Chapitre 13 : le premier Vicomte de Romèc

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Quand Adeline alla s'asseoir à la table où ses amis prenaient le souper, elle les trouva la tête baissée, mangeant sans bruit. Fred et Gloria faisaient apparemment la tête à Sage. Vanille n'était pas là et il n'y avait pas le fils du duc de Pélicia sous la table. 

-Que se passe-t-il ? demanda Adeline.

-Il se trouve que ce crétin n'en fait qu'à sa tête ! répondit Gloria en montrant Sage. On lui avait dit d'arrêter de jouer les imbéciles en faisant comme s'il te connaissait et il ne nous a même pas obéit. Pire ! Il t'a tout avoué sans notre accord !

-S'il s'était comporté sagement, continua Fred, jamais tu n'aurais deviné quoi que ce soit avant que le comte te dise que nous étions ses espions.

-Vous n'avez pas peur qu'on vous entende ? demanda Adeline en regardant les autres personnes qui mangeaient dans la pièce.

-Il y a un tel bruit que personne n'écoute les autres tables, dit Sage en haussant les épaules.

-Imagine qu'un espion du roi t'ait entendu tout révéler à Adeline ! s'exclama Gloria en abattant son poing sur son épaule.

-Mais arrête ! fit-il. Tu m'as fait mal !

-Pauvre chou... railla sa sœur. Tu l'as mérité !

-Arrêtez de vous bagarrer, dit Fred.

Adeline était bien de son avis.

-Où est Vanille ? demanda-t-elle.

-Elle vient de quitter la table, expliqua Gloria. Son père voulait la voir.

-Oh misère, fit Adeline en se levant.

-Que se passe-t-il ? demanda Fred.

Mais Adeline était déjà sortie. Elle se précipita dans l'escalier et courut à travers le couloir des invités important de Romèc. Elle s'arrêta devant une porte où le nom du Vicomte était marqué et colla son oreille à la porte.

-...et tes sœurs vont bien aussi, fit une voix grave que Adeline identifia comme étant celle du Vicomte. Marguerite vient de partir chez le comte Serge de Romèc, où tes sœurs Geneviève et Louise sont déjà. Ta mère a accouché de deux jumelles il y a une semaine : Célestine et Camilla. Sans compter la petite Julia qui es né l'année dernière et Lona qui a deux ans dont j'ai oublié de vous prévenir, toi et tes sœurs, de la naissance. Je me demande bien quand j'aurai enfin un fils !  J'ai tenté de faire ramener tes sœurs qui étaient dans les régions rebelles d'Imline mais je n'ai pas réussi. Les nobles rebelles ne veulent pas me les rendre et mes filles préfèrent rester là-bas que revenir ici. Ces traitres m'ont volé la majorité de mes filles ! Comment vais-je faire pour les empêcher de me faire honte en servant l'ennemi ?

Adeline ouvrit de grands yeux. Cet homme n'aimait pas ses filles. Il avait juste peur pour son honneur.

-Mais bref ! reprit le Vicomte. Je ne t'ai pas appelé pour te parler de ta famille, Vanille. Il faut tout de même attendre tes sœurs qui logent au château en ce moment avec leurs maitres.

-Je ne les ai pas vus depuis que je suis ici, dit Vanille.

-Le château est grand et il y a plusieurs salles à manger pour les demoiselles de compagnie, les professeurs et les écuyers. Tu es dans celle de Pélicia alors que tes sœurs sont majoritairement dans celle de Romèc. A part...comment s'appelle celles que j'ai envoyé chez le marquis Kevin de Pélicia et chez le comte Florentin de Pélicia ?

-Dora chez le marquis et Yasmina et Céleste chez le comte, souffla Vanille alors qu'Adeline levait les yeux au ciel dans le couloir : le Vicomte ne se souvenait même pas du prénom de toutes ses filles.

-Ah, oui. C'est ça !

-Dora s'est mariée avec le fils du marquis et est restée avec son mari et ses deux enfants en Pélicia. Le marquis n'avait pas besoin d'eux.

-Elle s'est mariée sans mon consentement ? s'écria le Vicomte.

Adeline entendit un grand fracas, comme si une pile de feuilles et un tas de livres étaient tombés par terre.

-D'après ce qu'elle m'a écrit dans ses lettres, fit Vanille d'une petite voix, le marquis vous aurait envoyé des dizaines de lettres pour tout arranger mais vous ne lui avez jamais répondu. Il a fini par demander au roi qui a expliqué que vous étiez occupé à ce moment mais que vous seriez sûrement d'accord. C'était il y a deux ans.

-Ah...fit le Vicomte qui semblait s'être calmé. Si le roi a donné son accord, c'est parfait...

-Quant à Yasmina, dit Vanille. Elle est morte l'année dernière d'une maladie que les médecins n'ont pas réussi à soigner. Céleste est restée avec la fille du comte en Pélicia car celle-ci n'est pas venue ici. Je n'ai jamais pu correspondre avec mes sœurs des autres régions car envoyer une lettre sur de longues distances était trop cher. Je ne sais pas ce qui est donc arrivé à celles de Romèc.

-Eh bien c'est parfait ! fit le Vicomte.

Adeline resta stupéfaite. Vanille venait de dire au Vicomte que l'une de ses filles étaient mortes et il ne s'en souciait même pas une seconde.

-Mais j'ai envoyé chercher tes sœurs qui devraient être ici et elles ne sont pas là.

Des pas se firent entendre dans le couloir et Adeline s'éloigna sans faire de bruit de la porte et marcha comme si elle ne faisait que passer. Elle croisa trois filles blondes et une petite brune qui entrèrent chez le Vicomte. Adeline reprit aussitôt son poste d'espion.

-Bonjour Vanille, bonjour père. Susie et Françoise ne sont pas venue au château, expliqua l'une des filles.

-Eh bien ce n'est pas grave... Asseyez-vous ! J'ai une mission pour vous. Ecrivez à vos sœurs qui se trouvent dans les régions ennemies et utilisez tous les moyens possible pour les convaincre que leurs maitres sont des traitres et qu'il faut les tuer. Dites-leur de les espionner et de m'envoyer ce qu'elles ont trouvé !

-Nous le ferons, dit une fille.

-Bien, vous pouvez disposer !

Adeline se précipita vers l'escalier et dégringola les marches avant que les filles n'aient le temps de sortir et d'arriver près de l'escalier. Elle manqua s'écraser contre un mur et se laissa tomber au détour du couloir menant aux chambres des invités de Pélicia. Là, elle écouta les filles continuer à descendre jusqu'en bas en reprenant sa respiration.

-Besoin d'aide ?

Adeline se retourna en sursautant et vit Gloria et ses frères.

-Qu'est-ce que vous faites là ? demanda Adeline en prenant la main que son amie lui tendait pour l'aider à se relever.

-On t'a suivi mais on est resté dans l'escalier pour ne pas te déranger.

-Qu'as-tu appris ? demanda Sage.

Adeline leur expliqua alors tout ce qu'elle avait entendu et les conduit jusqu'à sa chambre. Elle les fit entrer et s'installa au bureau en leur disant de s'asseoir quelque part.

-Je vais écrire tout de suite cela à la reine, ainsi qu'aux nobles qui ont une fille du Vicomte à leur service, dit-elle en sortant une pile de papier. Vous pouvez me dire qui en a une à son service ?

-Moi ! fit Gloria.

Une fois qu'elle lui eut donné les noms et que les lettres furent écrites, Adeline se pencha par la fenêtre et avisa des pigeons qui picoraient des miettes de pain non loin de là.

-Pigeons, fit Adeline en se concentrant pour faire agir son pouvoir. Venez jusqu'à moi et obéissez-moi !

Sous les yeux étonnés de Gloria et de Fred, les pigeons entrèrent dans la chambre.

-Ne bougez-pas ! leur ordonna Adeline en leur attachant à chacun une lettre à la patte. Toi, tu vas tout de suite donner cette lettre au duc de Fiéry. Toi, tu vas chez le comte d'Angea...

Après qu'elle ait eu finit la distribution, les pigeons s'envolèrent et Adeline se retourna vers les trois autres.

-Et voilà le travail ! dit-elle avec un grand sourire.

Diana ; Tome 2 : La force des ElémentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant