, ajouta Médiriel avec un sourire.

— Je verrai cela. Préparez-vous, en tant que première escouade nous partons plus tôt cette nuit. Il faut prendre le ciel de court avant qu'il ne se remette à pleuvoir.

— Parfait. Je serai prête.

Elle le salua et s'en alla d'une démarche enthousiaste, visiblement ravie d'être parvenue à ses fins sans trop se donner du mal. Legolas ne sut s'il avait bien fait d'accepter, mais quelque chose en lui lui laissait entendre que Méridiel se serait quand même débrouillée pour les aider d'une manière ou d'une autre. Elle était une personne qui n'abandonnait jamais lorsqu'elle avait une idée en tête, campant férocement sur ses positions avec autant de détermination qu'un chef de guerre fait maintenir un siège. Elle était une personne redoutable sur certains points, voire presque à craindre d'une certaine façon. Mieux valait l'avoir de son côté.

Plus tard, ils se retrouvèrent dans la salle principale, attendant que le reste du groupe se rassemble. Les elfes étaient séparés les uns des autres, certains bavardaient entre eux tandis que d'autres vérifiaient leur attirail. La prudence était le mot d'ordre, ils n'auraient pas l'occasion sur le terrain d'emprunter une arme à un allié. Legolas nota que Méridiel n'était pas déroutée d'être la seule femme dans les rangs ; elle s'assit à une table, croisa les jambes et attendit avec patience le moment de partir. Le prince vint s'asseoir à ses côtés mais ils n'échangèrent aucun mot. Comme avant chaque expédition, les elfes étaient tendus. Ils craignaient sans cesse de perdre un des leurs, comme cela arrivait parfois, et ce n'était que trop compréhensible. Les araignées s'enhardissaient dangereusement et la platitude sinon la morosité de la routine affectait le moral des troupes comme une gangrène incurable. Même les plus forts avaient leurs limites.

Prisonnière des bois [SDA] - TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant