Chapitre 25: Assylana

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Le sens de la vie.

La qualité du service laissait sérieusement à désirer.

Assylana déambulait entre les tables avec un visage si froid que les clients sentaient leurs poils se hérisser quand la jeune femme daignait poser les yeux sur eux. L'ambiance était des moins chaleureuses à la taverne, et s'il y en avait eu une autre dans le village, il y avait fort à parier que tous ces gens s'y seraient déjà précipités pour ne pas avoir à endurer les regards glacés de la serveuse. Celle-ci, depuis un jour, était tel du marbre, ne répondant plus que par des réponses laconiques aux questions qu'on lui posait, par un mot voire simplement un hochement de tête. Assylana était déterminée à faire de cette journée-ci une exacte copie de la précédente.

En déposant une choppe sur la table d'un malheureux qui eut à essuyer un regard sec et un silence de mort lorsqu'il la remercia, la serveuse ne s'était pas attendue à devoir confronter le propriétaire des lieux. Celui lui toucha le coude à deux doigts et lui fit comprendre d'un long regard appuyé et d'une brève pression qu'ils devaient avoir un entretien sur le champ. S'assurant que personne ne la réclamerait dans les prochaines minutes, Assylana suivit docilement son patron sans faire la moindre remarque, sans trahir la moindre émotion. Florent lui prit le plateau des mains, le jeta sur le comptoir sans même regarder celui-ci et conduisit son employée au-dehors. Là, la température était suffisamment fraîche pour qu'Assylana se sente obliger de se tenir les bras à deux mains et que des frissons recouvrent son corps entier. La jeune femme se frictionna doucement sans craindre la remontrance qu'elle aurait à essuyer – là-dessus, elle ne se faisait pas d'illusion.

— Si tu continues à jeter à ma clientèle un regard aussi intimidant, gamine, je n'aurais pas d'autre choix que celui de me débarrasser de toi. J'espère que tu comprends où je veux en venir, lança le tavernier en toute franchise.

— Je ne suis plus une gamine depuis belle lurette, et je ne vois pas de quoi tu parles, répondit la serveuse en lui jetant le même regard que celui qu'elle servait aux autres. Ce regard est celui que j'ai d'ordinaire. J'ai déjà changé mes habitudes pour correspondre aux vôtres, je ne vais pas en plus changer ma façon d'être car celle-ci ne plaît pas à tout le monde.

— Ecoute Assylana, fit Florent en s'adoucissant, essayant surtout de conserver son calme, je peux comprendre que tout ceci soit difficile pour toi. Mais tu t'en sors bien, tu n'as pas besoin de te montrer désobligeante. Ce n'est pas une attitude qui sied à une jeune femme.

— Rien de ce que je fais ou ai fait ne sied à une jeune femme.

— Et tu vois où ça nous a conduit ? rétorqua doucement l'homme en accompagnant sa question d'un sourire d'apparence condescendant. Soigne-toi petite, et trouve un époux. Il n'est pas trop tard. Tu es encore jeune et belle mais tu ne le seras pas éternellement, tu devrais songer à fonder une famille avant que ce ne soit plus possible.

— Personne ne veut de moi ici, pas après ce que j'ai fait. Et je ne veux pas fonder de famille, je ne veux pas que... que d'autres aient à endurer ça. (Elle désigna l'ensemble du village d'un mouvement dédaigneux de la tête). Plus personne ne souffrira de ça après moi.

— Tu es donc au courant ?

— Depuis hier seulement.

— Je comprends mieux pourquoi tu tires une tête pareille, même si cela ne t'excuse pas.

Assylana se demanda avec un brin de colère et de frustration comme cela était possible que tout le monde soit au courant de sa propre histoire de famille alors qu'elle-même n'en avait jamais rien su avant la veille. Quand bien même ne passait-elle pas le plus clair de son temps à prêter l'oreille aux rumeurs de ses voisins, ce n'était pas le genre de chose que l'on pouvait décemment ignorer. Même un sujet tabou finissait par être évoqué à un moment ou un autre...

Prisonnière des bois [SDA] - TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant