CHAPITRE 26

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Les jours se sont enchaînés

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Les jours se sont enchaînés. Gabrielle n'a pas vu Antoine depuis plus d'une semaine. Et dire que cela fait plus de trois mois qu'ils se connaissent. Qui aurait pu imaginer qu'il deviendrait aussi important pour elle ? Personne. Pas même eux. En entrant dans ce centre, elle n'avait en tête que sa rééducation, et puis, ses yeux ont rencontré les pastilles bleutées d'Antoine et tout à changé. Heureusement qu'il était là-bas, elle a perdu sa passion, sa raison de vivre, et il lui en a donné une autre. Il l'a sauvé, sans le savoir, sans le prévoir.

Aujourd'hui, le temps est maussade. Le gris du ciel semble déteindre sur les gens et sur Gabrielle. Malgré la météo, elle a décidé de se balader. Instinctivement, ses pas l'ont mène vers un terrain de course. Peu importe le temps, les vrais champions s'entraînent. A une époque, elle aurait pu courir sous la neige tellement un entraînement était sacré à ses yeux.

Avec un pincement au cœur, elle découvre deux jeunes femmes qui courent. Elles font du relais. Pas totalement son quatre cents mètre mais tout de même. L'envie se voit dans son regard, les pores de sa peau transpire d'envie de courir. Mais elle ne peut pas. Tout ça c'est fini. Ce n'est plus pour elle. A cet instant où le désir la grignote de l'intérieur, elle aimerait qu'il soit là. Antoine. Elle aimerait qu'il ne soit pas en pleine compétition. Elle voudrait qu'il la serre contre elle. Comment font les femmes de footballeur pour supporter ces absences ? Comment font-elles pour que le cœur se ne brise pas ?

Lentement, elle se laisse glisser sur grillage métallique, tournant ainsi le dos à ces filles qui peuvent encore jouir de leur passion. Tournant le dos à sa propre passion. 

« - Je suis heureux d'entendre ta voie, murmure Antoine au téléphone

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« - Je suis heureux d'entendre ta voie, murmure Antoine au téléphone.
- Moi aussi, ça commençait à faire long...
- Je suis désolé, comme le match approche, on s'est entraîner non stop et le soir en rentrant j'étais tellement épuisé que je tombais de fatigue.
- Tu es stressé ? Gabrielle demande.
- Un peu. Mais beaucoup moins que pour les premiers matchs... 
- Je suis tellement contente pour toi. »

Et c'est vrai. Le voir si heureux, la remplie de bonheur. Elle voudrait être avec lui à chaque instant mais dans un sens, cette coupe du monde tombe à pic. Ainsi, elle peut réfléchir à sa propre vie. Si elle avait été avec lui tout le temps, elle aurait vécu à travers lui. Même si à l'heure actuelle, elle n'a toujours aucune idée de ce qu'elle veut faire de sa vie. 

« - Comment tu vas ? Il fini par lui demander.
- La version pour tout le monde ou la vérité ? Elle soupire.
- La vérité bien sûr !
- Je suis perdue. Je n'ai aucune idée de ce que je vais faire. Je... je ne sais pas du tout...
- Est-ce que tu vas venir en Espagne une fois la coupe du monde finie ?
- J'en ai très envie mais d'un autre côté, je ne veux pas y aller juste pour te suivre et vivre à travers toi. Je dois me trouver un but.
- Je comprends, tu as une idée du domaine qui pourrait te plaire ?
- Aucune, la seule chose qui m'a toujours intéressé, c'était la course.
- Tu as déjà pensé à la photo ? Tu es très jolie ! Il s'exclame.
- Merci mais je suis très loin d'être un top modèle.
- Pas besoin, il sourit, tu as un visage d'ange. »

Elle rigole, ne le croyant pas. De toute façon, elle n'a jamais été dans l'art. C'est assez compliqué de se retrouver une vocation alors qu'elle en avait déjà une. La course était plus qu'une raison de vivre, la course c'était elle, sa vie entière tournait autour de la course. Et maintenant ? Plus rien. 

« - Tu trouveras, j'en suis sûr, il sourit. »

Gabrielle fixe son reflet dans le miroir sans se reconnaître

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Gabrielle fixe son reflet dans le miroir sans se reconnaître. Son corps commence déjà à changer. Elle perd en muscle, elle le sent, elle le voit. La fille dans la glace n'a plus rien de la grande sportive qu'elle était. Les cernes sous ses yeux bleus témoignent de la fatigue qu'elle ressent. Toutes ses questions qu'elle se pose commence sérieusement à peser sur elle. Elle baisse le regard, incapable de faire face encore une seconde à cette personne qu'elle ne reconnaît pas. Qu'elle n'aime pas. 

Elle commence à pleurer, elle s'en veut. Elle en veut à Antoine de pouvoir continuer à vivre son rêve alors que son propre corps lui a enlever le sien. Elle s'en veut de penser, terriblement. Mais alors que lui s'élève, toujours plus haut, toujours plus beau, plus fort, elle, coule, de plus en plus. Elle s'enfonce dans la noirceur d'un océan ravagé par un orage. 

Lentement, elle enlève le maquillage qui couvre son visage. Elle retire le masque qu'elle porte à longueur de journée. Le masque qu'elle porte même pour elle. Pour ne pas s'effondrer totalement. Le masque qu'elle porte lorsqu'elle parle avec son petit ami. S'il venait à savoir à quel point elle va mal, il serait capable de tout arrêter. Tout. Pour elle. 

Qu'est-on censé faire lorsque notre pire cauchemar s'avère être la réalité ? Comment est-on censé avancé quand notre seule raison de vivre vient de nous être enlevé ? Comment peut-elle encore être avec lui alors qu'une part d'elle jalouse sa réussite ? Que devient-on lorsqu'on perd ce qui fait de nous ce que nous sommes ? Comment survivre alors que l'on meure de l'intérieur ? Que faire quand le sourire qui rassure tout notre entourage n'est qu'un mirage ?

Gabrielle n'a aucune réponse. Seulement des questions. Seulement un grand vide en elle qui grandit, grandit, grandit à mesure qu'elle tombe. 

RUN [A.G]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant