26. Dernier soupir, dernier sourire

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Elle eut une sorte de flash, de déjà-vu. Des images défilant rapidement dans sa tête montraient Paul Jones et toute une armée d'hommes se dirigeant vers le village. Elle ne savait pas si c'était réel, mais cela le semblait. Le poids dans sa poitrine grossissait au fur et à mesure que le temps passait. Elle plissa les yeux comme si elle n'arrivait pas à croire à ce qu'elle venait de voir, puis se leva brusquement, s'arrachant à l'étreinte de Cody.

— Cody, tu m'as trahie, s'égosilla-t-elle.

Ce dernier se mit debout, paraissant surpris.

— De quoi tu parles ? demanda-t-il en la retenant par le bras.

Luz retira violemment son bras. En panique et les idées sens dessus dessous, elle se mit à courir vers le lieu où résidait Célesta. Le vent frais lui frappait le visage et ses pieds s'enfonçaient dans le sol mou à chaque pas. Elle toqua violemment à la porte qui s'ouvrit après un laps de temps pour laisser apparaître le visage fatigué et inquiet de Célesta.

— Que se passe-t-il ? demanda Célesta en tentant d'analyser l'expression de Luz.

— Ils arrivent, ils arrivent, répondit-elle, le souffle court. Je suis désolée, tellement désolée de ne pas avoir pu empêcher ça, se lamenta-t-elle.

Ces phrases menèrent Célesta à revivre l'attaque des humains, celle qui avait eu lieu quelques années plus tôt. Elle voyait en Luz son frère ; elle avait prononcé les mêmes paroles que lui, lorsqu'il s'était senti trop faible pour défendre son peuple. La peur fit son apparition dans les yeux de Célesta alors qu'un voile d'anxiété les hantait toutes deux.

— Viens, on doit préparer la défense, déclara Célesta.

Elles marchèrent hâtivement. Quelques instants plus tard, elles arrivèrent dans la grande cour. Célesta sonna une petite cloche qui produisait un son imposant et tous les nelcaliens sortirent de leurs résidences, effrayés. Ils connaissaient la signification de ce son de cloche : danger. Mais ils ne s'attendaient pas à l'entendre ce jour-là, encore moins après autant de malheurs. Or, comme les malheurs n'arrivaient pas seuls, cela devait être des plus logiques.

— Préparez-vous, peuple, ils arrivent, hurla Luz.

Ils étaient tous apeurés et anxieux, maudissant cette journée qui ne leur apportait que malheur.

— Je t'avais dit qu'il ne fallait pas leur faire confiance, lui reprocha Nerdy qui venait d'arriver sur les lieux.

Luz ne répondit rien, regrettant amèrement son choix d'intégrer les humains au village. Elle n'arrivait pas à croire que Cody ait pu la trahir ainsi. En soi, elle n'avait aucune preuve et jugeait plutôt rapidement, mais seul quelqu'un ayant déjà intégré le village pouvait savoir comment y accéder. Il était aussi le seul à être lié à Paul Jones. Peut-être que l'erreur de jugement constant de Luz se répétait, mais le flux d'adrénaline, de peur, de colère et de doute la submergeant ne lui laissait pas l'esprit clair. Celui qu'elle suspectait de traîtrise fit bientôt son apparition, au milieu de tout ce peuple qui ne souhaitait que sa mort, au milieu de ces regards assassins et accusateurs.

— Je te jure, Axa, que je n'ai rien à avoir avec ça, se défendit Cody qui semblait avoir déjà compris ce qui se passait.

— Ah parce que maintenant je ne suis plus ta Luz, mais Axa ? rétorqua-t-elle sèchement, un goût amer en bouche.

— Non, enfin si. Bordel, fais-moi confiance, enchaîna Cody, désespéré.

— Tais-toi, s'écria-t-elle.

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