Chapitre 20: Assylana

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Message codé

Lorsqu'elle avait vu son frère brandir l'arc de Legolas, Assylana avait senti son cœur rater un battement. Elle hésitait entre ressentir une colère égale à celle de Doran pour son intrusion et une peur incommensurable face à ce qu'il pourrait faire à la suite de sa découverte. Elle n'était pas sans savoir que son impulsivité le conduisait aux pires excès, à de dangereuses folies. Au final, la peur se combina à la colère sans même qu'elle ne s'en rende compte, tel un instinct primaire que pouvait ressentir toute créature à l'approche imminente d'un danger.

— Doran, tu fouilles dans mes affaires ?! s'indigna Assylana en s'empressant de lui arracher l'arme des mains, un regard lourd de reproches. Pour ta gouverne, je ne t'ai pas permis d'entrer dans ma chambre ni de mener à loisir tes recherches ! Tu n'as strictement rien à faire ici !

— Assylana, c'est un arc d'elfe ! rétorqua le jeune homme en se relevant, outré.

— Qu'il soit elfique ou non, cet arc me permet de chasser. Cet arc te permet de manger, Doran ! Ne va pas commencer à faire comme Dimena, et à me dire que je ne prends pas la bonne décision ! Je sais ce que je fais !

La jeune femme commençait sérieusement à ne plus supporter les constants reproches qu'on lui faisait et le manque de confiance que manifestaient ses proches à son égard. Elle se surprit à remercier de ciel d'avoir éclaté cette nuit, couvrant ainsi leurs cris du reste de la famille. Mais ce mauvais temps était bien loin d'égaler l'ouragan qui prenait vie en elle, qui égalait en tout point une mer enragée, des flots déchaînés, un cheval fougueux.

— Je ne te juge pas pour ce que tu fais, mais avec quoi tu le fais ! reprit le jeune homme en enjambant le matelas pour se planter devant sa sœur. Je me fiche éperdument que tu sois retournée dans la forêt... Mais Assylana, bon sang, enchaîna-t-il en la prenant par les épaules, la secouant vivement comme pour lui faire reprendre conscience, ce sont les elfes qui ont failli nous tuer et toi, toi tu chasses avec un arc d'elfe ! Ces êtres-là ne nous veulent pas du bien, sœurette. Ils nourrissent pour nous une haine qui n'a pas de limite, ils veulent nous voir loin sinon morts. Ne prends pas le risque d'aller te faire tuer parce que tu en as cru en un espoir qui n'existait pas...

Sa colère s'envola d'un seul coup sous l'effet de la consternation et de la surprise. Assylana ne sut que répondre à cela et tressaillit malgré elle. Les mots qu'employait son frère sonnaient comme ceux d'une langue oubliée. L'espoir. Une notion devenue trop vague à ses yeux. Depuis combien de temps n'avait-elle plus cru en rien sinon en elle-même ? Elle n'avait accordé aucun crédit au pacte de confiance de Legolas, ayant jugé que celui-ci l'avait proposé uniquement pour se montrer aimable, sympathique ou simplement sous le feu de la pitié. Mais cela, c'était avant de découvrir la veille qu'un arc qui n'était pas le sien avait été déposé à son intention dans la forêt. Il n'avait pu être oublié ; personne ne venait jusqu'ici.

Cette attention avait ébranlé ses convictions jusqu'au plus profond d'elle-même, réduisant à néant ce qu'elle croyait savoir depuis la moitié de son existence. Elle avait encore du mal à se figurer que tous les elfes ne leur voulaient pas nécessairement du mal, et même loin de là. La jeune femme peinait encore à assimiler cet état de fait et à se souvenir des sensations qu'engendrait le fait de croire en quelqu'un d'autre qu'en soi-même. Et pourtant elle ne pouvait plus que se fier à Legolas désormais, et ce malgré elle.

—Ne commets pas l'erreur de croire en eux, s'il te plaît, supplia le jeune homme.

— Je ne crois pas en eux, je crois en moi. En mes capacités, rétorqua la jeune femme en se dégageant de son étreinte, tâchant vainement de toujours paraître énervée. Je vous demande rien, et je vous ai jamais rien demandé sinon de me faire confiance et de me laisser faire. Et cela ne devrait pas changer. Pourquoi cela devrai-il, après tout ?

Prisonnière des bois [SDA] - TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant